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qu’à elle, et si, dans leurs rencontres, elle eût levé ses yeux pleins de larmes vers lui, toutes ses mauvaises pensées, toutes ses vilaines rancunes se seraient évanouies, comme par enchantement. Il se souvenait des angoisses de madame Langlois, et de sa promesse d’être toujours là pour secourir sa fille d’adoption ; plusieurs fois il chercha à venir en aide à sa voisine ; mais il le faisait gauchement, et elle ne voulait rien accepter.

Elle répondait toujours qu’elle avait trouvé de l’ouvrage, et lui montrait des paquets de linge grossier qu’elle cousait pour de grands magasins. Il voyait qu’elle était pâle, qu’elle avait maigri, qu’elle ne montait plus les escaliers de son pas vaillant de fille bien portante. Cependant elle souriait doucement, tout en répondant à ses questions. Il lui demandait d’un air farouche quand elle partait pour l’Amérique : « Je ne sais… je n’ai pas encore de réponse — cela sera pour demain sans doute… » Et, malgré lui, le cœur lui battait très fort ; l’espoir est une chose qui résiste longtemps.

Marca avait, en effet, trouvé un peu d’ouvrage ; on lui donnait quelques sous pour un travail de douze heures. Elle était inexpérimentée, elle voulait faire trop bien, et elle n’en finissait pas.

Ce mot : du pain ! n’était pas un vain mot maintenant. Elle en était arrivée à ne manger à peu près