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liv. ier.
Agriculture : sol.

faites à peu près de la manière que j’ai indiquée. Pour paralyser les efforts du courant pendant les grandes eaux, on dispose de distance en distance, dans une direction oblique, des haies d’arçons en saule (fig. 25), derrière lesquelles les sables et le limon ne manquent jamais de s’amonceler. La portion inférieure des deux figures 24 et 25 fait concevoir le détail de l’opération.

Fig. 25.
Fig. 25.

§ III. — Des sols calcaires.

Il est bien peu de terrains dans lesquels on ne rencontre pas une certaine quantité de calcaire, tantôt en graviers plus ou moins gros, détachés par les cours d’eau des montagnes primitives et secondaires, et auxquels on a donné le nom de sables calcaires, tantôt sous forme pulvérulente.

I. Sables calcaires. — Presque toujours mêlés aux sables siliceux dont, à cause de l’homogénéité de leur composition et de leur dureté, ils partagent à peu près les propriétés physiques, ces sols ne sont ni assez nombreux ni assez différens des sols graveleux pour nous occuper ici bien longuement. Comme ils se modifient cependant à la longue par suite de l’effet des pluies, des gelées et du soleil, et comme le résultat de leur altération est la production d’une terre calcaire le plus ordinairement mêlée d’argile, ils se trouvent dans des circonstances agricoles plus favorables que les sables purement quartzeux.

La chaux carbonatée à l’état pulvérulent forme la base des terrains crayeux, marneux et de tuf.

II. Sols crayeux. — Ces sols, tels qu’on les rencontre dès les environs de Troyes, d’où ils se répandent indéfiniment dans tout le nord-ouest et l’ouest du département de l’Aube et au-delà, sont composés, dans la plupart des cas, de deux tiers environ de calcaire et d’une quantité variable de sable fin, d’argile, et par fois probablement de magnésie, ou plutôt de carbonate de magnésie. — En cet état, ils sont à bien peu près stériles, à moins de frais considérable de culture. — Quelques-unes des plantes des terrains sableux, telles que l’orge, le trèfle, le sarrasin, les topinambours, les pommes-de-terre, les turneps y donnent çà et là de chétives récoltes. — Un petit nombre de fourrages, parmi lesquels il faut citer, en première ligne, le sainfoin, y végètent plus ou moins bien ; enfin, ceux des arbres qu’on y fait croître avec le plus de succès sont les pins.

La craie absorbe et retient l’eau avec une force qui paraît plus nuisible qu’utile à la végétation, parce qu’elle ne s’en dessaisit que lorsqu’elle est sursaturée, c’est-à-dire qu’elle devient boueuse. — En séchant elle s’agglomère à la surface en une croûte, plus ou moins épaisse, qui, quoique très-friable, réunit au désavantage de se fendiller comme les argiles, celui de ne se laisser traverser ni par l’air, ni par des pluies peu durables. — Ces dernières produisent d’autant moins d’effet sur les sols crétacés, que le tuf, qui se trouve communément à peu de profondeur, est doué d’une puissance d’absorption assez grande pour s’emparer en quelques heures de l’humidité des couches supérieures.

La craie, par sa couleur blanche, reflète les rayons solaires ; elle les empêche de pénétrer la masse du sol, et cause à sa surface une réverbération brûlante, double effet également nuisible à la végétation.

Les gelées ont aussi plus de prise sur les terres de cette nature que sur d’autres ; elles les soulèvent de manière à déchausser quelquefois complètement les racines peu profondes.

Mais un dernier inconvénient, de tous le plus grave, c’est que, soit que la chaux carbonatée, même à l’état pulvérulent, absorbe moins facilement et moins abondamment l’oxigène de l’air, que les sols plus riches en argile et en terreau, — soit qu’elle jouisse de la propriété de hâter particulièrement la transformation des engrais, — soit enfin que, par suite de l’extrême mobilité de ses molécules, elle en soit plus facilement dépouillée par les pluies, toujours est-il que la craie a besoin de fumures plus fréquentes que toute autre terre. — Dans l’impossibilité où l’on se trouve trop généralement de lui donner les amendemens convenables, il faut donc chercher par tous les moyens possibles à y suppléer par le choix et la quantité des fumiers.

Une très-bonne pratique consiste à creuser au bas de chaque champ, le long des chemins d’exploitation, partout où se dirigent les eaux pluviales, des fossés ou des mares destinées à recevoir les terreaux et les bonnes terres entraînées pendant les temps d’averses et d’orages. — On fait de ces dépôts des amas plus ou moins considérables qu’on mêle ensuite avec des engrais liquides ou solides, de manière à les transformer en composts excellens pour toutes les cultures.

C’est surtout dans les sols crayeux que la multiplication des prairies artificielles devient la base de tout bon assolement. Malheureusement peu de plantes y prospèrent comme fourrages. Le sainfoin y donne d’assez bons produits, bien qu’il faille les attendre plusieurs années. La pimprenelle s’y élève peu ; elle convient d’ailleurs plutôt aux moutons