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nait pour la regarder : on souriait à ses dix-huit ans qu’elle allait atteindre, comme au joli mois de mai qui était proche. Il y a quelque chose dans la jeunesse franche et rayonnante qui fait que l’on s’arrête volontiers pour songer avec un attendrissement soudain à cette existence qui commence ; on sait gré à une jeune fille d’être vraiment jeune et joyeuse, de s’avancer tête haute, avec la tranquille assurance de l’ignorance, à la conquête de quelque chose de merveilleux, d’un bonheur rêvé qui semble un droit. Pour rien au monde on ne voudrait détruire cette ignorance, insinuer un doute dans cet esprit confiant. Quand on passe près d’elle, on se sent ému et une larme monte du cœur à la paupière.

— Au moins celle-là ne lésine pas, se disaient les marchandes les unes aux autres. Est-elle gentille, tout de même ! ça doit donner du bonheur, rien que de la voir. La journée sera bonne, elle m’a acheté des roses.

Cependant, il fallait bien en finir avec les achats ; la voiture qui attendait, à l’ombre de la grande église, ne pouvait pas contenir le marché tout entier ! En ce moment survint une averse subite et que le soleil, seulement à demi voilé, éclairait, faisant étinceler les gouttes et miroiter les flaques d’eau. Il y eut des petits cris de femmes, un bruissement de parapluies qui s’ouvraient :