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Liv. 1er.
Agriculture : conservation des récoltes.

mètres depuis le sol jusqu’à l’égout de la couverture, lorsqu’elle est fixe, ou du toit mobile placé à sa plus grande élévation ; cette hauteur est même, à ce qu’il paraît, quelquefois beaucoup plus considérable pour l’espèce de gerbier dite grange allemande.

Aux moindres dimensions que nous venons d’indiquer (4 à 5 mètres de diamètre et 5 mètres environ d’élévation), une meule contient à peu près 3000 gerbes ou bottes. Il y en a qui contiennent jusqu’à 6 et 8000 bottes et plus. En général, on se rendra assez exactement compte de ce que pourra contenir une meule ou un gerbier de dimensions données en en établissant le cube et en divisant ce cube par celui d’une gerbe ou botte qu’on peut considérer comme étant, du moins à Paris et dans les pays environnans, d’à peu près 3/4 de pied cube, ou un quarantième de mètre cube (2 centimètres et demi cubes).

Quant à l’emplacement, on établit bien souvent les meules et gerbiers au milieu des champs mêmes ; mais le mieux est de les établir à proximité des granges où le battage du grain doit être opéré, et, autant que possible, dans des enclos à ce destinés. Lorsque l’accès en est libre, des claies, des planches ou d’autres moyens de ce genre doivent être employés pour en préserver la partie inférieure de l’attaque des bestiaux ou des chevaux, ainsi que du choc des voitures.

v. Dépenses de construction des meules.

Nous ne croyons pas inutile de consigner ici, également d’après M. de Morel-Vindé, la dépense annuelle à laquelle donnent lieu les principales espèces de meules dont nous avons précédemment parlé. Elle est à peu près ainsi qu’il suit, pour 3000 bottes ou gerbes environ :

Prix moyen
des environs de Paris. du surplus de la France.
Meule sur terre, compris fouille d’un fossé d’isolement, jet et pilonnage de la terre sur l'emplacement de la meule, et soustrait en fagot, le corps de la meule de 14 pi. 1/2 de haute jusqu'à l’égout de la couverture, de 12 pi. de diamètre par le bas et 14 pi. par le haut, la couverture de 8 pi. de hauteur. 60 f. 36 f.
Meule à l'américaine sur châssis de 12 pieds en carré, exhaussé sur 5 pieux enfoncés en terre avec entonnoirs renversés en fer-blanc ; le corps de la meule de mêmes dimensions que ci-dessus. 130 80
Meule à la hollandaise sur châssis semblable, avec 4 poteaux en bois blanc aux angles ; comble mobile laissant, étant placé à sa plus grande élévation, 16 p. 1/2 entre son égout et le châssis, poulie, corde, treuil, etc. 432 258
vi. Avantages des meules.

C’est, du reste, une chose qui parait généralement reconnue que l’avantage qu’on trouve à mettre les blés et les fourrages en meules ou gerbiers, plutôt qu’à les renfermer dans des bâtimens, tant sous le rapport de la qualité que sous celui de la bonne conservation et des moindres pertes, par suite, soit de l’humidité et de réchauffement qui en résulte, soit des attaques des animaux destructeurs. Cette opinion est notamment celle : 1o de M. Garnier-Deschesnes, qui, dans un Mémoire inséré au tit. 1er des Mémoires de la Société d’agriculture du département de la Seine, observe que, « les pertes éprouvées dans les granges ne s’apercevant pas aussi distinctement et échappant à tout calcul, on en est moins touché que de celles qui arrivent dans les meules ; » 2o de M. de Perthuis, qui, en rappelant cette observation, ajoute que souvent les pailles et les grains contractent dans les granges des odeurs de rats, de souris, de fouines, d’urine de chats, etc., qui les détériorent beaucoup, ce qui n’arrive jamais dans les meules ; et, même, que les marchands de blés reconnaissent fort bien ceux qui ont été conservés en meules, y donnent toujours la préférence et les paient quelquefois plus cher ; 3o de M. de Morel-Vindé, qui pense qu’en général, une grange ne devrait avoir que la grandeur nécessaire pour abriter momentanément toutes les gerbes provenant d’une ou plusieurs meules qu’on peut être dans la nécessité de battre en même temps, ainsi d’ailleurs que cela existe dans un grand nombre de fermes, surtout en Hollande ; 4o de Thaer et de M. Mathieu de Dombasle ; ce dernier s’exprime ainsi à cet égard : « Dans beaucoup de pays, on conserve les grains en gerbes dans des granges ; dans d’autres, on en fait des meules exposées à l’air. Cette dernière méthode présente des avantages qui devraient la faire adopter partout. Lorsqu’une meule est bien faite, le grain est entièrement à l’abri des ravages des souris, qui font tant de dégâts dans les granges ; il s’y conserve sain pendant beaucoup plus longtemps, et peut, sans inconvénient, y rester pendant deux années ; il court beaucoup moins de risque de s’altérer, lorsque la récolte a été rentrée sans être parfaitement sèche. L’usage de loger les gerbes dans les granges présente cependant l’avantage de les avoir plus sous la main pour le battage, et évite la main-d’œuvre nécessaire pour transporter les gerbes à la grange pour les battre, ce qui ne peut se faire par les mauvais temps ; mais aussi la dépense qu’il entraîne pour la construction des bâtimens est très-considérable. Si l’on pèse exactement les avantages et les inconvéniens de chacune des deux méthodes, on trouvera que la balance penchera beaucoup en faveur des meules. » 5o Enfin, de tous les riches et grands cultivateurs de l’Angleterre, chez lesquels l’usage de nos vastes et dispendieuses granges est unanimement proscrit. Gourlier.

vii. Détails de la confection des meules.

Lorsqu’on fait les meules circulaires, on leur donne généralement un diamètre de 12 pieds (4 mètres) ou davantage, en raison des convenances du cultivateur ou de la gran-