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leur jeune temps où ils jouaient aussi dans une comédie de société — et on chuchotte, de façon à être entendu : « Sont-ils gentils nos deux tourtereaux !… »

— Mais il ne faut pas épouser M. des Granges, si tu ne l’aimes pas !

— Est-ce que je sais si je l’aime ou non ! Je saurai cela, après. Maman me dit qu’on aime toujours son mari ; je suppose qu’on trouve cet amour-là caché quelque part parmi les dentelles de la corbeille. En tous les cas, il ne me déplaît pas : c’est la phrase reçue, celle-là ; mais quand, par malheur, nous nous trouvons vraiment seuls, nous n’avons plus rien à nous dire — rien ! Aussi je n’ai que faire de tes coins poétiques et solitaires. Garde-les pour toi, ma chère, puisqu’il te faut le grand orchestre du sentiment. Seulement je te préviens d’une chose, c’est que Maxime est un peu comme moi, il ne croit pas beaucoup à la grande passion ; il change volontiers la pièce d’or contre beaucoup de petite monnaie ; c’est plus utile dans la vie.

— Qu’est-ce que tu veux dire ? Non, sois franche, je l’exige ; tu m’as plus d’une fois dit des choses de ce genre, et j’ai bien le droit de te demander où tu veux en venir.

Marca tenait sa cousine par la main, elle était pâle et ne riait pas ; elle voulait savoir, à la fin ;

— Bah ! tout ce que je veux dire c’est ceci : ne