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liv. ier.
AGRICULTURE : OPÉRATIONS AGRICOLES.

Dans le département du Gers, on supplée à ces instrumens par un autre outil (fig. 68) composé de deux fortes dents de fer de 2 centimètres ou 6 lignes d’épaisseur, et de 5 centimètres ou 1 pouce de largeur, et d’une longueur de 20 centimètres ou 10 pouces ; un manche en bois de 90 centimètres ou 3 pieds y est adapté ; il permet à l’ouvrier de travailler presque droit. Il peut enfoncer cet instrument dans le sol à une profondeur d’environ 20 centim. ou 10 po., et le travail se fait plus rapidement qu’avec le pic ; aussi, dans les terrains qui ont besoin d’un défonçage moins profond, peut-il être employé de préférence. Parfois pour déraciner des arbrisseaux, on se sert d’un levier armé à l’une de ses extrémités d’un très-fort trident de fer dont les pointe sont ordinairement 20 po. de longueur (fig. 72).

« Comme elles doivent pouvoir supporter un grand effort, il faut que la partie de la fourche par laquelle elles tiennent à la douille, et cette douille elle-même, soient aussi très-solides. C’est dans cette douille qu’on introduit la perche servant de levier, qui doit être épais, de bois dur, si cela est possible de frêne, et avoir 15 à 20 pieds de long. À l’extrémité postérieure de ce manche on attache une corde longue de 8 à 10 pieds, à laquelle est suspendue une traverse, au moyen de laquelle plusieurs hommes peuvent employer à la fois leur force sur le levier. Après que les plus fortes racines latérales ont été coupées, on chasse le trident sous la souche dans une position inclinée, puis on place au-dessous du manche ou levier, un bloc que l’on rapproche de la souche jusqu’à ce que l’extrémité postérieure de ce manche soit élevée de 10 ou 12 pieds ; alors, par le moyen de la traverse attachée à la corde, les ouvriers abaissent la partie postérieure du manche jusqu’à ce que la souche cède à leurs efforts. À l’aide de cet instrument, tout simple qu’il soit, on peut souvent opérer des choses surprenantes, et lorsque ce moyen est insuffisant, des machines plus compliquées courraient grand risque de se rompre. » (Thaër, Principes raisonnés d’agriculture.)

Enfin, lorsque ce sont des arbres qui occupent le terrain, on est bien obligé ou d’entourer chacun d’eux de tranchées profondes et de couper leurs principales racines, à mesure qu’on les découvre, pour ensuite entraîner l’arbre entier au moyen d’une corde attachée le plus près possible de la sommité, ou de les abattre rez terre, abandonnant comme salaire toute la partie qui reste dans le sol, et même les menus branchages, aux ouvriers chargés de l’extraction des racines.

La présence de grosses pierres rend souvent la mise en culture des friches beaucoup plus difficile. Dans quelques cas, on trouve économique de les enfouir dans le champ même, à une profondeur assez grande pour ne gêner en rien la marche de la charrue. En d’autres circonstances, si ce moyen n’est pas praticable, si l’on trouve à utiliser les pierres dans le voisinage pour l’entretien des chemins ou pour des constructions rurales, on peut recourir, selon la nature du rocher, soit au pic et au coin du mineur, soit à la poudre à canon, dont l’emploi, qui exige d’ailleurs des frais assez considérables, n’est pas malheureusement sans danger en des mains inexpérimentées. Enfin, sans encourir le même inconvénient, on réussit encore parfois assez bien en faisant chauffer fortement la pierre sur un seul point, au moyen d’un feu aussi ardent que possible ; et, lorsque cette vive chaleur a produit une dilatation inusitée, en arrosant subitement le bloc avec de l’eau froide, et en le frappant en même temps de lourds marteaux ou de maillets métalliques à manches de bois durs et élastiques comme le houx.

Quant aux obstacles que peut présenter l’eau, en traiter ici serait faire double emploi avec l’article Dessèchement auquel nous devons renvoyer le lecteur. Vicomte Débonnaire de Gif.

Section ii. — De l’écobuage.

D’après l’étymologie que M. Desvaux donne du mot écobuage, ce mot dérive du latin scopula, petit balai, ou du celtique scod, bâton, morceau de bois, dont on a fait plus tard écot, écobues. Ecobuer ne s’appliquerait ainsi proprement qu’à l’extraction des fragmens de végétaux qui se trouvent à la surface et dans l’épaisseur des friches qu’on veut mettre en culture. Cependant, on réunit sous la même dénomination non seulement l’incinération de ces fragmens, tiges et racines, encore adhérens à une partie de la terre qui les portait, mais aussi le brûlis de la terre dépouillée de toute végétation.

Cette pratique, dans le sens général que nous devons lui donner ici, comprend donc trois opérations distinctes dont nous nous occuperons séparément, et dont la figure 70 représente l’ensemble.

Le but de l’écobuage, but dont nous verrons plus loin qu’il approche évidemment, dans beaucoup de cas, sans cependant l’atteindre complètement ou toujours, est de débarrasser la couche labourable des plantes