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calement et recouverts d’une claie, ou obliquement dirigés et s’affrontant par le haut pour former une sorte de toit ; on place sous la galerie ainsi formée un chien ou un mouton, et le loup, après avoir cherché en vain à les saisir du dehors, s’élance et tombe dans la fosse.

Renard (Félix vulpes, L.). Les cultivateurs voisins des bois ont beaucoup à redouter, pour leurs basses-cours, leurs ruches et leurs vignes, le rusé et patient renard ; mais les chasseurs riches ou de profession se chargent volontiers de les délivrer de cet ennemi, dont ils peuvent d’ailleurs se défaire par les moyens employés contre le loup, ou par des assommoirs, des lacets en fil de laiton, et des fumigations. Différentes compositions dans lesquelles entrent en général des chairs grillées, du galbanum et du camphre, sont indiquées comme propres à servir d’appâts pour le renard. Il faut prendre les plus grandes précautions pour que le piège ne conserve pas les marques de la présence de l’homme, et surtout l’odeur qui lui est propre. La personne qui dresse un piège, qui traîne un appât sur le terrain où elle veut attirer la bête, fera donc bien de frotter la semelle de ses souliers et le piège lui-même, avec les substances qui servent d’appâts ou avec de la graisse. Elle devra aussi laisser autant que possible à l’emplacement qu’elle a choisi, son apparence naturelle.

Famille des Insectivores. — On a dit que le Hérisson commun (Erinaceus europœus, Lin.) (fig.714), qui appartient à cette famille, allait Fig. 714. à la maraude des pommes et d’autres fruits qu’il rapportait sur ses épines. Non seulement le fait n’est pas avéré, mais encore il est douteux que le hérisson touche jamais aux substances végétales ; ce qu’il y a de sûr, c’est qu’il a un grand appétit pour la chair ; aussi fait-il sa pâture de taupes, de rats, de mulots, d’escargots, de limaces, de vers de terre, de larves de hannetons et en général de tous les insectes, c’est-à-dire d’animaux dont le cultivateur est bien aise de se débarrasser ; et, comme d’ailleurs il est craintif, qu’il ne cherche ni à mordre, ni à griffer, au lieu de le détruire on devrait chercher, pour l’avantage des jardins, à en propager l’espèce qui devient rare.

Ce carnassier insectivore écarté, il n’en reste qu’un qui soit préjudiciable aux cultures en France ; c’est la Taupe (fig. 715). Cet animal vit essentiellement, sinon exclusivement, de la chair des petits animaux, notamment des grenouilles, des vers de terre, des vers-blancs et autres larves d’insectes. Sous ce rapport il est donc plus utile que nuisible au cultivateur, mais d’un autre Fig. 715. côté il lui cause beaucoup de dommage : 1° en bouleversant les semis ; 2° en s’emparant, pour faire son nid, de tiges de diverses graminées qu’il saisit par la racine et fait descendre sous terre ; 3° en creusant peu au-dessous de la surface de la terre de nombreuses galeries, qui dérobent aux plantes situées au-dessus l’appui et la nourriture, et qui deviennent des retraites pour d’autres animaux nuisibles, et des obstacles aux irrigations, ou qui, dans le voisinage des rivières, peuvent miner les digues et fournir un passage aux eaux ; 4° en coupant les racines qu’il rencontre ; 5° enfin en élevant des monticules qui rendent la surface des prairies inégales et le fauchage difficile. Néanmoins, tout n’est pas perte pour le cullivateur dans ces opérations de la taupe ; il faut y voir aussi une sorte de labourage, et lorsqu’on étend les taupinières à mesure qu’elles se forment, la terre neuve qui est ainsi continuellement ramenée à la surface fait beaucoup de bien à la prairie ; d’ailleurs, parmi les plantes dont la taupe entame les racines, il en est quelques-unes dont on est bien aise de se débarrasser, notamment le colchique d’automne, auquel elle a préférablement recours en cas de famine.

Ce mammifère vit solitaire et vient rarement à la surface du sol. Il se tient habituellement au pied d’un arbre, d’une haie ou d’un mur, dans un gite d’où il s’éloigne trois ou quatre fois par jour, principalement le matin et le soir, pour chercher sa nourriture et construire ses galeries. Il habite préférablement dans les terres douces et meubles, à moins qu’elles ne soient souvent labourées ou sujettes aux infiltrations et aux inondations. Le mâle est plus fort que la femelle. Celle-ci met bas, au printemps, et peut-être une seconde fois à une autre époque de l’année, 2 à 5 petits. Elle prépare en hiver, pour les y déposer, un nid souterrain couvert d’une voûte solide, dans un endroit élevé et ordinairement protégé par une haie ou un buisson ; on voit 4 ou 5 grosses taupinières fort rapprochées au-dessus de cette demeure. De son gîte la taupe creuse à peu près en ligne droite une galerie principale qu’elle prolonge quelquefois à plusieurs centaines de toises et d’où elle ouvre d’autres boyaux accessoires ; de distance en distance elle rejette en dehors la terre et forme ainsi les taupinières. La profondeur de ces chemins souterrains, les dimensions des monticules varient suivant l’âge et le sexe de l’animal et suivant le degré de chaleur ou de froid. La taupe travaille dans toutes les saisons, mais c’est au printemps qu’elle montre le plus d’ardeur à l’ouvrage. On empoisonne les taupes en imprégnant de noix vomique, d’arsenic ou d’autres dro-