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liv. ii.
Cult. industrielles : des plantations de bordure, etc.

gné et incertain pour lui, leurs utiles produits.

Du reste, nous ne nous étendrons pas ici davantage sur la formation et l’entretien d’une pépinière, puisque cette matière a été le sujet d’un article étendu au commencement du 5e livre (Agric. forestière, T. IV) ; comme on peut greffer les arbres à haute tige, soit dans la pépinière, soit après les avoir transplantés à demeure, nous parlerons de la greffe après la plantation.

La transplantation à demeure doit avoir lieu lorsque l’arbre, sauvageon ou greffe, appelé aussi ente, a de 4 à 6 pouces de tour (10 à 14 centimètres). La plantation ne doit pas avoir lieu trop tôt, parce que les arbres n’offriraient pas de résistance ; on ne doit pas non plus la faire trop tard ni avec des sujets trop forts, parce qu’ils occuperaient inutilement la place dans la pépinière, reprendraient plus difficilement, et pousseraient moins bien durant les premières années.

Nous croyons peu utile de rappeler ici les principes fondamentaux des plantations, applicables à toutes sortes d’arbres, comme de planter en octobre ou novembre si le terrain est sec ou sablonneux, et, au contraire, au printemps si le sol a des qualités opposées ; de creuser les trous d’avance afin que le terrain s’améliore et se mûrisse, et de les faire aussi grands que possible ; de placer sous les racines de l’arbre une couche de gazons retournés, de curures de fossés, de bonne terre enfin, sur laquelle on le dispose ; de bien étaler les racines qu’on a conservées aussi entières que possible ; de les recouvrir de bonne terre meuble qu’on insinue avec soin dans tous leurs interstices, et qu’on presse suffisamment pour qu’elles ne puissent plus être ni remuées ni déplacées ; de mettre à la surface la moins bonne terre et de la recouvrir de pierres, si le trou en a fourni et qu’on aura eu le soin de mettre de côté, etc. — L’arbre ne doit être enfoncé que de 2 ou 3 pouces de plus qu’il ne l’était dans la pépinière.

Les arbres plantés dans les champs étant généralement exposés aux atteintes des bestiaux, il est presque toujours nécessaire de les garnir d’épines ; on choisit les rameaux épineux les plus longs, on les fiche en terre par le bas et on les attache à la greffe, au moyen de liens, en plusieurs endroits. M.  L Dubois recommande l’emploi d’un fort tuteur haut de 5 pieds, qu’on incline un peu, et qui est armé de 3 chevilles présentant 6 pointes de 9 à 10 pouces, placées à la hauteur où les animaux pourraient se frotter ; ce tuteur est lié à l’arbre par un hart, et on évite une pression nuisible au moyen d’un peu de mousse placée à l’endroit de la ligature.

Le pommier et le poirier viennent à peu près dans tous les terrains et à toutes les expositions ; cependant ils prospèrent bien mieux dans un sol gras et profond, sain sans être sec, frais sans être humide, et à l’exposition du sud ou du sud-est. Celle de l’ouest est surtout nuisible aux arbres fruitiers, parce que les vents les ébranlent, en brisent les branches, et font tomber au printemps la fleur et à l’automne les fruits qui, jetés bas avant la maturité, sont perdus ou ne donnent que des produits de très mauvaise qualité ; dans les terres maigres et humides, l’arbre ne pousse pas, se couvre de mousse, et ne produit que des fruits chétifs ; dans les sols profonds les racines s’assurent avec solidité, puisent plus de vigueur et de nourriture ; l’arbre est plus beau et donne de meilleurs fruits.

Nous parlerons dans la dernière section de ce chapitre de la distance qui doit séparer les arbres et des particularités relatives aux plantations en bordure ou en vergers.

Lorsqu’on ne veut que des arbres à cidre, et qu’on a fait choix dans la pépinière de sauvageons à feuilles larges, à gros boutons, ce qui annonce de gros fruits, on peut se dispenser d’avoir recours à la greffe ; mais cette opération est indispensable pour s’assurer des variétés déterminées, et cela est préférable sous tous les rapports. Au reste, la greffe des pommiers et poiriers n’offre aucune difficulté et ne cause jamais la perte d’un sujet ; comme elle a lieu sur des individus déjà forts, on emploie presque toujours la greffe en fente qui réussit très bien, et donne des jets vigoureux ; si la greffe vient à manquer ou à être cassée, on en est quitte pour recommencer l’année suivante.

§ III. — De l’entretien des plantations.

Peu d’arbres sont moins exigeans pour les soins de culture que ceux qui nous occupent, et l’on voit des plantations fort belles et fort productives, souvent entièrement abandonnées à la nature. Cependant ce n’est pas là un bon exemple à suivre, et les soins d’entretien, peu dispendieux et fort faciles qu’on ne doit pas négliger de donner, sont toujours grandement récompensés par la belle venue et la fructification des arbres ; c’est surtout durant les premières années de la plantation que les poiriers et les pommiers ont besoin de ne pas être entièrement délaissés à eux-mêmes.

Le pied des arbres doit être labouré chaque année à la surface et même amendé avec des gazons retournés, des curures de fossés, de la bouse de vache, etc. Ce travail est surtout indispensable dans les prairies non labourées. — Il faut avoir soin d’enlever les gourmands du sauvageon, qui poussent souvent au pied de l’arbre ou au-dessous de la greffe, et qui consomment la sève en pure perte. — Plus tard, il faut couper les rameaux trop multipliés ou mal venans, en ne laissant que les mieux placés et les plus vigoureux, afin d’obliger l’arbre à s’élever et à former une belle tête. Lorsque ces rameaux sont rabougris et affectent une disposition inclinée vers le sol ou même horizontale, on obtient souvent de bons résultats en les recépant près de la greffe sur un œil supérieur, lequel donne un beau jet vertical et reforme l’arbre ; il est bon alors d’assurer une végétation plus vigoureuse en labourant le pied de l’arbre et y mettant quelques engrais. Ces soins de taille et de direction sont particulièrement nécessaires pour les pommiers qui, trop souvent laissant retomber leurs branches vers la terre, se trouvent ainsi exposés à la dent des bestiaux et couvrent le sol de manière à le rendre tout-à-fait improductif. — Il arrive souvent que les arbres,