Page:Mairet - Marca.djvu/25

Cette page n’a pas encore été corrigée

semblaient assez mal à leur aise, se trouvant tout d’un coup dans le boudoir un peu étroit pour une vingtaine de personnes. Les femmes formaient toujours un demi-cercle autour du foyer ; il fallait quelque audace pour approcher d’elle. D’ordinaire c’était le moment où Véra faisait passer ses invités au grand salon ; mais, ce soir-là, elle ne semblait pas y songer. Le maître de la maison, un homme superbe, très galant, très courtois, qui portait crânement ses soixante années, faisait de son mieux pour animer le cercle ; de temps en temps il jetait un regard à sa femme, à la dérobée, croyant que personne ne le voyait ; un regard d’admiration passionnée, l’adoration d’un vieux.

Quelques instants après l’entrée des hommes, un domestique apporta un pli cacheté à Véra.

— Ah ! la pauvre enfant ! fit-elle.

L’exclamation partit comme involontaire ; elle ne l’était pourtant pas.

— Qu’est-ce donc ?

Tout le monde cherchait une explication ; le baron de Schneefeld coupant court à un compliment bien commencé, fut tout aussitôt auprès de sa femme ; il se fit un silence.

— Oh ! c’est bien peu de chose, presque rien. Véra parlait le français fort bien, mais elle avait un soupçon d’accent étranger ; elle traînait un peu ses mots ; personne ne l’aurait prise pour une