Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, I.djvu/41

Cette page a été validée par deux contributeurs.
chap. 2e.
27
Sols sableux.

nombre de plantes ; toutefois, il en est quelques-unes qui ont la propriété de les améliorer, et qu’il est toujours facile de faire entrer dans un bon système d’assolement. La luzerne et le trèfle sont dans ce cas. Toutes deux, par leurs racines, pénètrent et divisent le sol à diverses profondeurs, et le rendent plus léger pendant les années suivantes.

Parmi les céréales, le froment et l’avoine conviennent particulièrement aux terres fortes. — Pour peu qu’elles soient plus humides que sèches, ce qui est le cas le plus ordinaire, les graminées vivaces y forment de bonnes prairies naturelles. — Les fèves y réussissent de préférence. — Les pois, les vesces et les gesses, la chicorée, les choux y peuvent donner des fourrages foliacés ; — les rutabagas, les choux-raves, et même les betteraves, des racines alimentaires dont chacun connaît les divers usages ; — enfin, quelques plantes, telles que le colza, le pavot, la moutarde, des produits économiques ou industriels.

Quand les terres fortes sont situées dans des localités basses, elles deviennent excessivement humides, surtout si elles sont abritées du soleil du midi et des vents absorbans, par des montagnes ou des forêts ; elles prennent alors plus particulièrement le nom de terres froides. Lorsqu’on ne peut les débarrasser des eaux surabondantes de l’hiver, la chaleur les pénètre si lentement que la végétation n’y fait presque aucuns progrès. — Dans les climats chauds elles offrent à la vérité quelques chances favorables ; mais, dans le nord et le centre de la France, elles donnent des produits sans saveur, qui ne parviennent pas toujours à leur complète maturité, et qui sont fréquemment détruits par les gelées. — Le meilleur, parfois le seul moyen d’utiliser ces sortes de sols, c’est de les planter en arbres. Les bois blancs y réussissent généralement : conduits en taillis ou en têtards, comme cela se pratique pour les oseraies, ils rapportent beaucoup.

Les schistes argileux, très-abondans à la surface du globe, donnent naissance, par leur décomposition successive, à des sols d’une ténacité d’autant plus grande qu’ils contiennent moins de silice. — Ce sont de véritables terres fortes, mais qui, dans certains cas, avant d’arriver à cet état, présentent des particularités remarquables. Dans une partie de la Vendée, les métayers achetaient et achètent encore fort cher, malgré l’emploi du noir animal et de la chaux, les terres de jardin produites par la décomposition de ces schistes, dès qu’elles ont été améliorées par un certain nombre d’années de culture et des engrais suffisans. — Les vendeurs, ayant ainsi mis à nu le sous-sol, s’empressent aussitôt de le défoncer à une profondeur proportionnée aux cultures dont ils veulent le couvrir. — Le schiste se lève par plaques lamellaires, plus ou moins volumineuses, qu’ils concassent, sans beaucoup de soin, en très-grossiers fragmens ; de sorte qu’après cette opération, le sol présente plutôt l’aspect d’un résidu de carrière que d’une terre labourable. — Cependant, à peine les pluies et les gelées d’une seule année ont-elles fait effeuiller à leur surface celles de ces pierres qui se trouvent en contact avec l’atmosphère, qu’on recommence à cultiver. — On conçoit que ces rocailles soient pendant quelque temps peu propres à la culture des légumes et des plantes à racines chevelues ; mais, pour peu qu’elles soient mêlées à un reste de terre végétale, les arbres y prennent un développement remarquable. — En Maine-et-Loire, les schistes dont je parle, sous le nom de roc, sont habituellement employés pour l’amendement des vignes. Tant qu’ils ne sont pas complètement décomposés, ils divisent la terre, empêchent qu’elle ne se durcisse à sa surface par l’effet des pluies, et qu’elle ne soit trop promptement privée d’eau par les effets de l’évaporation. — Ils augmentent plus tard la couche de terre végétale. À la vérité, leur nature argileuse les rend peu propres alors à l’améliorer, et nécessite l’emploi de nouveau roc.

2o Les terres franches font le passage insaisissable en pratique, des sols argileux aux sols sableux, et semblent faire alternativement partie des uns et des autres. Les proportions de sable qu’elles contiennent varient, ainsi qu’il a déjà été dit, du tiers environ à la moitié et quelquefois au-delà. — J’en ai vu dont on pouvait extraire de 25 jusqu’à près de 40 pour cent de calcaire, d’autres qui, sans être sensiblement moins fertiles, en donnaient à peine 10.

Les terres franches conviennent au plus grand nombre de végétaux usuels. — Toutes les céréales y prospèrent ainsi que la plupart des plantes économiques. — Rarement elles ont besoin d’amendemens. — Elles s’accommodent de tous les engrais. — Elles partagent enfin presque tous les avantages des meilleures terres sablo-argileuses.

§ II. — Des Sols sableux.

Les terrains sableux offrent des inconvéniens et des avantages diamétralement opposés à ceux des argiles. — Ils ne peuvent retenir l’eau au profit de la végétation ; celle des pluies ou des arrosemens les traverse comme elle ferait d’un crible. — Ils s’échauffent à la vérité facilement au printemps, mais, par la même raison, ils se dessèchent promptement et deviennent brûlans en été. — Dans les contrées froides et pluvieuses ils sont parfois fertiles alors que les terres argileuses cessent de l’être ; dans les pays chauds ou tempérés sujets à des sécheresses de quelque durée, ils se dépouillent au contraire de toute végétation pendant le cours de la belle saison, tandis que les terres fortes sont encore couvertes de verdure.

Les terres sableuses changent d’aspect selon la nature du sable ou du sablon qui domine dans leur composition. — Leur couleur est ordinairement jaunâtre ou brunâtre ; parfois d’un blanc plus ou moins pur qui leur donne au premier aspect une apparence crétacée.

Leur culture est peu coûteuse. Il est toujours facile de trouver le moment de les labourer ; car, quelque humides qu’elles soient, elles ne forment jamais pâte comme les argiles, et quand elles sont sèches elles n’offrent pas une grande résistance.

Elles n’exigent pas d’ailleurs des labours aussi fréquens, parce qu’elles se laissent dans