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[7.1.4]

§ IV. — Des substances alimentaires propres à la nourriture des bestiaux.

Les alimens qui servent principalement à la nourriture du bétail en été sont : le trèfle, la luzerne, le sainfoin, les vesces et l’herbe en vert (voyez les articles Pâturage et Plantes fourragères tom. Ier, pag. 454 et suiv.). En hiver on supplée à cette nourriture par les alimens suivans :

A. Foin et regain. Le foin est le fourrage le plus sain lorsqu’il vient d’une bonne prairie ; mais favorisant plus particulièrement la force musculaire et l’énergie, il convient mieux aux bêtes de travail qu’aux autres. Le regain est préférable pour les bêtes laitières ou à l’engrais. Il en est de même des fourrages artificiels séchés qui, surtout le sainfoin, équivalent au bon foin. Du reste, il est rarement avantageux de ne nourrir les animaux que de foin.

B. La paille donnée seule est un mauvais aliment, mais mélangée avec d’autres substances, surtout avec des alimens aqueux, elle peut être employée avantageusement à la nourriture du bétail, et, dans quelques cas, remplacer le foin. On hache quelquefois la paille et les fourrages secs en général ; cette méthode est bonne lorsqu’on veut mélanger ces alimens avec des grains, ou avec des substances aqueuses, ou bien lorsqu’on veut les faire tremper ; il est nécessaire néanmoins de donner toujours une partie de la paille et du foin entiers. Toute la paille que l’on destine pour litière peut être mise d’abord devant les bêtes qui en tirent le meilleur. C’est le matin à jeun et le soir que le bétail mange le plus volontiers la paille.

C. Les feuilles d’arbres. Plusieurs espèces d’arbres (voy. t. IV, Agric. forestière), coupées en août et séchées, fournissent un bon fourrage, surtout pour les moutons et les chèvres. Les feuilles du peuplier du Canada sont regardées par Block comme équivalant au meilleur foin.

D. Pommes de terre. Elles forment une excellente nourriture pour les diverses espèces de bestiaux ; mais les bêtes bovines et ovines seules s’en accommodent lorsqu’elles sont crues, encore faut-il que ces animaux y soient accoutumés, et jamais elles ne doivent composer plus de la moitié de la nourriture ; le reste doit être donné en foin ou paille. Quant aux pommes de terre cuites, elles sont mangées avec plaisir par tous les bestiaux et peuvent composer une partie notable de leur nourriture. Lorsqu’on donne en outre du grain et du foin, ou de la paille, il est bon de hacher ces derniers et de mêler le tout ensemble. L’expérience a prouvé, du reste, que les pommes de terre crues favorisent davantage la sécrétion du lait, tandis que les pommes de terre cuites sont préférables pour l’engraissement. On les regarde comme équivalant en moyenne à un peu plus de la moitié de leur poids en foin. La cuisson augmente un peu leur valeur nutritive. Cuites, elles se donnent écrasées et refroidies ; les pommes de terre crues, de même que toutes espèces de racines, se coupent avec un coupe-racines. Deux hommes coupent avec le coupe-racines circulaire, jusqu’à deux milliers par heure. On a soin auparavant de nettoyer les racines, soit avec un cylindre à claire-voie tournant dans de l’eau, soit en les jetant à la pelle. On ne doit pas en couper plus qu’on ne peut en faire consommer dans la journée.

E. Les betteraves. Elles conviennent moins que les pommes de terre aux bêtes laitières, mais elles conviennent mieux pour l’engraissement ; c’est surtout le cas pour les espèces peu aqueuses comme la betterave de Silésie. Il est avantageux pour cette raison de les donner conjointement avec les pommes de terre. Elles sont moins nutritives que celles-ci ; il en faut environ 230 livres pour équivaloir à 100 livres de foin.

F. Les résidus des fabriques de sucre de betteraves s’emploient de même que les racines entières. Leur valeur nutritive dépend de la perfection des procédés et de l’espèce de betteraves employée. Les résidus provenant des fabriques, où les presses sont peu énergiques et où la pulpe n’est pas soumise à l’action de l’eau chaude ou de la vapeur, ont à poids égal une valeur nutritive équivalente et quelquefois supérieure même a celle des betteraves. Dans le nord de la France on les paie 5 et 6 francs le millier, souvent même davantage. En les faisant sécher ou en les entassant hors du contact de l’air dans des fosses, on peut les conserver assez longtemps ; une addition de sel, dans ce dernier cas, rend la conservation plus facile, tout en améliorant la qualité de cet aliment.

Ou emploie aussi à la nourriture du bétail les mélasses dont on ne peut tirer d’autre parti ; on les donne étendues d’eau et mélangées avec du foin et de la paille hachés sous forme de soupe.

Quant aux autres racines, voyez l’article de leur culture.

G. Les résidus de brasserie. Ils sont excellents pour tout bétail, même pour les chevaux, lorsqu’ils ne sont pas aigres. Les autres bestiaux, surtout les porcs, les mangent volontiers dans ce dernier état. Les résidus provenant d’une livre de malt peuvent être regardés comme l’équivalent d’une livre de foin. On peut les conserver dans des fosses en les salant et en les couvrant ; du reste ils favorisent la sécrétion du lait.

H. Les résidus de distillerie de pommes de terre et de grains, étant très-liquides, s’emploient avantageusement pour détremper des fourrages secs et durs, de la paille hachée, des siliques de colza, des gousses de légumes, du foin, etc. Ce mélange est nécessaire lorsqu’on veut faire consommer ces résidus en grande quantité. On doit mettre les substances sèches dans les résidus pendant qu’ils sont encore chauds et les laisser tremper l’espace d’une demi-journée ; on évite de les donner chauds parce qu’ils font tomber les dents du bétail. Ils favorisent la sécrétion du lait, mais celui-ci est moins bon qu’avec les résidus de brasserie ; du reste les vaches et les porcs seuls s’en nourrissent pendant longtemps sans inconvénient ; les moutons s’en engraissent, mais s’en trouvent mal à la longue, et les chevaux ne les mangent pas. Plus ils sont aigres, moins ils ont de valeur, et gâtes, ils nuisent. On évalue leur qualité nutritive à 30