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un usage général l’indication de la nature du produit, sera dans le domaine public, non à titre de res nullius, mais à titre de res omnium. Celui qui l’a créée ne pourra pas en faire l’objet d’une appropriation par un dépôt tardif.

Ainsi décidé par la Cour de cassation dans les termes suivants (Leroy c. Calmel — 10 mars 1864 — Voy. Leroy c. Calmel) :

34. — « Attendu que si l’art. 2 prérappelé dispose que nul ne peut revendiquer la propriété exclusive d’une marque avant d’avoir déposé deux exemplaires de cette marque au greffe du tribunal de commerce de son domicile, ce dépôt ne constitue pas un droit exclusif à la propriété de la marque, qu’il est nécessaire seulement pour en exercer la revendication ; qu’il y a toujours à rechercher si ce droit existait préalablement au dépôt, et si, comme dans l’espèce, le déposant n’y avait pas renoncé ; que si l’usurpation du nom d’un fabricant n’est jamais un acte licite, il n’en saurait être de même de l’usage d’un signe non personnel que le fabricant aurait volontairement abandonné à la généralité des commerçants ; — Attendu qu’il est constaté par l’arrêt dénoncé que Calmel, sur les étiquettes dont il s’agit au procès, n’a usurpé ni le nom ni la demeure de la partie civile ; que l’usurpation prétendue résulterait seulement de la forme, de la couleur du papier et des lettres, de la disposition de celles-ci, mais que ces forme, couleur et disposition sont généralement adoptées dans le commerce de la vente du cirage ; qu’elles ont un caractère banal et que le domaine public en était en possession avant et depuis le dépôt ; que de l’ensemble de ces circonstances, la Cour impériale de Paris a pu conclure que Leroy avait abandonné au public l’usage de la marque dont il a cru devoir plus tard réclamer la possession exclusive. »

35. — Si l’ensemble des conditions énumérées plus haut ne se trouve pas réuni, il n’y a pas abandon.

Dans une affaire récente, qui a attiré l’attention par le haut intérêt des questions multiples qu’elle soulevait, MM. Ph. Vrau et Ce, filateurs à Lille, se sont vu opposer une tolérance de quinze ans et l’absence de toute poursuite, en présence d’un emploi de plus en plus général de leur marque ; mais la Cour de Douai a jugé avec raison que toutes les conditions nécessaires pour constituer l’abandon n’étant pas réunies, il n’existait pas juridiquement.