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chap. 7e.
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époque, profondeur des ensemencemens.

intervalles de beau temps que l’arrière-automne permet d’utiliser ;

3o Que le contraire arrive précisément pour les semailles exécutées au printemps. Les terres argileuses, humides des pluies de l’hiver, ne peuvent encore laisser marcher la charrue ou la herse, que déjà les terres siliceuses et calcaires sont ressuyées. C’est donc par celles-ci qu’il convient de commencer. Les jours se dépenseraient inutilement en voyages si les animaux allaient, au commencement du printemps, travailler les parties les plus reculées du domaine ; c’est donc à celles qui sont plus rapprochées que l’on devra donner les premiers soins.

C’est en faisant une étude sérieuse de la nature de son terrain et de l’exigence du climat que le cultivateur parviendra à distribuer ses travaux d’une manière régulière, et à exécuter la semaille de chaque pièce dans le temps le plus opportun.

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§ ii. — Profondeur des semences.

Quand on songe au grand nombre de semences que produisent les plantes des champs, les arbres des forêts, on est étonné de la petite quantité de végétaux qui croissent spontanément sur le sol ; mais l’étonnement cesse lorsqu’on voit que la plupart de ces semences, abandonnées au hasard, n’ont pas été placées dans les conditions indispensables à la germination. La principale de ces conditions, c’est d'être recouvertes d’une couche de terre suffisante. Les expériences des physiologistes nous apprennent que les phénomènes qui accompagnent la germination dans ses phases diverses ne s’accomplissent qu’imparfaitement sous l’influence de la lumière. Il faut donc que la semence soit enterrée à une certaine profondeur, afin qu’elle soit dans la plus complète obscurité. D’après d’autres expériences, la présence de l’oxigène est indispensable pour que l’embryon se développe. Il faut donc, en second lieu, que la couche de terre qui recouvre la semence soit assez peu épaisse pour ne pas intercepter la communication de l’oxigène de l’air avec la graine.

Le cultivateur qui a étudié les vœux des plantes sous ce double rapport ne sera jamais embarrassé pour déterminer la profondeur à laquelle il doit enterrer la graine. Cette profondeur n’est point absolue, elle varie avec la nature du sol, l’époque de la semaille et la grosseur de la semence. Plus la graine est grosse, plus elle veut être enterrée profondément. Cet axiome est général, mais pas universel. Plus le sol est argileux, plus il faut enterrer superficiellement, et la raison en est tirée de ce que nous avons dit tout-à-l’heure ; l’argile est une terre tenace, peu perméable aux influences extérieures ; et il est impossible à l’oxigène de pénétrer une couche qui ne lui laisse aucun passage. Ce sol, par sa ténacité, offre également, à la sortie de la jeune plante, des obstacles qu’elle ne peut souvent surmonter.

Il est certaines terres qui sont sujettes au déchaussement ; pour celles-là, on enterre également la semence à une plus grande profondeur qu’à l’ordinaire, afin que les racines, fortement implantées dans le sol, ne puissent être soulevées par le gonflement du terrain.

Nous allons indiquer ici les diverses profondeurs auxquelles il convient d’enterrer la semence des principales plantes agricoles. Il est reconnu, en général, qu’aucune graine ne germe enfouie a plus de 5 à 6 pouces. Ce que nous allons dire suppose un sol de consistance moyenne.

La féverole est de tous les végétaux cultivés celui qui supporte la plus forte couverture de terre ; même dans un sol tenace, elle lève très-bien à 3 ou 4 pouces.

Pour l'orge et l’avoine, 2 pouces à 2 pouces 1/2.

Les vesces, les lentilles, les betteraves, les pois, le seigle et le froment, de 1 à 2 pouces.

Les haricots, le maïs et le colza, 1 pouce et demi.

Les autres graines oléagineuses, le lin, le rutabaga, 1/2 pouce.

Les navets et les carottes, 1/2 pouce au plus.

Enfin les semences des prairies artificielles, la gaude, le pavot et la chicorée demandent à peine à être recouvertes.

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§ iii. — Quantité de semences à employer.

Si toutes les graines que l’on confie à la terre germaient et donnaient naissance à une plante bien développée, il n’y a aucun doute que la proportion ordinairement employée ne soit trop forte. Mais, quelque soin que l’on ait pris pour choisir la semence, il y en a toujours une petite partie qui a perdu la faculté germinative ; avec quelque précaution que l’on ait préparé le terrain, il y a toujours un certain nombre de graines qui ne sont pas enterrées à la profondeur convenable. Les oiseaux, les insectes en détruisent souvent une grande partie. Ceux qui n’ont pas calculé toutes ces causes de diminution peuvent bien soutenir qu’on répand trop de semence d’après les exemples étonnans de la fécondité de la plupart des végétaux cultivés ; ainsi, Miller, jardinier anglais, en semant un seul grain de froment, en obtint plusieurs milliers. Mais combien de cultivateurs se sont repentis d’avoir mis en application les conseils des hommes qui ne raisonnaient que d’après les essais tentés dans un sol de premier choix !

Nous indiquerons en traitant de chaque plante la quantité de semence que l’on doit employer dans un sol de fertilité et de consistance ordinaires.

Ici nous ferons seulement observer que cette quantité doit être diminuée dans un sol riche, parce que, dans cette circonstance, les plantes culmifères ont beaucoup de disposition à produire des talles ou pousses latérales ; parce que les autres végétaux y acquièrent de grandes dimensions. Leur développement serait contrarié par la multiplicité des plantes qui se trouveraient agglomérées sur un même point. Au lieu de donner des produits plus abondans, une semaille épaisse n’aurait dans ce cas d’autre résultat que d’empêcher la circulation libre de l’air, d’intercepter la lumière et en définitive d’étioler la majeure partie des végétaux. Il convient encore de diminuer la quantité de semence