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tion, corrige tous ces défauts ; mais c’est en augmentant encore cette même résistance par la diversité des tendances et en exigeant par conséquent une plus grande force motrice.

A la vérité aussi la charrue simple exige la plus grande régularité dans sa construction, puisque, lorsqu’elle opère dans un sillon, l’action du laboureur doit se réduire à bien établir sa direction, vu que n’ayant aucun appui à la partie antérieure de l’age, le plus léger changement dans le placement du coutre ou dans l’attache des traits trop courts ou trop longs, rend la marche de la charrue irrégulière et souvent impossible. Mais, lorsqu’elle est bien construite, elle donne lieu à la moindre résistance possible, et elle serait moins difficile à conduire qu’on ne le croit généralement, si le laboureur parvenait à se déshabituer des efforts violens qu’il fait avec la charrue à avant-train.

En résumé, une bonne araire entre les mains d’un laboureur intelligent et habitué à la diriger, est préférable à la plupart des charrues à avant-train. À l’aide d’une force moindre, elle accomplit autant de travail, elle laboure aussi bien, et elle occasione moins de fatigue à l’homme chargé de régler sa marche et aux animaux destinés à la mouvoir.

D’un autre côté, entre des mains peu exercées, elle perd la plupart de ces avantages, et l’irrégularité de sa marche est telle qu’il n’est pas étonnant qu’on la rejette faute de savoir l’employer. — Il est certain que sa conduite exige à la fois, plus de soin d’attention et d’intelligence de la part du laboureur que la charrue à avant-train. — Cette circonstance importante, jointe à la force de l’habitude, à la répugnance si naturelle que l’on éprouve à oublier ce que l’on sait pour apprendre, tel simple que cela soit, ce qu’on ne sait pas, ont contribué, nous n’en doutons pas, plus que tout autre motif, à retarder sur plusieurs points l’adoption des araires perfectionnées. Toutefois, grâce surtout à M. de Dombasle, « aujourd’hui il n’est probablement pas un seul de nos départemens où il ne se rencontre un nombre plus ou moins considérable de cultivateurs qui emploient habituellement l’araire dans leur pratique et qui lui accordent une préférence décidée sur toute autre charrue. Dans un grand nombre de départemens, principalement parmi ceux du midi, du centre et de l’ouest, l’usage en est considérablement répandu, et l’araire s’y est implantée de manière à donner la certitude que son emploi ne peut plus que s’y étendre. Plusieurs fabriques se sont établies dans ces parties du royaume pour fournir aux cultivateurs les araires dont ils ont besoin. Le nombre de ces fabriques s’accroit chaque année de même que l’emploi de l’instrument… La fabrique de Roville, seule, a fourni jusqu’ici plus de 3,000 araires aux propriétaires et aux cultivateurs sur tous les points du royaume, et ce n’est pas trop s’avancer que d’évaluer à deux ou trois fois le même nombre celui de ces instrumens qui ont été construits dans les autres ateliers, en sorte qu’il y a vraisemblablement aujourd’hui au moins 10,000 araires fonctionnant sur la surface de la France. »

De semblables faits parlent assez haut en faveur de la charrue simple. — Néanmoins, et nous devons le reconnaître avec tous les partisans impartiaux de l’araire, sans l’avant-train il est extrêmement difficile de donner, avec quelque régularité, les labours peu profonds d’écobuage, de déchaumage, etc. ; il ne l’est guère moins d’obtenir un bon travail dans les sols tenaces lorsqu’on les attaque un peu humides, parce que la terre qui s’attache sous le sep et aux diverses parties de l’instrument, tend constamment à le jeter hors de la raie. Cette dernière circonstance surtout mérite attention ; seule, elle serait de nature à empêcher de proscrire l’avant-train d’une manière absolue.

Araire de Roville. — Au nombre des araires les plus perfectionnées et les plus répandues en France, nous devons placer d’abord celle de M. Mathieu de Dombasle, heureuse modification de la charrue belge ou brabançonne dont nous parlerons dans un autre paragraphe.

Fig. 227

A, fig. 227[1], soc de forme triangulaire qui prend ordinairement de 9 à 10 po. (0m 245 à 0m 271) de largeur de raie, et qui peut pénétrer jusqu’à 11 po. (0m 30) de profondeur dans les charrues de moyenne grandeur. Il est fixé au versoir par un lien de fer solide

  1. (1) Ce dessin et tous les suivans sont accompagnés d’une échelle relative d’un mètre qui facilitera aux yeux du lecteur l’appréciation assez rigoureuse des proportions des charrues dans leur ensemble et dans les détails de chacune de leurs parties.