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Angleterre, où les côtes, comme l’intérieur des terres, sont souvent couvertes de brouillards, et où une couche d’humidité est presque constamment déposée sur le sol, chaque nuit, cette plante trouve tous les élémens d’une bonne réussite. Dans beaucoup de plaines, entièrement sèches en été, du centre et du midi de la France, il ne serait donc pas prudent de les cultiver sans faire attention à cette circonstance ; cependant il est encore dans ces contrées des localités humides, telles que des vallons et des lieux au voisinage des bois et des rivières, où ces plantes trouveraient un air assez chargé d’humidité pour prospérer, surtout si le terrain était naturellement frais et meuble. Mais s’il est des plaines du midi et du centre de la France peu propres à cette plante, dans combien d’autres, soit de nos départemens du nord, de l’est et de l’ouest, soit même de nos pays de montagnes du midi, ne serait-il pas avantageux de la propager, surtout au moyen de la culture en rayons ? Bosc était persuadé qu’en ne semant la plante que tard en été, en août et en septembre par exemple, au lieu de la semer en mai et en juin comme en Angleterre, on en obtiendrait des récoltes dans beaucoup de lieux où l’on ne pense pas qu’elle puisse venir, à cause de la sécheresse de l’été.

L’ensemencement en rayons sur le fumier, comme je vais le décrire, contribuerait efficacement à l’accroissement rapide des navets en leur fournissant l’humidité dont ils ont besoin dans leur jeune âge, et que le fumier consommé a, comme corps éminemment hygrométrique, la propriété de conserver et d’attirer même du sol environnant, pour la donner aux racines qui le pénètrent. Ce bon effet aurait surtout lieu si on choisissait pour semer le moment où la terre est humide, après une pluie, ou au moment où il va pleuvoir. Les premières pluies d’automne, mêlées des dernières chaleurs, viendraient achever rapidement leur croissance, et les mettre en état d’être avantageusement récoltés en hiver.

Presque tous les terrains peuvent produire des navets ; les plus convenables cependant sont ceux qui sont peu compactes (crétacés ou siliceux), un peu frais sans être humides, et d’une certaine profondeur. J’ai vu près de Doncaster des terrains de cette nature, assez mauvais pour n’avoir produit que de l’orge jusqu’au moment de l’introduction de la culture des navets, qui depuis donnaient d’assez belles récoltes de blé. Les terres fortes, argileuses, compactes, sont peu propres à la culture des navets ; ils n’y viennent pas si bien, et donnent généralement moins de produits.

La culture des navets, en Angleterre, commence généralement une rotation de récolte ; par conséquent c’est quand la terre a donné quelques récoltes non fumées et est remplie de mauvaises plantes, qu’on fait revenir celle des navets, pour remettre le sol en état de donner de nouvelles récoltes de céréales.

La sole qui suit les navets varie selon le temps de la récolte de la variété qu’on a cultivée : ainsi, si ce sont des variétés hâtives, si la saison a été favorable à la végétation, et la récolte faite de bonne heure, on sème du blé d’automne immédiatement après. Si on n’a pas pu ensemencer en blé d’automne, ce qui arrive le plus fréquemment en Angleterre et en Écosse, quelquefois on sème l’année suivante du blé de printemps, mais le plus souvent de l’orge ou de l’avoine : cela dépend des terrains. La culture des navets sert à nettoyer admirablement la terre et à la préparer à produire des céréales ; j’ajouterai cependant que, dans les terres légères, où les navets prospèrent souvent le mieux, ils ont l’inconvénient de tellement ameublir la terre, qu’il est souvent nécessaire de faire manger les navets sur le sol par les moutons pour le raffermir. Dans le cas où on ne pratique pas cette opération, il est fréquemment utile d’y substituer le roulage.

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§ iii. — Culture des navets.

Lorsqu’on attache aux navets, comme culture de jachères, l’importance que les Anglais lui accordent, et qu’elle doit avoir pour but principal : d’ameublir et de nettoyer le sol, elle est assez compliquée, difficile et dispendieuse ; c’est en Angleterre qu’elle a été portée à son plus haut degré de perfection, telle que nous la décrirons tout-à-l’heure. Lorsque les navets, au contraire, ne sont qu’une culture dérobée à la suite d’un blé ou d’une autre récolte, cette culture est très-simple et n’exige presque aucun soin.

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i. — Culture anglaise.

Préparation du sol. — En automne, immédiatement après la récolte qui vient d’être enlevée, on donne un labour profond, quelquefois on en donne un second, surtout dans les terres fortes ; ensuite on laisse le champ dans cet état jusqu’au printemps prochain.

En avril, un peu plus un peu moins tard, suivant la contrée sud ou nord, commence la grande série des travaux de cette culture. Quand la terre a commencé à se ressuyer, et par un temps sec, autant que possible, on laboure de nouveau le champ en travers des anciens sillons, et à plat ; le champ a dû être bien nivelé d’abord ; s’il y avait des bas-fonds où, dans les temps de grandes pluies, l’eau puisse se rendre et séjourner, on serait sûr de n’y faire aucune récolte. Quand une partie assez considérable du champ est labourée, le cultivateur divise les attelages, et pendant que la moitié continue à labourer, l’autre moitié commence à herser et à rouler.

Souvent, au lieu de donner les façons de printemps avec la charrue à versoir, on les donne avec les divers instrumens appelés scarificateurs, cultivateurs, etc. (voy. page 200) qui divisent la terre aussi bien, mais sans la retourner, et qui permettent d’expédier davantage de travail pendant les instans favorables.

Quand la terre a été ainsi hersée et ensuite roulée pour être pulvérisée le plus possible, on la herse de nouveau, mais avec une herse plus pesante généralement, à dents recourbées et en fer : avec cette espèce de herse on enlève, sans retourner la terre, la plus grande partie des herbes étrangères et des racines de chiendent surtout, et on les dépose en pe-