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rait avec beaucoup d’avantage utiliser ce moyen de reproduction pour toutes les variétés qui présenteraient la même particularité.

III. Par le moyen des pelures. — On dépouille les tubercules d’une épaisseur suffisante de leur enveloppe ; on divise ces pelures en plusieurs morceaux ayant chacun un œil, et on plante à la manière ordinaire. Cette méthode a donné quelquefois de bons résultats dans les années de disette, mais toutes les fois qu’on n’y est pas forcé par la nécessité, on devra recourir à une méthode plus assurée de multiplication.

IV. Au moyen d’yeux séparés des tubercules. — On a longtemps préconisé ce moyen comme le plus économique. Il est encore aujourd’hui généralement pratiqué dans les environs de Freyberg (Saxe). Il est certain qu’un œil portant une bonne épaisseur de pulpe, placé dans un terrain riche, humide et très-bien préparé, donne des produits satisfaisans. Cette méthode entraîne avec elle plusieurs inconvéniens qui peuvent être écartés lorsqu’on opère en petit, mais que doit forcément subir celui qui plante de grandes étendues de terrain. Ainsi l’amputation des yeux est longue et très-coûteuse ; si on les plante dans un sol et par un temps qui ne soient pas humides, ils se dessèchent et se racornissent : il faut les planter deux fois plus épais, ce qui ne permet plus un espacement suffisant pour la manœuvre de la houe et du butoir à cheval.

V. Au moyen de fragmens de tubercules. — Au moment de la plantation, on coupe les gros et moyens tubercules en fragmens de diverses dimensions, en ayant soin que chaque morceau soit muni de deux yeux au moins. À volume égal, on remarque peu de différence entre des tubercules entiers et des fragmens de gros tubercules, si on les plante dans un terrain sec. Mais si on les met dans un terrain humide, les morceaux de pommes-de-terre ont plus de disposition à pourrir. Cependant, lorsque les pommes-de-terre atteignent un haut prix, ce qui arrive communément au printemps, on pourra user avec avantage de ce moyen.

VI. Par la plantation de tubercules entiers. — C’est incontestablement le moyen le plus sur et souvent le plus économique, pourvu que l’on n’emploie que des tubercules de moyenne grosseur. Trop gros, ils pousseraient un grand nombre de petites tiges qui s’affament réciproquement ; trop petits, les tubercules ne contiennent pas assez de substance amilacée pour nourrir les jeunes bourgeons. Les pousses tendres et délicates, obligées de passer subitement de la nourriture succulente fournie par le tubercule à celle qui se trouve dans les engrais, mais qui n’est point préparée, languissent quelque temps, et il est bien rare que cette circonstance n’exerce pas une influence désavantageuse sur la vigueur de la plante adulte.

VII. Par provignage. — C’est un procédé, fort connu des horticulteurs, pour multiplier promptement des espèces rares ou rebelles à tout autre mode de reproduction. Il ne peut être conseillé pour la culture économique des pommes-de-terre, et ne doit être utilisé que pour les variétés nouvelles dont on ne possède qu’une petite quantité.

VIII. Par semis. — Aussitôt que les baies sont mûres, on les écrase, on les délaie dans l’eau pour enlever le mucilage qui adhère aux petites semences. Au printemps, on sème sur un carré bien préparé ; et aussitôt que les jeunes plants ont atteint la hauteur de 3 à 4 pouces, on les transplante. Les petits tubercules qu’on récolte à l’automne sont mis dans un lieu à l’abri de la gelée, pour être au printemps plantés à la manière ordinaire. Ce mode de propagation n’est usité que dans la vue de multiplier les variétés et d’en obtenir de nouvelles ; il a l’inconvénient de ne pas procurer dans la même année des produits aussi abondans que les autres modes. D’un autre côté, il permet de multiplier au loin cette plante précieuse : c’est ainsi qu’il a été fait, dans ce but, des envois de graines dans la Grèce, il y a plusieurs années. M. Sageret est l’agronome qui s’est occupé avec le plus de succès des semis de pommes-de-terre, et les résultats obtenus par lui ont été très-satisfaisans.

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§ ix. — Des façons d’entretien.

Culture irlandaise. — Avant de passer à ce sujet, nous croyons utile de décrire la culture irlandaise des pommes-de-terre. Voici ce qu’en dit M. Huzard fils, qui l’a étudiée sur les lieux : « L’Irlande est le pays aux pommes-de-terre ; aussi y ai-je vu la culture de cette plante plus commune que partout ailleurs. Elle est singulière, et, malgré la grande perte de terrain qu’elle parait occasioner, elle donne autant de produits et souvent bien davantage que les autres méthodes : elle est la même dans la culture en grand et dans la culture en petit. On défonce grossièrement le sol avec une charrue, une pioche, une bêche, suivant les moyens du cultivateur, ensuite on le divise par planches de 5 à 6 pieds de largeur, entre lesquelles on laisse un espace de 2 pieds à 2 pi. ½ de large, de manière que le champ présente successivement un espace de 2 pieds et un espace de 5 pieds ; ou un espace de 2 pieds ½ et de 6 pieds : on brise alors les mottes de terre sur les grands espaces, et quand il s’y trouve quelque inégalité, on prend pour les remplir la terre du petit espace ; de manière que le champ commence à présenter des planches larges de 5 ou 6 pieds, entrecoupés de fossés de 2 pieds et plus de largeur.

» On porte alors le fumier sur les planches, on l’y étend ; on place les pommes-de-terre entières ou coupées dessus le fumier, et ensuite on les couvre d’une couche de terre de deux pouces environ d’épaisseur que l’on prend dans le fossé. On sème ou on plante ainsi successivement toutes les planches. Quelques agriculteurs placent les pommes-de-terre à des distances égales et assez régulièrement ; mais j’ai vu des champs où les pommes-de-terre paraissaient avoir été jetées à peu près au hasard. Dans cette opération, les planches larges s’élèvent au moins de deux pouces, tandis que les fossés qui fournissent la terre et qui sont de moitié moins larges, s’abaissent au moins de 4. Les