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trop souvent presque leur seule nourriture, est aussi celle dont les espèces nombreuses font partout la base des pâturages et des prairies naturelles. — Dans beaucoup de lieux, elles concourent essentiellement à la formation des prairies semées.

Parler de toutes les graminées plus ou moins propres à la nourriture de nos bestiaux, au pacage ou à l’état de foin, ce serait reproduire presque en entier l’une des parties es plus étendues de la flore française. Tel ne peut être notre but. Dans ce paragraphe, le lecteur retrouvera seulement les espèces les plus recherchées ou les plus dignes de l’être comme fourrages, soit à cause de l’abondance ou de la qualité supérieure de leurs produits, soit par suite de leur rusticité et de la propriété si précieuse aux yeux de l’agriculteur, décroître sur les terrains les moins féconds et dans les localités les moins favorisées.

En présentant ce travail dans un ordre différent de celui qui a été adopté dans d’autres ouvrages, j’ai eu en vue non seulement de me rapprocher davantage des classifications naturelles qui me paraissent plus satisfaisantes pour l’esprit, mais encore d’arriver à faire mieux ressortir, par le moyen de très-courtes descriptions, les différences principales qui caractérisent les plantes des divers groupes et des genres dont je devrai parler. — À l’aide de ces descriptions, quelque incomplètes qu’elles dussent paraître dans un traité spécial de botanique, et des figures que j’ai fait faire toutes sous mes yeux en consultant minutieusement la nature[1], j’espère qu’on pourra assez facilement reconnaître et distinguer entre elles les espèces, même les plus faciles à confondre si l’on s’en rapportait à l’aspect, sans considérer quelques-uns des détails d’organisation.

Flouve (Anthoxanthum) genre qui appartient à la première division des graminées, c’est-à-dire à celle dont toutes les espèces ont des panicules ou des épis, dont chaque épillet (Voy. page 366) n’est composé que d’une fleur, et qui se trouve aussi l’un des premiers de cette grande division dans les classifications botaniques. — Ses caractères sont : une glume à deux valves inégales sans arête (Voy. b, fig. 644) ; — une balle à deux valves aiguës, oblongues, portant chacune une arête (Voy. a) à la partie extérieure, et renfermant deux étamines.

La Flouve odorante (Anthoxanthum odoratum, Lin) (fig. 644) est vivace. Elle a des tiges à 2 ou 3 articulations, s’élevant rarement au-dessus de 10 à 11 po. (0m271 à 0m300) ; — des feuilles plus ou moins velues, assez courtes ; — un épi ovale, jaunâtre ; — des fleurs à balles (a), d’un roux foncé sous les valves de la glume représentée isolée en b, et portant chacune une arête ou barbe, de longueur différente. — c représente une fleur ou un épillet entier.

Cette espèce se trouve sur des terrains de nature et d’expositions fort différentes : sur des coteaux arides, dénudés de végétation ; à l’ombre des bois et même dans les prairies basses. Ses tiges, généralement peu élevées, la rendent d’un faible produit ; mais si elle ne peut faire seule de bonnes prairies à faucher, elle a deux qualités qui la recommandent à l’attention des cultivateurs : sa grande précocité et l’odeur aromatique qui la fait avidement rechercher par tous les herbivores. Sous le premier point de vue, grâce à sa rusticité, elle convient aux pâturages secs ; sous le second, lorsqu’on mêle en petite quantité ses graines à celles des autres plantes de prairies, elle ajoute à la saveur et à la qualité du foin. — Elle est, du reste, assez commune dans les prés.

Vulpin (Alopecurus), genre assez voisin de la flouve, et dont les caractères sont : une glume à deux valves, uniflore, sans arête ; — une balle, dont une des valves seulement est munie d’une arête extérieure ; — des fleurs en panicules ou épis serrés et cylindriques.

Le vulpin des prés (Alopecurus pratensis, Lin) (fig. 645) a une tige simple, droite, de 1 à 3 pieds (0m325 à 1 mètre) ; — les fleurs serrées sur une grappe en forme d’épi cylindrique, mou, blanchâtre, velu ; — les feuilles lisses et terminées en pointe aiguë. — a représente les deux valves cotonneuses de la glume ; — b les deux valves réunies de la balle, d’où sortent les organes sexuels, et à l’une desquelles adhère une barbe ou arête genouillée.

Sur tous les points de la France, de l’Angleterre et de l’Allemagne, ce vulpin est considéré comme une de nos graminées fourragères les plus précieuses par sa précocité et l’abondance de ses produits. — Son foin, quoique un peu gros, convient également à tous les bestiaux, et surtout aux vaches et aux chevaux.

  1. Mon confrère Vilmorin, l’un des hommes qui se sont le plus occupés de l’étude comparative des graminées fourragères dans la culture en grand, a mis à ma disposition son excellent herbier. — De nombreuses citations apprendront au lecteur que ce n’est pas à ce seul titre qu’il aura contribué à la rédaction des pages suivantes. O. L. T.