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chap. 7e.
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Des semoirs.

recevoir de l’engrais en poudre qui se répand à volonté sur la portion du terrain qui doit être ensemencé. Les tuyaux de cette trémie ont le même écartement que ceux qui distribuent la semence. Entre les deux trémies supérieures, et un peu en avant, est une roue de 30 pouces de diamètre, dont le mouvement de rotation sert, par le moyen d’engrenages, à faire tourner le cylindre qui est au fond des deux trémies. La rotation de l’axe de cette roue étant le mobile du cylindre qui reçoit et distribue les grains, il s’ensuit que la semence est toujours également répandue, que le cheval aille vite ou lentement. À chaque extrémité de la traverse qui supporte cet instrument, sont deux roues d’un pied de diamètre qui en facilitent la marche. En arrière sont deux mancherons tenus par le cultivateur dirigeant la machine, traînée par un cheval, que doit guider un enfant. L’auteur attribue à l’emploi de son instrument une économie des 2/3 de la semence des céréales, en sorte que pour un ensemencement de 10 hectares, cette économie couvrira dès la première année le prix d’acquisition du semoir, qui est de 400 ou 425 fr. De plus petits semoirs à 4 ou à 5 tubes sont d’un prix moins élevé.

Ce serait sortir des bornes que nous nous sommes prescrites, que de donner la figure et la description d’une foule d’autres semoirs, tels que ceux de Thaer, de Fellemberg, ou tous ceux figurés par M. Loudon. Tous les instrumens dont nous venons de donner un aperçu succinct, se ressemblent sous plusieurs rapports : ils sèment en lignes ; ils réunissent un appareil pour ouvrir le sein de la terre, et un autre pour recouvrir la semence. Cette dernière propriété est sans doute avantageuse en ce qu’elle permet d’économiser le temps qu’on emploierait à rayonner et à herser. Mais n’est-il pas à craindre que pour donner à ces diverses parties toute la solidité convenable, on ne fasse une machine énorme et très-pesante ? et si on sacrifie la solidité à la légèreté, ne court-on pas les risques de voir briser contre un faible obstacle un instrument dispendieux ? ne doit-on pas trembler de confier un semoir fragile à des valets habitués à faire abnégation de leur intelligence pour ne développer que leur force matérielle ? Il faudrait, pour que de tels instrumens fonctionnassent avec une certaine régularité, que le sol fût parfaitement ameubli. Mais a-t-on toujours le moment de lui donner cette préparation ? La complète pulvérisation de la terre est-elle toujours indispensable ? non sans doute. L’expérience nous apprend que les céréales d’hiver demandent à être semées dans un sol dont la surface soit couverte de mottes de moyenne dimension, soit pour arrêter la neige pendant la saison rigoureuse, soit pour donner, en se délitant au printemps, une terre meuble aux jeunes tiges qui les avoisinent. Toutes les plantes hivernales sont dans le même cas. On leur nuit donc lorsque, pour faciliter la marche des semoirs délicats, le sol reçoit à cette époque une pulvérisation complète.

L’avantage de la disposition des plantes par rangées parallèles est mis hors de doute aujourd’hui pour une certaine classe de végétaux. Mais des agriculteurs habiles, MM. de Dombasle et de Valcourt, se croient autorisés à penser qu’il n’en est pas de même pour les céréales. M. de Vogt s’est assuré, par des expériences nombreuses, que la distance la plus convenable à laisser entre chaque tige est de 2 pouces dans tous les sens. Et ce dont a été convaincu par des faits directs l’habile agronome que nous venons de citer, n’avait pas échappé aux plus simples laboureurs. Rien de plus facile que de semer en lignes, même sans semoirs. Lorsqu’un guéret a été labouré avec régularité, il présente une suite d’ondulations parallèles formées par les arêtes des sillons. Si l’on répand de la semence sur un sol ainsi ondulé, elle roule en totalité dans la partie creusée qui est entre chaque tranche. Le hersage, au lieu de nuire à ce mode de dispersion, ne fait que le régulariser et les plantes se trouvent en ligues. Cependant, soit par instinct, soit par le résultat d’observations multipliées, les cultivateurs augurent moins favorablement des céréales ainsi distribuées que de celles qui le sont d’une manière moins régulière mais plus égale.

Voilà donc plusieurs inconvéniens assez graves que l’on trouve dans les semoirs pour la culture des céréales. Le dernier que nous avons signalé n’est pas cependant inhérent aux instrumens de ce genre, car celui qu’on nomme semoir Polonais ne sème pas en ligne. Il se compose (fig. 298) d’un brancard, et d’une trémie au fond de laquelle se trouve un cylindre criblé de trous dans lesquels se logent les semences. Il fait corps et tourne avec l’essieu des roues, qui lui communique un mouvement de rotation.

Il ne faut pas croire du reste que les divers semoirs dont nous avons parlé ne puissent que semer en lignes. Au moyen d’une modification qui en simplifie le mécanisme, on distribue la semence d’une manière très-uniforme. Cette modification consiste à remplacer le tube qui dépose les graines dans la terre, par une planche sur laquelle elles tombent et se répandent sur le sol aussi également que le ferait un bon semeur.

Pour obvier à la fragilité qui résulte dans