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qu’un garçon, honnête au fond, et nullement incapable d’une affection sincère.

Le lendemain Marca, encore un peu faible, était à moitié couchée à l’ombre d’un bel arbre, le seul qu’on eût laissé tout contre la maison. Il faisait toujours fort chaud, les oiseaux se taisaient, on n’entendait dans l’air qu’un léger bourdonnement d’insectes. Autour de la chaise longue de Marca, il y avait des sièges vides maintenant, mais où traînaient des ouvrages oubliés, des livres à demi coupés. Les dames étaient rentrées faire leur toilette du dîner ; Maxime seul restait auprès d’elle, il lui lisait quelques fragments de poésie ; il faut même dire qu’il les lisait assez mal, selon la mode contemporaine. Marca lui ôta le livre des mains en souriant :

— Ne lisez plus : racontez-moi quelque chose, faites-moi rire…

— Cela veut dire : Mon cher Maxime, vous ne lisez pas, vous ânonnez. — C’est pourtant vrai ; on s’est si bien appliqué au collège à m’ôter le peu d’intelligence que je possédais !

— Ce n’est pas cela ; mais… la poésie m’inquiète. Je crains d’être une personne fort terre à terre ; je me laisse charmer par le rhythme des vers, j’en aime la musique ; mais les sentiments des poètes me font peur. Il y a chez eux une exaltation à laquelle je ne comprends rien : l’affection chez eux n’est pas l’affection, c’est un tourment poétique ;