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chap. 19e.
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MALADIES DES PLANTES.

blanche et cause quelquefois la perte des bourgeons et presque toujours la coulure des fleurs ; cette pratique est susceptible d’un grand nombre d’applications aussi bien dans l’agriculture que dans le jardinage.— On peut avoir recours, dans le même cas, à des arrosemens superficiels avec une eau à la température des sources ou des puits, et qu’il faut avoir soin de répandre avant le lever du soleil : cette eau, en fondant la gelée blanche, empêche la transition subite de l’état glacé à une température élevée, qui parait être cause de la désorganisation des tissus délicats qu’il s’agit de préserver.— On a aussi recommandé, dans le même but, de secouer la rosée, et, pour les blés, de promener une corde assez forte qui courbe les tiges et parait enlever les petits glaçons : deux ou un plus grand nombre de personnes s’alignent dans le champ, de distance en distance, et marchent en portant la corde assez bas pour que les tiges soient fortement abaissées : il est indispensable que cette opération ait lieu avant que les rayons du soleil viennent frapper le champ. — Un autre moyen dont on obtient aussi de bons résultats dans diverses circonstances, c’est de brûler devant les espaliers, les arbres, les champs, les coteaux qu’on suppose frappés de la gelée blanche, du fumier ou de la paille mouillée dont la fumée intercepte les premiers rayons du soleil, et, en réchauffant l’air, fond les petits glaçons.— 2° Pour les végétaux vivaces ou ligneux qui passent l’hiver en plein air, et redoutent les gelées de nos climats, on peut les en abriter, soit en les empaillant avant l’époque des froids, c’est-à-dire en enveloppant de paille ou de fougère les tiges et les branches ou bien les rameaux seulement, suivant la délicatesse de l’individu ; soit en couvrant de litière, de feuilles, etc., ou même simplement de terre, les basses tiges, les racines ou les tubercules qui restent dans le sol durant l’hiver et pourraient y être détruits par les gelées.— 3° Enfin, pour les arbres et arbustes qui n’ont pas été protégés contre les froids, ou pour lesquels la protection donnée n’a pas suffi, on peut au printemps, quand l’apparition des bourgeons indique bien les parties qui ont souffert, rabattre les rameaux gelés sur les parties saines. — Une dernière lésion, résultat de la fâcheuse influence des gelées, consiste dans la désarticulation des parties, d’où résulte la chute des feuilles, des fruits, et même des jeunes rameaux chez plusieurs végétaux, comme la vigne. On a donné à cette affection le nom de champlure.

L’action de la chaleur occasione aussi des affections dangereuses et communes : on en a désigné sous le nom de brûlure ou brouissure, plusieurs de caractères très-différens. On nomme plus particulièrement brûlure, la lésion qu’éprouve un arbre exposé contre un mur à toute l’ardeur du soleil, ou transporté d’un lieu abrité, tel qu’un bois, une pépinière épaisse, etc., à une vive lumière, et dont l’écorce se fend, s’écaille, se sépare du tronc, se dessèche et noircit ; les branches frappées de la sorte ne se nourrissent plus qu’imparfaitement et quelquefois périssent. Les gelées, en soulevant l’écorce, produisent le même effet. Pour garantir les arbres de ces inconvéniens, on enveloppe souvent les troncs et les grosses branches de paille ou de toiles grossières ; mais il vaut beaucoup mieux les abriter avec des planches qui préservent des rayons du soleil sans entretenir l’humidité ; l’écorce se rétablit alors plus ou moins promptement. — On appelle encore brûlure le dépérissement des racines, causé par la sécheresse extrême du sol ; ce mal atteint les céréales principalement dans les terrains sablonneux ou graveleux, qui ont peu de profondeur, et aux expositions chaudes ; on le voit quelquefois s’étendre presque soudainement, se développer sur de grandes étendues, et ruiner les récoltes. Lorsque cela arrive au commencement de l’été, la récolte est perdue entièrement, l’épi se desséchant complètement : quand c’est plus tard, le grain est ce qu’on appelle retrait ; dans tous les cas, la paille perd beaucoup de sa qualité. On reconnait le froment brûlé a la blancheur de sa tige et de son épi.

On désigne plutôt sous le nom de brouissure, l’espèce de brûlure qu’éprouvent les jeunes bourgeons des arbres ou des plantes, par l’effet d’un soleil ardent, d’un vent sec ou des hâles ; les bourgeons encore tendres deviennent subitement noirs ; les extrémités des branches se dessèchent et périssent. On peut attribuer cette affection à l’évaporation qui se fait par les rameaux a l’état de bourgeons et non consolidés ; évaporation qui est très-considérable, et qui n’étant plus remplacée par la même quantité de sève, permet à l’ardeur du soleil de les dessécher, et par conséquent de les frapper de mort, comme l’écorce dans le cas dont nous venons de parler. Les arrosemens, tout ce qui peut activer la végétation, tels sont les remèdes les plus convenables a administrer. — Enfin, on désigne encore sous le nom de brûlure, l’effet produit par l’eau des rosées et par les gelées blanches, sur les feuilles et les fleurs, et dont nous avons parlé tout-à-l’heure.

Chez les céréales et beaucoup d’autres végétaux cultivés, si, lorsque les jeunes tiges sont tendres et vertes, il survient tout-à-coup de grandes chaleurs et de la sécheresse, au lieu de grossir, elles se dessèchent, les graines mûrissent trop promptement, et par conséquent n’acquièrent ni leur grosseur, ni leurs qualités.

On ne sait que trop bien que, si pendant la floraison, il tombe des pluies abondantes, continuelles, surtout accompagnées de vent ou d’une température froide, les poussières des étamines sont délayées, dissoutes, en sorte que les fleurs avortent et coulent. Cet accident fait trop souvent disparaître pour la vigne l’espoir de la plus belle récolte ; mais les céréales et beaucoup d’autres plantes n’en sont pas à l’abri, et, malheureusement, on ne peut offrir aucun moyen au cultivateur pour remédier à cette espèce de coulure.

On connait également bien d’autres effets des mêmes agens extérieurs : une pluie froide, persistante, qui pénètre jusque dans la texture du grain en lait, lui donne un grand volume, mais il n’acquiert ni poids, ni qualité, à cause de l’abondance de son écorce et de la petite quantité de farine qui n’est pas