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— Une seule alors.

— Quel âge avait-elle quand elle est morte ?

— Seize ans…

« Seize ans… et moi j’en ai dix-sept !

« Je me sentais si forte, si grande, si pleine de vie, qu’il me vint une immense pitié pour cette pauvre petite créature qui m’avait mise au monde ; et tout en embrassant le bracelet, je disais très bas : Ma pauvre petite maman ! ma pauvre petite maman !… Puis sentant les sanglots me reprendre, je me sauvai vite, vite, de peur de faire de nouveau « une scène. »

« Je me faisais des reproches le soir, au bal ; j’aurais dû être triste, et le plaisir de me trouver dans cette superbe salle décorée de fleurs, brillante de ses mille bougies, d’être entraînée par la valse, de me sentir entourée d’attentions charmantes — m’enivrait un peu ; quelquefois la valse que jouait l’orchestre assourdissait sa mélodie entraînante par des tons mineurs, et ces accords semblaient me frapper au cœur ; je riais toujours, mais il y avait un peu des sanglots du matin dans mon rire ; — et ce pendant la joie de vivre, de me sentir jeune, de voir l’avenir comme à travers un voile rose s’accentuait encore de ces rares instants de tristesse.

« Je vous ai déjà dit que ma marraine faisait de moi la reine de la fête ; elle me présentait à tout ce monde comme sa fille d’adoption. Je crois que