C’est un ouvrier qui, chargé d’un lourd fardeau, les pieds dans une terre boueuse ou pulvérulente, parcourt les guérets en respirant la poussière de la chaux et des autres substances qui ont servi à la préparation de la semence.
Si les procédés de sémination ont peu d’avantages les uns sur les autres ; il n’en est pas de même des instrument qu’emploie le semeur pour porter la graine qu’il répand. Dans beaucoup de contrées on se sert d’un sac de toile comme le font les jardiniers pour la récolte des fruits des vergers ; cette méthode est assez embarrassante et accable l’ouvrier. Nous croyons devoir proposer ici 2 moyens que l’on emploie dans quelques contrées septentrionales de la France. Le premier (fig. 306) consiste en une toile arrangée de la manière la plus propre à ne pas gêner l’action des bras. Qu’on se figure une blouse de paysan dont on a retranché les manches et la partie postérieure jusqu’à la hauteur des aisselles, et on aura une idée assez exacte de ce semoir. Le semeur endosse cette espèce de vêtement, met le grain dans la partie antérieure qui fait tablier, et, tenant de la main gauche la partie inférieure, il se sert de sa droite pour répandre le grain.
Ailleurs, on emploie un panier (fig. 307) qui offre encore plus de commodité. Il est muni de 2 anses auxquelles sont liées les deux extrémités d’une lanière de cuir ou d’une autre matière analogue. Le semeur passe cette lanière autour de son cou comme un collier. Il est avantageux surtout dans les localités où l’on a l’habitude de semer alternativement des deux mains.
Dans la plupart des exploitations on répand la semence sur guéret, c’est-à-dire le sol labouré mais non hersé. Cette manière a l’inconvénient de forcer la semence à rouler dans les intervalles que laissent entre eux les crêtes des sillons. Les grains se trouvent agglomérés sur un point, tandis qu’il y a de grands espaces où il n’y en a pas un. Avec quelque perfection qu’ait été exécuté le labour antécédent, il est impossible que le terrain n’offre pas des inégalités, des crevasses, où se loge la semence, qui alors se trouve enterrée trop profondément. Pour y remédier, les meilleurs agronomes, à Roville et à Grignon, donnent un coup de herse avant le passage du semeur ; la surface se trouve nivelée, la semence se distribue partout d’une manière uniforme. Il est vrai que cette précaution exige un hersage de plus ; mais une dépense de 3 f. par hectare est peu de chose pour l’homme qui veut être payé de ses sueurs.
La difficulté que je viens de signaler se présente surtout dans la semaille sous raies, méthode qui est usitée dans beaucoup de cantons, et qui consiste à répandre la semence sur la superficie du guéret qu’on peut labourer en un jour. Quand la charrue ouvre le sol, le grain, qui était à la superficie, se trouve au fond de la raie et recouvert de toute l’épaisseur de la bande de terre retournée.
D’autres fois le semeur suit la charrue pour couvrir de semence la raie qui vient d’être ouverte ; le sillon suivant tombe sur le grain et l’enterre. Enfin, il est des contrées où l’on sème moitié du grain sous raies et l’autre moitié à la manière ordinaire.
Si l’on interroge les cultivateurs qui suivent l’une ou l’autre de ces méthodes, si on leur demande la raison de pratiques si diverses, tous diront qu’ainsi firent leurs devanciers, tous répondront qu’ils ne connaissent pas d’autre usage, que d’ailleurs un autre procédé ne réussirait pas sur leurs terres, et c’est ainsi que la routine se perpétue.
La semaille sous raies ne serait pas toujours désapprouvée par la saine théorie si elle était économique. Mais, quand on songe qu’en un jour on ne peut semer que la 6e partie de ce qu’on ferait au moyen du hersage, et quand on réfléchit combien les jours propices sont rares à l’époque des semailles, on s’étonne à bon droit que cette méthode soit encore pratiquée dans les pays où l’on connaît l’usage de la herse et de l’extirpateur. Ce n’est pas là néanmoins le seul désavantage de ce procédé. La terre, retournée et chassée par le versoir, communique aux grains un mouvement centrifuge qui réunit en une même ligne tous ceux qui se trouvent sur la bande ; il y a perte de terrain d’un côté et agglomération nuisible de l’autre.
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Art. iv. — Procédés employés pour recouvrir la semence et plombage du terrain.
Ce que nous allons dire ne peut s’appliquer qu’à la semaille exécutée au semoir ou à la volée. Nous avons déjà fait connaître à quelle profondeur il convient d’enterrer les diverses espèces de graines. On choisit l’instrument qui pour chaque espèce remplit le mieux le but qu’on désire obtenir.
Pour les graines fines et qui veulent à peine être couvertes de terre, on les répand sur le sol, et on y fait ensuite passer un troupeau de moutons. On emploie cette méthode principalement pour les prairies artificielles et la chicorée. Dans une terre siliceuse ce piétinement recouvre la semence et tasse le terrain. On peut, du reste, mieux exécuter la même besogne avec un rouleau. Si le sol est de consistance moyenne et que l’action du rouleau ne promette pas de bons résultats, on fera bien d’introduire dans son exploitation un instrument connu en Belgique sous le nom de rabot, brise-mottes (fig. 308). Ce n’est autre chose qu’un encadrement en bois auquel on attache des planches dans la moitié de sa longueur, afin qu’aucune aspérité n’échappe à son action.