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chap. 3e.
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AMENDEMENS STIMULANS : CENDRES.

dant elles doivent être mises sèches sur des sols bien égouttés. On les emploie en engrais superficiels ou enterrés ; la dose doit être double quand on les enterre ; jointes au fumier, elles forment un compost d’excellente qualité.

12 tombereaux de tourbe fournissent en moyenne un tombereau de cendres ; pour produire 40 hectolitres, engrais nécessaire à un hectare, il faudrait donc 100 tombereaux de tourbe.

Pour brûler la tourbe, en Allemagne, on a une grille de fer (fig. 50), sous laquelle on place du bois ; sur la grille on met des tourbes sèches, et sur les dernières des tourbes humides ; on entretient la combustion de manière à la faire durer le plus long-temps possible, parce que l’expérience a démontré que les cendres de tourbes brûlées lentement sont meilleures.

Cependant, disons qu’il est toujours bien regrettable qu’un combustible propre à tant d’usages perde sa chaleur sans aucune utilité, quand de toutes parts les arts du tuilier, du chaufournier, du potier et l’économie domestique paient chèrement les combustibles. « Heureux le pays qui brûle sa mère ! » Ce proverbe, né dans les pays que l’exploitation de la tourbe a enrichis, devrait être une grande leçon pour les pays de France où elle se trouve en grande quantité, et ces pays sont nombreux. Partout donc où se trouve de la tourbe facilement exploitable, sans qu’on l’emploie ni dans l’agriculture ni dans les arts, on laisse enfoui un trésor d’où pourrait naître la prospérité et la richesse du pays.

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§ iii. — Des cendres pyriteuses ou cendres noires, cendres rouges.

Ces cendres, qui servent à la fabrication de la couperose ou sulfate de fer, et de l’alun ou sulfate d’alumine, se trouvent dans un grand nombre de lieux du nord de la France, à plus ou moins de profondeur dans le sol ; dans le départ. de l’Aisne, elles sont souvent près de la surface ; celles de La Fère n’en sont pas à plus de six pieds. Le lignite y est en général recouvert (fig. 51) : 1o d’une couche d’argile : 2o d’un banc de coquillages fossiles ; 3o d’une formation de grès arénacé, tantôt en roches, tantôt friable. On extrait cette substance sous la forme d’une poudre noire, dans laquelle on rencontre souvent des coquillages, des débris végétaux de différente nature, des bois bitumineux plus ou moins décomposés. L’étude de ces diverses substances les fait regarder par les géologues comme une variété de lignites d’une formation postérieure à la craie, contemporaine de l’argile plastique, et antérieure à la formation du calcaire grossier des environs de Paris.

Lorsqu’on entasse ces cendres, au bout d’une quinzaine de jours elles s’échauffent, s’enflamment même, subissent une combustion lente ; la surface se couvre d’efflorescences en forme de petits cratères. La combustion dure de 15 jours à un mois ; le monceau exhale une forte odeur sulfureuse ; pendant le jour on voit à la surface une vapeur légère, mais la nuit on aperçoit une petite flamme. Après cette combustion les cendres se vendent sous le nom de cendres rouges, et leur effet est presque doublé : on les emploie à dose moitié moindre.

Depuis trente ans que je n’ai vu les extractions des environs de La Fère, l’usage de ces cendres s’est beaucoup multiplié. À cette époque, les cultivateurs du départ. du Nord venaient en grand nombre, quelquefois de 20 lieues, charger leurs immenses voitures de cendres pyriteuses dans leurs divers états ; ils avaient cependant déjà trouvé sur leur sol les cendres noires de Sarspoterie. Ces cendres sont à une assez grande profondeur sous terre ; elles sont employées particulièrement par l’arrondissement d’Avesnes dans lequel elles se trouvent ; l’arrondissement de Cambrai continue à s’approvisionner en grande partie de cendres de Picardie, dont il n’est pas beaucoup plus éloigné, et auxquelles on trouve plus d’énergie. Les Flamands ont, en grande partie, remplacé les cendres de Hollande, cendres de mer, par les cendres pyriteuses ; cependant quelques cultivateurs préfèrent encore l’emploi des premières, quoique plus chères. Les cendres pyriteuses leur reviennent en moyenne à 3 fr. l’hectolitre, et ils en emploient de quatre à six par hectare sur les prairies et pâtures : sur les prairies artificielles la dose est un peu plus forte. On ne les emploie sur les prairies et pâtures que dans les arrondissemens de Cambrai et d’Avesnes, mais dans tous on en amende