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que, lorsqu’elle a au contraire rencontré l’écorce d’un arbre vivant, y implante l’espèce de disque ou d’épatement qui la termine, et pousse alors de nombreuses tiges qui croissent dans une direction quelconque. La racine du gui traverse l’écorce des plus gros arbres, et, au bout de quelque temps, se trouve greffée si intimement sous le corps ligneux, que tous les sucs de celui-ci traversent sans difficulté du sujet dans cette greffe. Du reste, il ne parait pas y avoir d’adhérence entre le gui et l’écorce de son support ; cette écorce forme bourrelet autour du gui, en sorte que celui-ci ne reçoit point les sucs élaborés dans les feuilles, mais il aspire la sève qui monte dans le corps ligneux. Le gui nuit donc aux arbres en arrêtant la marche des sucs descendans, dont une partie ne va plus alimenter les racines, et en attirant à lui la sève ascendante et la consommant au préjudice des feuilles. Il est évident que le seul moyen de débarrasser les arbres de ces parasites, c’est de les couper à la base de manière à les empêcher de repousser et de donner des graines. C. B. de M.

Section iii. — Des animaux nuisibles en agriculture.

Le nombre des animaux redoutables aux cultivateurs est très-considérable, et on peut dire que tous peuvent lui nuire d’une manière ou d’une autre ; en effet, nos animaux domestiques, lorsqu’ils ne sont pas attachés ou gardés, ravagent nos cultures et dévorent nos récoltes. Le chien, le furet, le chat, qui nous aident à détruire certains animaux nuisibles, peuvent eux-mêmes se rendre déprédateurs. Enfin l’homme, qui est lui-même son plus utile serviteur, devient quelquefois le plus grand ennemi du cultivateur. D’un autre côté, plus de la moitié des animaux sauvages se nourrit de matières végétales, et, parmi ceux qui s’alimentent de substances animales, la plupart font la guerre aux espèces qui vivent elles-mêmes de plantes. « Ainsi le règne végétal, considéré dans son ensemble, dit M. de Candolle, est un vaste laboratoire ou une vaste association d’êtres par lesquels la matière brute est sans cesse transformée en matière organique, et devient par là propre à soutenir la vie du règne animal, tandis que celui-ci, immédiatement ou médiatement, vit tout entier aux dépens du règne végétal, et serait sans lui incapable de maintenir sa propre existence. » Mais l’homme, dans ses vues particulières, n’a pas intérêt à protéger cette harmonie universelle ; de même que lui vit aux dépens de bien des êtres qui sont obligés de lui obéir ou de disparaître devant sa puissance ou son adresse, de même, les végétaux et les animaux qui lui conviennent doivent être préférés et l’emporter sur tous les autres.

Les moyens divers par lesquels les animaux nuisent aux produits de l’agriculture, sont actifs et variés : les uns dévorent les feuillages et les jeunes bourgeons des végétaux, ce sont les plus redoutables, surtout lorsqu’ils portent leurs attaques au moment même de la naissance des plantes ; d’autres vont déterrer les graines confiées au sol pour en faire leur pâture, ou, vivans sous terre, s’en repaissent en cachette et les accumulent pour la saison d’hiver ; il en est qui s’attachent aux racines des végétaux, soit pour s’en nourrir, soit pour se creuser des galeries, et qui causent souvent ainsi les plus grands désastres. De nombreuses espèces vivent des fruits ou des graines qui sont l’objet des soins du cultivateur, et il en est qui déposent leurs germes dans les grains pour les poursuivre et les dévorer tout à leur aise dans nos greniers ; enfin, des classes entières d’êtres vivans, cherchent dans les plantes, non plus seulement le vivre, mais le couvert : ils s’y logent et s’y nourrissent, ou s’y abritent et s’y cachent seulement, ou y déposent leur progéniture, et, par tous ces actes, ils occasionent des accidens et souvent des maladies fort dangereuses pour les végétaux.

Avant d’entrer dans la revue détaillée de ces êtres malfaisans pour nos cultures, et des moyens spéciaux de s’opposer à leurs ravages ou de les écarter, indiquons quelques circonstances générales préservatrices pour les végétaux utiles.

Presque tous les animaux recherchent la tranquillité et la sécurité ; au nombre des circonstances qui les multiplient, il faut donc compter l’existence de grands espaces abandonnés à eux-mêmes, comme les forêts qui sont les repaires d’une foule d’animaux nuisibles, depuis le sanglier jusqu’aux hannetons ; comme les dunes, les landes, les bruyères, qui recèlent des légions d’animaux nuisibles qui se jettent sur les terrains cultivés dès qu’une cause quelconque a favorisé leur développement. On peut conclure de là qu’on augmente la multiplication des animaux nuisibles par les méthodes de culture qui laissent longtemps certaines terres sans être remuées.

Beaucoup d’animaux nuisibles, notamment de la classe des insectes, ne peuvent vivre que sur une espèce ou un petit nombre d’espèces de plantes. En faisant succéder, pendant une ou plusieurs années, des végétaux qui ne leur conviennent pas, on éloignera donc les chances de leur multiplication.

La malpropreté, le désordre, l’incurie, apportés dans le rangement et la conservation des produits de l’agriculture, sont des causes qui multiplient sans cesse les animaux nuisibles et augmentent leurs ravages.

L’une des causes qui favorisent le plus le développement des animaux nuisibles, c’est la destruction irréfléchie des autres animaux qui les détruisent eux-mêmes ; ainsi, des mammiféres, des oiseaux, des insectes qu’on poursuit journellement, rendent au contraire de signalés services : tels sont le hérisson et même la taupe, destructeurs des limaces, des vers, et d’une foule d’insectes ; les fourmis, destructives de beaucoup de pucerons, et surtout un grand nombre d’oiseaux insectivores.

Le gouvernement peut exercer une grande influence sur les améliorations agricoles qui résulteraient de la destruction des animaux nuisibles, principalement en tenant la main à l’exécution des lois concernant l’échenillage, et en les étendant aux hannetons ; et aussi en offrant des récompenses à ceux qui