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le nord-est de la France, en Alsace, en Lorraine, etc. ; la seconde (fig. 385), dans la Champagne et les pays adjacens ; la troisième (fig. 386), qui est la plus simple, la plus commode, est généralement répandue en Bretagne. Le manche en est beaucoup plus long qu’ailleurs, et terminé par un morceau de fer destiné à faire équilibre avec le poids de la faulx, et c’est en cela surtout que consiste sa supériorité sur les autres amontemens.

Pour le fauchage des foins, la faulx est rarement armée de quelques accessoires. En Picardie seulement on attache sur le manche, et près de la douille qui y fixe la lame, une sorte de crochet en fer (fig. 387), dont la fonction est de rassembler sur un seul point, ou une seule ligne, toute l’herbe coupée par chaque mouvement de la faulx. Il est très-utile dans cette contrée pour le fanage des prés artificiels, parce que là, ainsi que nous le verrons plus tard, on n’éparpille pas les andains pour hâter la dessiccation du foin. Ainsi, l’addition de ce crochet fait, dans ce cas, l’office d’un râteau ; car il serait difficile d’apercevoir entre les andains le moindre brin d’herbe coupée.

La manière de manier la faulx diffère peu d’une contrée à l’autre. Il est toujours imprudent de forcer un ouvrier à en changer subitement ; car, si quelque défectuosité se fait remarquer dans sa besogne, il ne manque pas d’en rejeter la faute sur la prétendue imperfection de la méthode qu’on lui a imposée.

Lorsqu’on pourra, sans cependant conclure de marchés onéreux, faire exécuter le fauchage à la tâche, ou à forfait, on y trouvera une grande économie de surveillance. Mais ce système n’est pas non plus sans inconvénient, parce que la besogne se fait souvent fort mal ; on perd en qualité et en quantité lorsqu’on ne traite pas avec des hommes probes.

Un point sur lequel il importe d’apporter beaucoup d’attention et d’exigence, c’est que les faucheurs coupent l’herbe le plus bas possible. En supposant à l’herbe une hauteur de 2 pieds et un produit par hectare de 4 milliers de fourrage, il est évident que si on laisse des tronçons de 2 pouces plus haut qu’il n’est nécessaire, on diminue le produit de 1/12, et, si le fourrage se vend 18 f. le millier, on fera sur chaque hectare une perte de 6 f. par coupe ou de 12 f. pour deux coupes, ce qui surpasse les frais de fauchage, puisque dans la plupart des localités on ne paie que 5 f. 50 c. lorsqu’on a une grande quantité à faire faucher. Il résulte encore de cet état de choses un très grand inconvénient, c’est que ces tronçons, venant à se dessécher, deviennent extrêmement durs et ligneux, et forcent les ouvriers, dans la coupe suivante, à prendre encore au-dessus et à occasioner une plus grande perte que la première. Dans les prairies naturelles, le dommage produit surpasse de beaucoup la proportion que j’ai indiquée pour les fourrages artificiels. Il est incontestable que c’est dans le tapis qui forme le fond du pré que se trouve l’herbe la plus touffue, la plus nourrissante, telle que les trèfles fraisier, blanc, filiforme, et les feuilles radicales de la majeure partie des graminées.

Ceux qui ont tant soit peu l’habitude du fauchage n’ignorent pas que cette opération s’exécute avec plus de perfection et moins de fatigue lorsque les plantes sont mouillées et couvertes de rosée. Les faucheurs ont l’habitude de commencer leur besogne dès la pointe du jour. Ils font beaucoup plus d’ouvrage ; le travail est mieux fait. Mais cependant il ne faut pas se faire illusion ; ces monceaux d’herbage tout humides de pluie ou de rosée, s’ils ne sont pas répandus immédiatement, ne tardent pas à fermenter et à devenir jaunes ; l’humidité fait perdre une partie des substances nutritives, qui ordinairement sont solubles. Si l’on permet aux faucheurs de commencer dès le matin, il est essentiel de leur prescrire de ne travailler que sur les parties élevées, et non pas dans les bas-fonds où la dessiccation est longue et difficile.

La faulx décrit toujours un arc de cercle dans le plan vertical où s’élève l’herbe (fig. 388). L’endroit où cet arc approche le