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« Je me levai toute droite : ma mère !… Depuis le jour où vous aviez répondu à mes supplications par quelques détails dont vous sembliez douter vous-même, je n’avais jamais entendu prononcer ce mot. J’avais presque fini par l’oublier…

« Mais maintenant j’avais dans la main quelque chose, qui venait de cette mère inconnue, un bracelet qu’elle avait touché, porté au bras, une preuve matérielle de son existence passée. Et alors il me semblait que je suffoquais ; tous les sentiments cachés de mon cœur, tous les cris refoulés de mon enfance, tout ce besoin d’être quelque chose tenant à quelqu’un et non pas un être emporté par la vie comme un brin de paille par le vent, tout cela se réveillait en moi. Je ne sentais plus cette peur étrange de ma marraine, qui d’ordinaire m’empêche de me montrer telle que je suis. Je voulais savoir, je le voulais.… et me jetant auprès d’elle, l’entourant de mes bras, je lui dis :

— Je vous en supplie, marraine, je vous en supplie, dites-moi qui elle était, que je puisse la voir dans mes rêves, mettre enfin une figure sur ce nom si vague, et qui me tourmente depuis que je sais penser. Comment voulez-vous que je l’aime, si je ne la connais pas ? et tout enfant aime sa mère, n’est-ce pas ? Soyez bonne, chère marraine, parlez-moi d’elle, — vous la connaissiez, puisque ce bracelet se trouve entre vos mains.