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chap. 17e.
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DES POMMES-DE-TERRE.


tation se répand très-rapidement dans plusieurs cantons de la France septentrionale, et menace de détrôner l’avoine. Il en résultera nécessairement des modifications très-importantes dans la combinaison des assolemens.

Les pommes-de-terre cuites et distribuées à la volaille la font engraisser promptement et déterminent chez les femelles une ponte abondante et précoce.

Les Allemands sont bien connus pour la consommation qu’ils font des pommes-de-terre diversement préparées. Sans vouloir introduire dans nos mœurs de nouvelles habitudes, nous ne négligerons pas cependant de faire connaître quelques économies domestiques en honneur chez nos voisins. On fait avec le mélange de la pomme-de-terre cuite avec le caillé, des fromages excellens et d’une digestion facile. Après avoir fait cuire et épluché les tubercules, on les écrase de manière à en faire une pâte homogène, sans grumeaux, on la malaxe avec une partie égale de caillé, et on laisse reposer deux jours : on pétrit la masse une seconde fois, et on la soumet ensuite aux manipulations ordinaires. — On fait un mélange semblable pour le beurre destiné à être mangé sur le pain, et on s’en trouve bien.

Cadet de Vaux a donné un moyen de faire avec la pomme-de-terre des peintures d’intérieur qui offrent économie et propreté. On prépare deux bouillies, l’une avec des pommes-de-terre cuites, épluchées et écrasées, l’autre avec du blanc d’Espagne. On mélange et on brasse les deux bouillies en ayant soin de mettre deux parties et demie de la seconde, pour une de la première. Cette peinture s’étend au pinceau : elle sèche promptement. Appliquée sur le bois, sur la pierre, sur le plâtre, elle ne s’écaille pas. On peut la colorer avec diverses espèces d’ocres, de noir de fumée, du vert de gris, etc.

La colle de pâte qu’on prépare avec la pomme-de-terre peut être livrée à meilleur marché que celle du froment. Un boisseau produit environ 150 livres de bonne colle, qui peut se conserver dix ou douze jours ; on la prépare en délayant une partie de pulpe râpée dans 2 parties et demie d’eau, portant le mélange à l’ébullition, et ajoutant par livre de pulpe une demi-once d’alun, bien pulvérisé ; — En y ajoutant de l’hydrochlorate ou muriate de chaux au lieu d’alun, on rendra cette colle très-propre à servir de parement ou paron pour les tisserands.

Quant aux fanes de la pomme-de-terre, on a essayé de les donner en vert aux bestiaux ; mais divers accidens ont démontré que quand on y a recours, il faut au moins les exposer quelques jours au soleil avant de les faire consommer, et y ajouter du sel. — D’ailleurs on sait que la coupe prématurée des fanes diminue très-sensiblement la production et la croissance des tubercules.

M. Dubuc, de Rouen, et M. Daolmi, de Sorèze, ont pu retirer de ces fanes, comme de celles de beaucoup d’autres végétaux, du salpêtre ou de la potasse ; mais la diminution qu’en éprouve la récolte de tubercules rend assez rares les circonstances où il y aurait profit à se livrer à cette extraction d’ailleurs très-variable suivant les sols.

§ II. — Espèces et variétés.

Depuis qu’on a eu recours à la voie des semis pour renouveler et multiplier les pommes-de terre, le nombre des variétés s’est accru à un tel point, qu’une classification complète est désormais illusoire. Les caractères qui distinguent chaque variété sont tellement fugaces et insaisissables, qu’il serait impossible au botaniste et au phytographe le plus exercé de donner pour chacune un signalement reposant sur des bases que la culture ou le climat ne pussent désormais modifier. Cette difficulté ne doit pas cependant nous empêcher d’indiquer les principales variétés ou races cultivées aujourd’hui en France.

1. La truffe d’août de la halle de Paris, et du Catalogue de la Société d’agriculture, n. 37 (fig. 616). C’est une des plus recommandables sous le rapport de la précocité et de ses qualités comestibles. Les tubercules sont ronds, et les yeux logés dans des cavités profondes, sans cependant qu’il y ait de protubérances à la surface. En la cultivant dans des lieux abrités, on peut, sous le climat de Paris, en obtenir déjà à la fin de mai des tubercules mangeables, quoique non complètement mûrs.

Fig. 616.

2. La schaw ou chave, n. 129 du Catalogue précité (fig. 617). Jaune, ronde, excellente, plus productive que la précédente, et plus hâtive d’environ 15 jours.

Fig. 617.

3. La grosse grise, nommée en Lorraine paubée. Hâtive et très-productive ; excellente en août et septembre ; elle prend une saveur fade en hiver, pour redevenir sucrée en mars et avril.

4. La grosse blanche, n. 63 du Catal. ; patraque blanche de la halle de Paris (fig. 618). Tubercule blanchâtre maculé de rose, très-