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chap. 12e.
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CONSERVATION DES RACINES.

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§ ier. — Des serres, celliers et caves.

Toutes les observations nous apprennent que la température de la terre, a une certaine profondeur au-dessous de sa surface, est constante, et égale à la moyenne des différentes saisons ; voilà pourquoi les caves nous paraissent chaudes en hiver et froides en été : c’est que la température y varie en effet très-peu. Il est donc certain qu’en plaçant des racines à une certaine profondeur, dans des constructions qui les protégeraient contre l’humidité, on les conservera très-longtemps. De là les caves et les celliers disposés pour la conservation des racines alimentaires à l’usage du bétail ; de là les serres pour la conservation des légumes destinés à nos tables.

Les celliers et les caves seront creusés à une profondeur suffisante pour être à l’abri des fortes gelées. Cette profondeur varie suivant les circonstances de sol, de position et d’abri. Le sol argileux est toujours humide, mais n’abandonne pas facilement son humidité aux objets qui l’environnent : de plus, il a l’avantage de ne point laisser filtrer l’eau ; il est donc convenable aux celliers sous tous ces rapports. Le sol siliceux a la plupart des propriétés opposées : quoique en général il soit plus sec que l’argileux, il ne convient pas aux constructions souterraines, parce qu’il se laisse pénétrer par l’eau. Néanmoins ces circonstances sont aujourd’hui bien moins importantes qu’autrefois, parce que la chaux hydraulique offre de grands avantages toutes les fois que l’on construira sous terre.

La position est singulièrement à considérer. La porte d’ouverture sera placée vers le sud, et tout le bâtiment sera adossé contre une élévation, s’il est possible ; si les circonstances ne le permettent point, on y mettra au moins des arbres, qui arrêtent la neige et abritent contre les vents froids. On sait combien le vent agit puissamment pour faire pénétrer le froid dans les appartemens ; aussi les abris naturels que nous venons d’indiquer seront toujours utiles, et si on ne peut s’en procurer, on s’efforcera d’en construire d’artificiels. Ainsi, on placera près des celliers les meules de fourrages et de grains, les monceaux de bois et de fagots, etc.

L’emmagasinement dans les caves est subordonné à la disposition intérieure des bâtimens. Dans tous les cas, il vaut mieux faire plusieurs petits monceaux que de réunir le tout en un seul : on les arrangera de manière qu’un homme puisse facilement circuler autour de chacun d’eux. Ordinairement, on accole les tas de racines contre les murailles, et on réserve dans le milieu une seule allée. On trouverait plus d’avantages à faire une allée tout autour des murs et à placer les racines dans le milieu. On a remarqué que le contact des murs favorise singulièrement l’action de la gelée et de la pourriture sur les objets qui les avoisinent. Il est vrai que par là on augmentera les frais d’échafaudage, puisqu’au lieu d’avoir à les établir sur une seule face, on sera obligé d’en placer aux quatre côtés des monceaux ; mais on doit peu balancer devant un léger surcroît de dépenses, lorsqu’il s’agit de pourvoir à la subsistance des animaux, et qu’on a des doutes sur la propriété du cellier à former obstacle aux rigueurs de l’hiver.

On placera près de l’entrée les racines qui, ayant été récoltées par un temps peu propice, seraient sujettes à pourrir, afin qu’on puisse les faire consommer les premières, sans déranger les autres monceaux.

Il ne faut jamais placer les racines à conserver sur le sol nu, mais étendre au préalable une couche de feuilles sèches ou mieux de paille. On a recommandé dernièrement, pour le même objet, le charbon réduit en poussière.

Dans tous les endroits où l’on a à sa disposition une source qui sorte immédiatement de terre, on se trouvera très-bien de faire circuler un filet d’eau dans le cellier. Elle y maintiendra, pendant l’hiver, une température chaude qui empêchera la gelée d’y pénétrer ; et, lorsque les premières chaleurs du printemps arriveront, elle y entretiendra une fraîcheur qui préviendra la germination.

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§ ii. — Conservation dans les étables.

On sait que les étables bien construites, tout en permettant la circulation libre de l’air, conservent néanmoins beaucoup de chaleur. On a cherché à utiliser cette chaleur pour établir et chauffer des serres de primeurs. On pourrait, dans la plupart des cas, l’employer plus utilement à préserver les racines de la gelée. Je ne fais qu’indiquer cette idée, à laquelle on a donné suite dans quelques parties de la Belgique. Schwertz, dans l’ouvrage qu’il a laissé sur l’agriculture de ce pays, donne la description d’une étable d’engrais et dans laquelle on peut fort bien conserver les racines au moyen de la chaleur qui se dégage du corps des animaux, et du fumier qu’on y laisse. Nous en allons faire une description succincte (fig. 464). C’est la partie où se trouvent les animaux dont la chaîne d’attache est fixée au poteau 9 ; D est un sentier réservé derrière les bestiaux pour le passage ; E est l’endroit où l’on jette le fumier à mesure qu’on le retire de dessous les animaux ; une excavation est creusée dans le sol et recouverte par des planches, lesquelles forment le plein-pied du couloir A, réservé pour la circulation, et pour y déposer les alimens devant les animaux. C’est dans l’excavation creusée ou ménagée au-dessous de A, qu’on place les racines ; on les retire à volonté, pourvu que l’on ait eu l’attention de ne pas clouer les plan-