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un emplacement où il sera facile d’étendre la litière et d’affourager comme à l’étable, à toutes les époques où l’on est dans l’usage de laisser vaguer les animaux. — En second lieu, pour ceux de travail, le repos est bien plus souvent nécessaire que l’exercice, de sorte que l’objection tombe encore d’elle-même en ce qui les concerne. — Restent donc les jeunes animaux, les vaches laitières et les moutons. A leur égard, les avis sont partagés, et, pour ma part, j’avoue que je ne crois pas qu’on doive les tenir constamment renfermés en de trop étroites limites. Il m’est démontré que les jeunes élèves se développent mieux lorsqu’on les abandonne entièrement à eux-mêmes, au pâturage pendant une partie de la journée. Je dirai aussi, tout en reconnaissant combien il est avantageux de donner du fourrage vert aux vaches, au moins au milieu du jour, pendant les fortes chaleurs et à l’époque où la plupart des herbages ont perdu leur fraîcheur, que l’exercice qu’on leur permet de prendre le soir et le matin est éminemment favorable à leur santé comme à la sécrétion et à la bonne qualité de leur lait. — Enfin, conformément aux opinions assez généralement répandues parmi les bergers, je crois encore que le système de nourriture à l’étable, pour les moutons, doit s’allier à celui du pâturage, autant dans l’intérêt des animaux que par suite de l’impossibilité de faire autrement dans beaucoup d’exploitations agricoles.

La casualité des récoltes que donnent les prairies artificielles n’est guère plus grande que celle de tout autre herbage. A la vérité, dans les domaines dont le sol est varié, si l’on s’obstinait à cultiver partout du trèfle ou de la luzerne, il pourrait bien arriver que ces plantes ne donnassent pas les produits qu’on croyait devoir en attendre, ou qu’elles manquassent même tout-à-fait, de sorte que, faute de prairies permanentes ou de pâturages, on se trouverait fort embarrassé de pourvoir à la nourriture des herbivores ; mais un cas semblable ne peut être prévu dans une exploitation bien dirigée et bien assolée. Si les légumineuses y manquent, ce ne sera ni parce qu’on les aura placées sur une sole qui ne leur convient pas, ni parce qu’on n’aura pas pris les soins nécessaires à leur culture ; la saison seule aura été un obstacle à leur succès, et la saison aurait tout aussi bien arrêté le développement d’autres herbes. Le meilleur moyen d’échapper à la disette accidentelle des fourrages, c’est de varier les produits fourragers ; et, à ce sujet, il faudrait parler longuement des racines, si cette tâche n’était déjà remplie. Je rappellerai seulement qu’elles offrent cela d’avantageux, dans leurs rapports avec l’alimentation à l’étable ou au parc, que, lorsqu’elles surabondent, elles permettent d’augmenter le nombre de bœufs à l’engrais ; — qu’elles sont d’ailleurs susceptibles d’être utilisées pour la nourriture de l’homme, et qu’elles se prêtent en outre, dans l’état industriel de la France, à divers usages qui leur assurent, dans beaucoup de localités du moins, un débit assuré.

L’augmentation des frais est une objection plus fondée, quoique souvent on s’en exagère l’importance. Il est certain que la nourriture, à l’étable exige pour le fauchage journalier, le transport du fourrage, la distribution des litières et le travail des fumiers, plus de matériel et de main-d’œuvre. Cette augmentation dans le cheptel mort, et le nombre de journaliers, est surtout sensible dans les grandes exploitations. Le capital en circulation doit y être nécessairement plus considérable, mais aussi c’est là que l’augmentation de produits est plus importante, car elle est toujours en rapport avec les avances qu’on peut faire au sol. Refuser ces avances là où elles sont profitablement possibles, ce serait à peu près laisser un champ fertile en jachère pour éviter les frais de labour, ou perdre la moisson dans la crainte de payer les moissonneurs.

Les avantages les plus marqués que présente la consommation, à l’étable, du produit des prairies légumineuses et des racines fourragères, sont les suivans : 1° la diminution détendue de terrain réservé pour la nourriture du bétail. Cette proposition a été suffisamment démontrée précédemment.

L’économie de nourriture. En effet, les animaux ne détruisent pas seulement les herbes pour s’en nourrir ; ils leur nuisent plus ou moins, soit en les foulant aux pieds, en se couchant dessus, ou en les rendant moins appétissantes par leur haleine ; — soit en répandant leurs excrémens en trop grande quantité sur un seul point : — soit enfin en les broutant de trop près pendant les fortes sécheresses, ou même en les arrachant dans quelques cas. Contre ces divers inconvéniens, la nourriture à l’étable est un remède certain ; là, tout se consomme et rien n’est perdu.

L’abondance de cette même nourriture pendant toute l’année lorsque l’assolement est bien entendu ; — la convenance de fourrages verts à l’époque des sécheresses, et de racines aqueuses alliées au foin pendant l’hiver ; — enfin, la possibilité de réserver pour une année moins féconde l’excédant de nourriture d’été que le bétail n’a pas consommé.

La moindre déperdition d’engrais : parce que, sans nier que ceux qui sont disséminés sur les pâturages, lorsqu’on prend le soin de les répandre, soient véritablement profitables, il est bien certain qu’ils le sont infiniment moins dans ce cas que si on les utilisait à la culture des champs ou à la formation de composts propres à être répandus sur les herbages.

L’amélioration du bétail, en ce sens qu’avec les soins convenables, qui consistent à le mener a l’abreuvoir, à le faire baigner et à lui faire prendre de temps en temps l’exercice qui convient à son espèce, à son âge et à sa destination ultérieure, on peut, non seulement le conserver en parfaite santé dans les cas ordinaires, mais le préserver de la plupart des maladies les plus dangereuses qui l’atteignent au pâturage, telles que l’inflammation de la rate, la météorisation, la pourriture, etc.

6° Enfin, la plus grande facilité de faire succéder les récoltes fourragères et celles de grain dans un court espace de temps, et l’accroissement de valeur des produits au sol,