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chap. 6e.
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DES LABOURS.

court, celle de Fellemherg, etc. (Voy. la section suivante.) Pour atteindre et diviser le sous-sol sans le ramener à la surface, M. le marquis de La Boessiere a inventé récemment un instrument dont il a déjà été parlé (voy. page 30). — Le cultivateur ou binot, dépouillé de ses versoirs et conduit derrière une charrue ordinaire, de manière à approfondir successivement chaque raie, sans exiger une grande force de tirage, produit plus simplement à peu près le même effet. Si je reviens ici sur son emploi pour les défoncemens de ce genre (voyez page 30), c’est moins dans le but de compléter le présent article que dans celui de recommander plus particulièrement à l’attention des cultivateurs une amélioration à la fois importante et facile.

iii. Des défrichemens à la charrue et à bras d’hommes.

Ce dernier mode, en quelque sorte mixte, puisqu’il participe des deux autres, consiste à ouvrir d’abord un sillon large et profond au moyen d’une forte charrue, et à creuser au fond de ce sillon une jauge à bras d’hommes, en échelonnant dans toute sa longueur un nombre considérable d’ouvriers. On rejette ainsi la terre du sous-sol sur la crête de l’ados formé par la charrue. Cette pratique fort commune, sous le nom de Ravagliatura dans le Bolonais, pour la culture des chanvres, est aussi assez générale dans une grande partie du littoral du département des Côtes-du-Nord et ailleurs. Dans les deux pays précités, on n’emploie pas moins de 24 journaliers pour l’effectuer. — Combien ne serait-il pas désirable qu’une bonne charrue fût employée en pareil cas !

Art. ii. — Des Labours ordinaires en général.

[6:1:2:1]

§ ier. — De la profondeur des labours.

La profondeur des labours proprement dits, ou, en d’autres termes, de ceux qui n’attaquent pas le sous-sol, est nécessairement déterminée, assez souvent, par la mince épaisseur de la couche arable. Quand on ne peut pas augmenter cette dernière aux dépens du terrain inférieur, on n’a d’autre ressource, comme il sera expliqué bientôt, que de l’élever sur certains points en la diminuant encore sur d’autres, par un travail en ados ou billons. — Dans les cas moins défavorables, la profondeur doit varier selon certaines règles qu’il n’est pas impossible de généraliser dans un traité de culture. Il est toujours avantageux de commencer par le labour le plus profond, afin que la terre ait mieux le temps de se mûrir. Malheureusement, tout en reconnaissant la justesse de ce principe, très-souvent on est obligé de s’en écarter en pratique ; car, sur certains sols, dans l’impossibilité ou l’extrême difficulté de donner, de prime-abord, au soc l’entrure nécessaire, on n’a d’autre parti à prendre que de l’augmenter progressivement. Une fois que le terrain a été retourné et ameubli à une profondeur convenable, les labours suivans peuvent, et, dans la plupart des cas, doivent même devenir moins profonds. — Ils le doivent lorsqu’on vient de répandre à la surface les amendemens divers, les cendres produites par l’écobuage ou les engrais que la charrue pourrait entraîner au-dessous de la portée des racines ; — lorsqu’aux approches des semis de printemps on ne veut pas compromettre les excellens effets de l’ameublissement produit par les gelées, et ouvrir, plus qu’il n’est nécessaire, le sol à l’excessive évaporation produite par les vents secs et les vils rayons de soleil de cette saison. — En pareil cas, un ou deux traits d’extirpateur, parfois quelques hersages, peuvent être une préparation suffisante.

Dans les contrées où les fromens se sèment sous raies, le labour doit varier non seulement en raison de la composition générale des terres, mais aussi de leur disposition accidentelle au moment des semailles. Ainsi, il doit être plus profond sur des sols légers que sur des terres fortes ; — sur des terres sèches que sur des terres humides ; — sur des craies exposées aux effets du déchaussement que sur des sables également légers, mais qui ne sont pas sujets aux mêmes inconvéniens ; — sur des champs salis de mauvaises herbes que sur ceux qui en sont nettoyés, etc., etc. Enfin, il est évident que, comme les défrichemens, les labours doivent varier en raison de la longueur des racines des plantes cultivées. — Ils doivent varier encore eu égard à la végétation particulière des espèces. Quelques-unes, telles que les pommes-de-terre, les turneps, les fèves, etc., réussissent sensiblement mieux lorsque le soc a ramené à la surface une certaine quantité de terre neuve. John Sinclair, à la suite de recherches attentives, affirme que, sans les labours profonds, ces récoltes diminuent ordinairement, après un certain temps, en quantité, en qualité et en valeur. D’autres plantes sarclées, également propres à la culture des défriches, sont dans le même cas ; tandis qu’il en est qui s’accommodent assez bien d’un fonds moins nouvellement travaillé et par conséquent plus solide.

La plupart des agronomes ont recommandé, d’après Rozier, sinon de faire alterner régulièrement les labours profonds et les labours superficiels, au moins de recourir de temps en temps aux premiers, ce qui est sans contredit fort profitable. — Sinclair a établi, par une table, les règles suivantes

Premier labour de jachère 
 6 à 8
ou mieux 10 à 12 po. 
Second 
 6 7 po.
Troisième 
 5 1/2 po.
Quatrième 
 4 po.
Labour de semaille 
 4 po.
Avoine sur turneps 
 4 5 po.
— sur trèfle rompu 
 5 6 7 po.
Fèves sur un seul labour 
 6 7 8 9 po.
— sur un second labour 
 5 po.
Premier labour pour l’orge 
 6 7 po.
Second 
 5 po.
Troisième 
 4 po.
Premier labour pour les pommes-de-terre 
 4 6 po.
Second 
 5 po.

Thaer a cru pouvoir poser en principe, en restant même au-dessous des bornes du vrai,