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AGRICULTURE : FAÇONS GÉNÉRALES À DONNER AU SOL.

goles : leur matière extractive n’est pas entraînée sur la pente des billons et dans les rigoles. Mais surtout la semence y est mieux répartie ; on l’y répand à la volée. La herse agit sur toute la surface et d’une manière plus uniforme ; le hersage, en rond, qui est si efficace, devient à peu près impraticable sur un terrain labouré en billons ; le hersage en travers même est rendu beaucoup plus difficile par cette dernière manière de disposer le sol. Aussi le terrain labouré à plat peut-il beaucoup mieux être nettoyé de chiendent et des mauvaises herbes qui se multiplient par leurs racines. Le charroi, et surtout celui des récoltes, y est beaucoup plus facile. Enfin le faucheur et le faneur y accomplissent leur travail avec bien moins de peine. Les céréales y reposent à plat après qu’elles ont été séparées de leur chaume ; elles n’y tombent pas dans les rigoles pour y être gâtées par les eaux, comme cela n’arrive que trop souvent dans les champs labourés en billons étroits. Le râteau y agit avec beaucoup plus de promptitude, et c’est seulement là qu’on peut se servir du grand râteau, qui rend de si bons services lors de la moisson. »

On sait qu’une des premières améliorations qu’ait apportées aux terres basses de son exploitation le célèbre directeur de la ferme de Roville, a été d’aplanir leur surface par des labours successifs, en détruisant les billons qu’on y avait élevés avant lui avec tant de peines et de soins. O. Leclerc-Thouin.

Section ii. — Des charrues considérées comme instrumens de labour et de préparation des terres.

Les charrues les plus simples se composent de diverses parties que nous devons étudier d’abord séparément, afin de connaître leur usage et, autant que possible, les conditions les plus nécessaires à leur bonne construction. Ce sont : le soc, le coutre, le sep, le versoir, l’age ou la haye, le régulateur et le manche.

Cette première partie de notre travail accomplie, après une courte mais indispensable excursion dans le domaine de la dynamique, afin de mettre le lecteur à même de juger de la résistance que présentent les diverses sortes de charrues à l’effort des animaux qui les traînent, et d’apprécier les moyens de diminuer la force de traction, nous traiterons successivement des araires proprement dites ; — des araires à support sous l’age ; — enfin des charrues à avant-train qui nous présenteront plusieurs subdivisions, eu égard à la fixité ou à la mobilité de leur versoir, au nombre de leurs socs, etc., etc.

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Art. ier. — Des diverses parties essentielles des charrues.

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§ vi. — Le soc.

Le soc est la partie de la charrue qui détache la bande de terre, concurremment avec le coutre, et la soulève en avant du versoir. Sans remonter jusqu’à l’antiquité, si nous devions seulement tracer ici un tableau historique de toutes les charrues encore existantes dans les diverses parties du monde, nous verrions que l’aspect et les dimensions des socs varient à l’infini. Toutefois, à ne considérer que ceux dont l’usage est le plus général, on peut les ranger en deux divisions : — Les uns ayant la forme d’un fer de lance ou d’un triangle isocelle plus ou moins alongé, également tranchans des deux côtés (fig.193) ;

Fig. 193

les autres à une seule aile terminée, du côté qui en est privé, par une ligne droite alignée avec le corps de la charrue, et ne formant ainsi que la moitié des autres (fig. 194). Les premiers sont indispensables pour les charrues à double versoir ou à tourne-oreille ; les seconds s’appliquent aux charrues à versoir fixe.

Le soc se compose de deux parties fort distinctes : l’aile ou les ailes (A A, fig. 193 et 194 ), dont la destination est de trancher la terre, et la souche B, fig. 194, qui n’a d’autre but que d’unir cette partie essentielle à la charrue, et de commencer, pour ainsi dire, la courbure du versoir. — La bande qui forme et qui avoisine la pointe et le tranchant s’use à peu près seule durant le travail ; elle comprend ce que M. Mathieu de Dombasle appelle la matière à user. « La proportion entre ces deux parties, dit, dans un travail récent, cet agronome, l’un de ceux qui ont incontestablement le plus contribué de nos jours au perfectionnement de la charrue, peut varier considérablement, et l’on conçoit facilement que le soc est d’autant meilleur sous le rapport de la dépense de renouvellement, que la souche est en poids dans une moindre proportion avec la matière à user. Les socs énormes dont on fait usage dans le nord et l’est de la France, ainsi qu’en Belgique, pèsent communément de 18 à 24 livres, ils coûtent de 18 à 24 fr., et ils ne contiennent que 2 à 3 livres au plus de matière à user. C’est là, certainement, une proportion très-défavorable. Dans les charrues que l’on construit à Roville depuis dix ans, les socs étaient un peu moins pesans, mais la proportion de la matière à user n’était pas encore améliorée : je l’évalue à deux livres environ sur des socs qui pèsent 14 à 15 livres, et qui coûtent 12 francs. En 1832, on a adopté dans les fabriques de Roville une charrue d’un nouveau modèle, dont le soc est beaucoup plus léger et ne dépasse guère 9 à 10 livres. C’est uniquement sur la souche que porte l’économie de poids, et la matière à user reste la même que dans les anciens, en sorte que la proportion est maintenant beaucoup plus favorable. »

Beaucoup de socs se fixent au sep ou à la gorge de la charrue par une douille ou ensochure. — Tantôt ce sont les deux côtés prolongés des triangles qui se recourbent en-dessous pour emboîter l’extrémité antérieure du sep ; — tantôt la douille est placée entre les deux ailes, à peu près comme dans un fer de lance : — tantôt, enfin, elle se trouve à la partie gauche de l’aile unique des charrues à versoir fixe. Cependant, depuis quelque temps,