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chap. 1er.
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DU COLZA.

Selon l’un ou l’autre de ces modes, dont nous traiterons successivement en nous occupant d’abord du colza d’hiver, le sol exige une préparation différente.

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Art. ier. — Du Colza d’hiver.

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§ i. — Des semis.

A ne considérer que la main-d’œuvre et les frais de culture, les semis pourraient paraître plus économiques que la transplantation, mais il n’en est pas toujours ainsi dès que l’on compare les deux méthodes dans l’ensemble de leurs résultats.

Comme la terre doit être préparée par plusieurs façons, et comme les semailles réussissent incomparablement mieux, année commune, dans nos climats, lorsqu’elles sont faites dès la fin de juillet, ou, au plus tard, dans le courant d’août, il arrive trop souvent que les semis en place ne sont possibles que sur jachère. — Dans ce cas peu favorable, le compte de la récolte se trouve chargé de deux années de loyer. — Il est de plus à remarquer que si, dans la pratique habituelle, les semis n’exigent pas plus d’engrais que les transplantations, ils épuisent davantage la terre, attendu que tout l’accroissement du colza se fait sur le même sol, tandis que, d’après le 2e mode, il se fait réellement sur deux sols différens. — Des faits nombreux semblent même attester, quelque étrange que cela puisse paraître, que le terrain qu’on emploie en pépinière et qui n’est guère, à la vérité, qu’un sixième de l’espace destiné à être planté, est épuisé au moins autant que celui dans lequel le colza porte ses graines.

Le semis à la volée est le plus simple, mais aussi le moins productif. Voilà, d’après M. Hotton, comment on le pratique le plus ordinairement en Belgique: «Aussitôt après l’enlèvement de la récolte qui a précédé le colza, on donne à la terre un labour qui, quelque temps après, est suivi de la herse. Un second labour a lieu immédiatement, puis on sème après avoir encore passé la herse. On couvre ensuite par deux dents, c’est-à-dire en passant deux fois une herse légère sur le semis. Enfin, on roule en long et en travers. — Aussitôt qu’on a semé, hersé et roulé, on tire à la charrue des rayons espacés de 8 en 8 pieds, ayant soin de les diriger vers la pente pour favoriser l’écoulement des eaux pluviales. La terre, ainsi divisée en planches, est laissée dans cet état pour le moment. — Mais, lorsque le colza a atteint un certain degré d’accroissement, ce qui arrive ordinairement deux mois et même plus après la sémination, on procède au buttage en creusant un fossé à la place de chaque rayon et dans le rayon même, et en jetant les terres qui en proviennent à droite et à gauche entre les plants de colza. — Ce fossé a ordinairement un pied carré, et on a soin, en le creusant, de conserver, autant que possible, les mottes de terre dans leur entier, afin de mieux abriter le colza. Ce travail fini, on n’ajoute plus rien à la culture jusqu’à la récolte.» On remarquera qu’il s’agit ici de la Belgique, où les terres sont habituellement dans un état parfait d’ameublissement et de propreté.

Dans d’autres localités, après avoir éclairci le plant selon le besoin, au lieu de le butter, ainsi qu’il vient d’être dit, et malgré la dépense assez forte qu’entraîne cette seconde opération, on le bine une ou deux fois à la houe à main. — Ce sont souvent des femmes qui exécutent ce travail.

De bons cultivateurs n’emploient pas moins de 40 voitures de fumier par hectare. D’autres en répandent de 25 à 30 seulement. Il est clair que ces proportions peuvent et doivent varier suivant l’état du sol.

Les semis de colza à la volée exigent de 6 à 8 litres de graines par hectare, ce qui équivaut, en poids, à environ 4 à 5 kilogrammes.

Ces sortes de semis succèdent fréquemment, dans le Nord, à des récoltes d’avoine, afin d’être à temps de les effectuer en temps opportun, on fait javeler cette céréale en petites meules régulièrement alignées ou en gerbes appuyées deux-à-deux et rangées par lignes de manière à ne couvrir qu’une faible partie de la surface du champ ; on peut ainsi donner un premier labour et un hersage entre les lignes. — Aussitôt après l’enlèvement des meules ou des cordons parallèles, on répand l’engrais ; — on laboure la pièce en entier ; — on herse de nouveau, puis on donne le labour qui doit précéder immédiatement le semis.

Les semis à demeure en rayons partagent avec les plantations en ligne l’avantage précieux de rendre les binages plus faciles et de permettre d’en donner à peu de frais de plus fréquens, ce qui contribue non seulement à augmenter les produits de la récolte, mais encore à améliorer sensiblement le sol pour les cultures suivantes.

Sur une jachère après une récolte précoce, toutes les fois enfin qu’il est possible de préparer suffisamment le sol avant l’époque la plus favorable aux semis, ce mode peut donner de fort bons résultats.

La terre ayant été préparée comme il a été dit plus haut, au moyen du rayonneur on trace à sa surface de petits sillons espacés de 18 po. (0 m 50 environ), après quoi on répand dans chacun d’eux la semence à l’aide d’un semoir à brouette, d’une bouteille ou de toute autre manière (voy. Tome I, Ensemencemens), de façon qu’il se trouve environ une douzaine de graines par pied de longueur des lignes. Un seul homme peut ainsi semer à peu près un hectare et demi dans sa journée.

La quantité de graine employée par hectare est de 2 à 3 litres.

La quantité d’engrais est la même que pour le semis à la volée.

Il est essentiel d’éclaircir et de biner le colza de bonne heure en automne, c’est-à-dire, dès que les plants sont assez forts pour supporter une façon ; dans les semis en rayons, le binage se donne avec la houe-à-cheval et l’on éclaircit les plants à la main ou avec la binette. Rarement on réitère ce binage avant l’hiver, mais on ne doit pas manquer d’en donner un nouveau et même deux au besoin, en mars et avril. En bonne pratique, quelques femmes suivent la houe pour déraciner complètement les mauvaises herbes soulevées par l’instrument.