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tylis glomeiata), Agrostis traçante (Agrostis stolonifera), Fétuque rouge (F. rubra), Ivraie vivace (Lolium perenne), Brize tremblante (Briza media), Cynosure à crête (Cynosurus cristatus), Flouve odorante (Anthoxanthum odoratum), Poa commun (Poa trivialis).

L’époque dépend encore de l’espèce de bétail auquel le fourrage est destiné. Les bêtes à cornes préfèrent celui qui a été fauché de bonne heure ; les chevaux aiment mieux celui qui l’a été à une époque assez avancée.

Dans tous les cas, le cultivateur se persuadera bien qu’il n’y a rien à perdre à faire la récolte des prés à l’époque de la floraison, quelle que soit la nature des plantes qui les composent. Si l’on fait une seconde coupe ou un regain, elle sera plus abondante ; si l’on fait pâturer immédiatement après la première coupe, le pâturage durera plus longtemps. Une seule circonstance demande exception. Lorsque les souches des plantes viennent à périr ou du moins à donner des signes d’une prompte destruction, on laisse mûrir les semences : le fauchage et le fanage, en les secouant, les répandent sur le sol ; on donne ensuite un hersage énergique pour les enterrer et remuer la terre. Elles ne tardent pas à germer et à donner une nouvelle vie à la prairie. Mais ce moyen n’est qu’un palliatif ; il est certain que si des plantes vivaces meurent, c’est qu’il y a dans le sol un vice intrinsèque qu’il faut détruire, et le meilleur moyen de régénérer une prairie, c’est de la convertir pour quelque temps en terre arable.

Le fauchage des prés naturels s’exécute comme celui que nous avons décrit pour les prairies artificielles, si ce n’est que l’espace compris entre les andains devant être bientôt recouvert de foin, on n’a pas besoin d’adapter à la faulx l’appendice dont nous avons parlé. Dès qu’une certaine superficie est abattue, on se hâte de la disperser le plus également possible sur toute la surface. On se sert pour cela des bras, ou du râteau, ou de la fourche en bois à deux ou trois dents. La première espèce de fourche (fig. 390) se rencontre assez communément dans nos forêts du centre, du midi et du nord de la France ; le frêne, l’orme, le charme, en fournissent d’assez bonnes. On les choisit bien droites, car si le manche est courbé, il tourne dans la main de l’ouvrier, de sorte que souvent ses efforts portent à faux. Le châtaignier, aménagé en taillis, en fournit d’excellentes. Quelle que soit l’essence dont on se serve, il faut écorcer, faire sécher au four un peu chaud jusqu’à noircir légèrement la superficie de la fourche, et la frotter ensuite avec un corps huileux, ce qui la rend plus dure et moins cassante.

La fourche à trois dents est quelquefois artificielle (fig. 391 ), et quelquefois naturelle (fig. 392). Le Midi se sert généralement de ces dernières. Je suis persuadé qu’on réussirait à élever le frêne quadrangulaire de manière à nous procurer d’excellentes fourches à deux ou trois dents. Cet arbre vient rapidement, et n’exigerait d’autres soins qu’une taille appropriée au but que l’on voudrait obtenir. Il faudrait pour cela le cultiver et le planter assez dru, afin que les jets montent perpendiculairement. Les deux branches latérales feraient peut-être avec le tronc de l’arbre un angle trop ouvert. On le rendrait plus aigu au moyen de ligatures. Ce que je viens de dire n’est qu’une hypothèse, mais il y a lieu de croire qu’elle n’est point dénuée de fondement.

On répand tout ce qui est fauché jusqu’à trois heures, ou jusqu’au repas que prennent ordinairement les ouvriers vers quatre heures ou quatre heures et demie. Ce qui est fauché après cette époque est laissé en andains. On amasse ce qui a été répandu en petits tas que, dans certains pays, on nomme chevrottes et qui représentent assez bien la moitié d’une sphère qui aurait vingt pouces à deux pieds de diamètre. Cependant, si la température menaçait, on laisserait les andains sans les toucher. Même pendant des pluies abondantes et persévérantes ils se conservent bien, pourvu qu’on ait la précaution de les retourner aussitôt qu’on s’aperçoit que les feuilles du dessous commencent à jaunir. Mais une fois la dessiccation commencée, on aura pour règle invariable de ne pas laisser expose à la pluie ou à la rosée un seul brin d’herbe qu’il ne soit amassé en chevrottes. Ces chevrottes, ou monceaux, seront d’autant plus grosses que le foin sera arrivé à un point plus avancé de siccité. Aussitôt que la rosée est évaporée, ces monceaux sont répandus sur la surface au moyen des fourches. Quelques heures après on retourne le foin avec des râteaux qu'on manœuvre de manière que l’herbe qui était au dessous se trouve au-dessus après l’opération.

Le râteau varie peu dans sa forme et dans la manière dont il est armé. Ceux que nous représentons (fig. 393 et 394) sont doubles ; quelquefois ils sont simples, c’est-à-dire qu’il n’y a des dents que d’un seul côté ; les premiers sont préférables. Presque toujours les dents sont en bois ; en fer elles seraient trop lourdes, pénétreraient, dans le sol et mêleraient au foin de la terre, des feuilles mortes, des herbes sèches. On dit proverbialement que le foin doit sécher sur le râteau, c’est-à-dire que la dessiccation est bien plus prompte si on le tourne et retourne