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étant d’ailleurs avidement recherchées par les pigeons, on a recommandé avec raison de les répandre plutôt épais que clair. Cette précaution est surtout nécessaire lorsqu’on les sème sur raies, ce qui est le plus ordinaire, et qu’on les enterre par conséquent à la herse. — Dans ce cas, on peut considérer le plus souvent 2 hectolitres comme insuffisans. La quantité varie jusqu’à près de 300 litres. — Il ne faut pas perdre de vue, cependant, que le semis doit être moins dru quand on vise à la récolte sèche, que quand on ne veut obtenir qu’un fourrage fauchable en vert.

Hors des jardins et des environs des grandes villes où l’on cultive les pois spécialement pour la nourriture des hommes, on les sème habituellement à la volée, du moins en France ; car, en Angleterre, il n’est pas rare de les voir cultiver en lignes, tantôt à la charrue, alors on en répand les grains de 2 en 2 sillons, de la même manière que pour les fèves ; — tantôt au semoir ; — tantôt, enfin, au plantoir, quoique ce dernier moyen soit peu usité.

Mais ces divers procédés sont peu applicables au pois champêtre, que l’on considère chez nous comme une culture étouffante, et que, par conséquent, on a intérêt à voir couvrir entièrement le terrain. Si l’on voulait faire jouir le sol des binages d’une culture sarclée, sans renoncer à celle des pois, on devrait alors choisir une variété mieux disposée à former touffe. Dans les terrains légers, une des meilleures méthodes de cultiver les pois est, après avoir répandu le fumier à la surface du champ, de les semer à la volée et de les enterrer à la charrue, à une profondeur d’autant plus grande que la couche labourable présente moins de consistance. — Dans ces sortes de terres, on ne doit pas redouter de recouvrir de 4 à 5 po. (0m108 à 0m135).

On peut commencer les semis de pois dès que les fortes gelées cessent d’être à craindre. — J’ai indiqué une bisaille d’hiver qui mérite d’être connue, surtout dans le midi, où les récoltes de printemps manquent si souvent, faute de pluies suffisantes. Il est hors de doute, cette circonstance même à part, que les semis d’automne seraient plus productifs. Ceux de printemps doivent rarement être différés, vers le centre de la France, plus tard que la première quinzaine de mars.

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§ iv. — Culture d’entretien et récolte.

Partout où les pigeons sont abondans, on est dans l’usage de faire garder les semis de pois jusqu’après la levée. Une fois que les jeunes tiges ont pris un certain développement, on ne leur donne plus aucun soin jusqu’à la récolte.

On fauche la bisaille aussitôt qu’une moitié environ de ses gousses sont arrivées à maturité. Si on attendait plus longtemps, beaucoup de graines se perdraient par un temps sec, ou pourriraient au bas des tiges par un temps humide. D’ailleurs, les fanes produisent un fourrage d’autant plus succulent qu’elles contiennent encore quelques sucs séveux lorsqu’on les coupe. J’ajouterai que si les gousses de la sommité de la plante ne sont point assez mûres pour s’ouvrir lors du battage, elles ajoutent à la qualité nutritive de ce fourrage, considéré à bon droit comme un des meilleurs qu’on puisse donner, même en sec, à tous les bestiaux.

On bat les pois gris, tantôt au fléau, tantôt à l’aide de simples gaules qui les égrènent fort bien lorsqu’ils sont assez desséchés pour se détacher facilement de leurs gousses. Un soleil ardent facilite beaucoup cette opération. — On vanne ensuite, pour séparer les graines des fragmens de cosses et des nombreux débris de feuilles, auxquels ils sont mêlés.

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§ v. — Des autres variétés de pois cultivées en grand.

Les semis de pois de primeur, qu’on cultive sur d’assez grandes étendues de terrain, surtout aux abords des grandes villes, pour en utiliser les produits à la nourriture des hommes, diffèrent de ceux de la bisaille en ce qu’ils ne se font presque jamais à la volée, mais bien en touffes ou en rayons. D’une et d’autre manière, quoique la quantité de semence soit réduite d’environ moitié, le produit augmente cependant à peu près dans la même proportion, tant est grande l’influence de l’air et de la lumière solaire sur le plus grand développement de chaque touffe. — En général, les semis en rayons me paraissent préférables, non seulement parce que je les considère comme les plus productifs, mais parcee qu’ils permettent les binages à la houe à cheval, binages que l’on doit souvent répéter plusieurs fois, jusqu’à l’époque de la première floraison.

En divers lieux, on butte aussi les pois, de manière à leur tenir le pied plus frais et à les empêcher de se coucher.

« Autour de Paris, la culture des pois de primeur en grand est l’objet d’un produit de première importance, puisqu’on en a évalué le résultat, dans une bonne année, à un million de francs. Ce sont toujours les terrains sablonneux qui y sont consacrés. On laboure à la charrue ou à la houe, mais plus souvent avec ce dernier instrument, pour pouvoir faire des ados en plan incliné du côté du midi, ados auxquels on donne 2 pieds de large, et sur chacun desquels on place trois rangs de pois, dès la fin de janvier ou le commencement de février, et de 8 jours en 8 jours. — Pour expédier un grand semis en peu de temps, une femme accompagne l’homme qui fait les trous, et jette 5 à 6 pois dans chaque trou, que l’homme recouvre avec la terre qu’il tire du trou suivant. Il en est de même quand on sème à la charrue, c’est-à-dire qu’une femme suit le laboureur et fait tomber des graines à peu près de 4 pouces en 4 pouces, graines qui sont recouvertes par la terre du sillon suivant. Dans ce cas, il faut donner peu d’entrure à la charrue. — On étend sur le semis, ou au moins sur chaque touffe, force boues des rues de Paris, conservée de l’automne précédent. — On bine deux ou trois fois le pied des pois, et on pince. Le succès de la récolte dépend beaucoup de la succession des pluies et des chaleurs ; le froid, la sécheresse et les pluies