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liv. ier.
Agriculture : ensemencemens et plantations.

quand la semaille s’exécute de bonne heure, parce qu’alors le terrain est ordinairement mieux préparé, que la terre, encore échauffée par les rayons du soleil, hâte la germination des grains et les soustrait à tous les accidens qui les détruiraient.

Au contraire, la quantité de semence doit être augmentée dans les sols pauvres, dans les semailles tardives. Généralement parlant, les variétés de printemps veulent être semées plus drues que les variétés d’automne. Le blé d’hiver, par exemple, a le temps de taller avant et après l’hiver ; tandis que celui du printemps est à peine germé, que les pluies douces de la saison et le soleil concourent à donner à la végétation une grande activité : les tiges montent rapidement, mais elles ne peuvent produire de pousses latérales.

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art. iii. — Des procédés de sémination.

Jusqu’à présent on ne connaît que trois moyens pour distribuer la semence sur le sol : à la volée, au semoir, au plantoir. Le dernier procédé est abandonné presque partout pour les céréales, et restreint pour les autres plantes à un très-petit nombre de circonstances qui ne se rencontrent que dans la petite culture et dans les exploitations maraîchères. Le second, peu usité pour la semaille des plantes culmifères, commence à être utilisé pour les végétaux qu’on sème en lignes. Enfin, le premier procédé est le seul connu dans les contrées où l’art agricole est demeuré stationnaire : il est aussi celui qui jusqu’à présent offre le plus d’avantages pour la sémination des céréales. — Nous renvoyons à la section suivante, qui est celle des plantations, ce que nous avons à dire des plantes qui se multiplient par le moyen de tubercules, de drageons, comme la pomme-de-terre, la garance, le houblon, etc. Nous ne nous étendrons pas sur la dernière méthode, pour donner plus de développement à la description des deux autres.

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§ ier. — Des semoirs. (Drills des Anglais.)

Patullo en Espagne, Tull en Angleterre, Duhamel en France, de Fellemberg en Suisse, ont cherché à introduire l’usage des semoirs pour les céréales. Tous ces noms font autorité en agriculture, et puisque des hommes de talent n’ont pas douté de la possibilité, nous devons encourager ceux qui s’occupent à perfectionner ces instrumens, à en imaginer de nouveaux. Les inventeurs des semoirs à céréales, découragés eux-mêmes par l’insuccès de leurs tentatives, ruinés par des dépenses énormes, n’avaient plus d’imitateurs ou du moins leurs rares partisans se contentaient de suivre leur système dans le silence, quand M. Hugues, avocat à Bordeaux, après avoir brillé au barreau, voulut encore couvrir son nom d’un autre genre de célébrité. Les suffrages qu’il a obtenus de tous côtés ont été unanimes et sans restriction.

Si nous mettons de côté la question de nom pour n’envisager que la chose en elle-même, nous voyons que les avantages qu’offrent les semoirs sont compensés par de nombreux inconvéniens.

On peut résumer ainsi les avantages des semoirs : ils distribuent le grain aussi également que possible sans le déposer avec la main et aussi dru qu’on le désire ; — ils introduisent le grain en terre à une profondeur réglée et qui dépend également du vouloir de celui qui dirige l’instrument ; — ils permettent, dans la plupart des cas, d’économiser une partie de la semence. — Quant à la disposition des plantes par rangées parallèles, nous verrons plus tard que ce n’est pas toujours un avantage.

Leurs inconvéniens se bornent à ceux-ci : — Ils exigent plus de temps pour l’accomplissement des semailles, et forcent quelquefois à semer par un temps peu opportun. Ils demandent une certaine sagacité de la part de celui qui dirige l’instrument, qualité qu’on ne rencontre pas toujours aujourd’hui dans les agens inférieurs de la culture. — D’ailleurs ces instrumens sont coûteux et quelquefois d’un entretien dispendieux. Il faut non seulement un mécanicien habile pour les construire, mais encore un ouvrier exercé pour les réparer, hommes difficiles à trouver dans les campagnes.

Cependant, les Chinois ont de temps immémorial employé les semoirs pour la semaille des grainières, et il est certain que quelques personnes en ont exagéré les inconvéniens. Celui de Patullo a été imité par Coke en Angleterre et singulièrement perfectionné dans ces derniers temps par M. de Valcourt, à Paris et dans l’établissement de Grignon. Nous regrettons beaucoup de ne pouvoir donner la figure de cet instrument qu’en l’absence de M. de Valcourt nous avons inutilement demandé à l’Institut agricole de Grignon. Il est composé de cuillères en cuivre, qui sont placées à l’extrémité d’une série de petits embranchemens qui sont comme les rayons d’un cylindre. Ce cylindre porte à l’une de ses extrémités une poulie fixe, qui reçoit son mouvement de rotation au moyen d’une chaîne. Cette chaîne entoure également une poulie fixée sur l’essieu de la roue, lequel forme l’axe de celle seconde partie.

Le semoir de Tull (fig. 287) a été prôné

Fig. 287


par tous les partisans de ses idées. Il se compose d’une caisse divisée en plusieurs compartimens. Dans chacun de ceux-ci se trouve un cylindre en bois percé de deux rangées de trous, comme on le voit dans la (fig. 287). Une chaîne sans fin communique à ce cylindre le mouvement qu’elle-même reçoit de l’avant-train. Pendant le mouvement de rotation, les semences se logent dans les