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terrains, et 4 à 5 dans les mauvais ; on pourrait ainsi obtenir des récoltes abondantes, sans nuire à la reproduction du bois. Le revers des fossés, le bord de beaucoup de haies et de murs devraient être toujours garnis de topinambours ; tous les lieux enfin que leur situation ombragée rend impropres à la culture des autres plantes, tels que les vergers dont les arbres sont trop rapprochés, l’exposition nord des avenues, plantations et bâtimens, etc., le recevraient avec avantage. Dans la plupart de ces cas on pourrait abandonner les feuilles sur place aux moutons pendant l’automne, et les tubercules également sur place aux cochons pendant l’hiver.

On peut encore utiliser le topinambour en le plantant en rangées plus ou moins écartées et dirigées du levant au couchant, pour fournir des abris contre le soleil à tous les semis qui redoutent la sécheresse, notamment à ceux des arbres verts. On pourrait même peut-être par ce moyen cultiver en seigle, avoine et quelques autres plantes qui n’ont guère besoin que d’un peu de fraîcheur pour prospérer, les sables des environs du Mans, ceux de Fontainebleau, etc., et les craies de la Champagne.

La rotation de culture préférée par V. Yvart, lorsqu’on veut y introduire le topinambour, est la suivante : 1re année : topinambour, après enfouissement du chaume de la dernière récolte en grain, labours et engrais ; 2o année : céréale de printemps avec prairie artificielle. Dans les labours et hersages, on ramasse soigneusement les tubercules et racines de topinambours qui ont échappé ; plus tard il est indispensable de détruire les nouvelles pousses à l’échardonnette ; 3o année : prairie artificielle ; 4o année, ou après un plus long terme si l’on a adopté une prairie artificielle pérenne : céréale d’hiver.

La culture des topinambours est en général simple et facile, cette plante étant sous ce rapport l’une des moins exigeantes et l’une des plus robustes ; cependant on peut dire que cette culture est la même que pour la pomme-de-terre, et nous renverrons pour les détails à la section 1re de ce chapitre, qui traite de cette plante.

Les topinambours doivent être plantés en lignes plus ou moins espacées, en raison de la qualité plus ou moins bonne du terrain, et distantes en moyenne de 18 po. (0m50). La plantation peut avoir lieu beaucoup plus tôt que pour les pomme-de-terre, les tubercules ne craignant pas les gelées ; ainsi, on peut y procéder dès janvier ou février ; mais l’époque la plus ordinaire est le mois de mars. On emploie de 20 à 25 hectolitres de tubercules par hectare.

Les soins d’entretien se bornent à un premier binage aussitôt qu’on s’aperçoit que la terre commence à se couvrir de mauvaises herbes ; un fort hersage, au moment où les plantes se montrent hors de terre, produit un très-bon effet. On renouvelle les binages avec la houe à cheval aussi souvent que l’exige l’état du sol, et que le permettent les bras et les animaux disponibles. Lorsque les plantes s’élèvent assez pour commencer à ombrager le sol et à avoir besoin d’être fortifiées, on les butte avec le butoir à cheval. Il y a généralement de l’avantage à réitérer cette opération tant qu’elle est praticable, et qu’on peut accumuler au pied des tiges de nouvelle terre, parce qu’il s’y développe ordinairement de nouveaux et beaux tubercules. Après ces opérations, dans des terrains favorables, les topinambours forment une espèce de taillis épais, vigoureux et régulier, qui récrée la vue et annonce au cultivateur l’espoir qu’il peut fonder sur une abondante récolte.

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§ iii. — Récolte et produits du topinambour.

La récolte, et la manière dont on peut l’opérer, sont sans contredit les principaux avantages qui recommandent la culture des topinambours. Non seulement les tubercules supportent impunément en terre comme hors de terre les plus grands froids de nos hivers, lorsqu’on n’y touche pas au moment de la congélation ; mais, ainsi que V. Yvart s’en est assuré, ces tubercules augmentent encore de volume en terre lorsque la partie extérieure de la tige ne donne plus aucun signe apparent de végétation. Il y a donc de ce côté avantage de laisser les tubercules en place, à part l’extrême commodité et la grande économie qui résultent de la possibilité d’éviter ainsi une récolte faite subitement en automne, et l’embarras comme la dépense de loger, emmagasiner et conserver pendant l’hiver des produits très-nombreux. Le topinambour peut donc être tiré du sol au fur et à mesure des besoins, et par conséquent il n’exige ni un local spécial, ni des dépenses quelquefois considérables, ni des attentions constantes, pour être serré convenablement et conservé intact jusqu’à son emploi.

Cependant il est prudent, dans la crainte des pluies prolongées, des neiges et des gelées de longue durée, d’en faire, vers la fin de l’automne, une provision suffisante ; il suffit qu’elle soit mise à couvert et à l’abri de l’humidité, car c’est la seule chose que redoute le topinambour, et cette circonstance doit engager à lui laisser passer l’hiver le moins possible dans des terrains qui y sont ordinairement exposés. Douze à quinze jours d’immersion dans l’eau suffisent en effet pour faire pourrir les tubercules, qui exhalent alors l’odeur la plus nauséabonde. Une forte humidité, lorsqu’ils sont hors de terre, suffit également pour les faire noircir et moisir, comme une grande sécheresse les ride et les rapetisse considérablement. Leur amoncellement et leur mélange avec de la paille ou d’autres corps étrangers, les fait aussi quelquefois germer ou se gâter.

L’extraction des tubercules de la terre s’exécute comme pour la pomme-de-terre. À l’automne, on doit préalablement faucher les tiges le plus près possible de terre, en choisissant un temps sec ; on les lie en bottes ou fagots et on les met à couvert.

La quantité des produits du topinambour varie beaucoup en raison des terrains et des soins de culture qu’on lui donne. V. Yvart, d’après ses essais comparatifs avec la grosse