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toilette toute noire, à corselet de jais la serrant et montrant bien les contours de sa taille ; elle se sentait en beauté ce jour-là. C’était un moment attendu depuis longtemps, pressenti, savouré d’avance : le triomphe de son peintre. Sans en rien laisser savoir à Ivan, elle avait recueilli les impressions de plusieurs membres du jury ; ces messieurs, d’ordinaire trop occupés à admirer leurs propres œuvres pour accorder beaucoup d’attention à celles des autres, déclaraient cependant que le tableau de M. Nariskine avait fait sensation, et qu’on l’avait très bien placé. Ivan ne se trouvait pas avec elle ; on devait se rencontrer devant le tableau.

Marca n’avait encore rien vu de pareil, et, en entrant dans le grand salon carré, elle se sentit un peu éblouie, ne sachant pas au juste où regarder, ni comment se tourner. Le jour tombait dru et clair, sur toutes ces toiles bariolées, aux couleurs encore humides, et qui semblaient très crues.

Il y avait beaucoup de grands tableaux très mouvementés dans ce salon carré ; des allégories, de grandes « machines historiques », des tableaux religieux ; le grand art enfin, où le génie français se sent toujours un peu mal à l’aise. Quelques portraits de très grands personnages s’imposant par les noms — des modèles. En revanche on voyait des paysages signés de noms bien connus, frais, pénétrés d’air, traités avec un véritable amour de