Page:Magog - L'homme qui devint gorille, publié dans l'Écho d'Alger du 18 nov au 27 déc 1925.djvu/184

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sur tous les faits aboutissant à cette situation unique une clarté saisissante — disons même horrifiante.

Mais, quelle haine cette découverte ne devait-elle pas déchaîner dans l’âme de la victime ? Quelle puissance surhumaine aurait pu contenir l’instinctif élan qui la devait lancer contre l’auteur de ce crime abominable ?

Après avoir lu l’écho, Roland, subitement, devint vraiment le gorille, la bête féroce, dont son bourreau lui avait donné l’apparence, sa face prit une expression terrible.

Mais, pour concevoir et exécuter sa vengeance, il avait son intelligence humaine.

Il dit à Godolphin :

— Donne-moi ton manteau et ton chapeau. Tu vas aller me chercher une voiture. Tu donneras l’adresse au cocher : rue Anatole-de-la-Forge. Inutile de m’accompagner.

— Excusez, patron, répondit le saltimbanque. Si c’est l’heure de la liquidation, je ne veux pas vous lâcher. Vous pourrez avoir encore besoin de Bibi.

Effectivement, il avait facilité à Roland l’escalade de la grille et de la marquise, en occupant le concierge et en lui masquant la manœuvre.

Roland venait en justicier ; le crime de Borsetti légitimait ses actes. Il se résolut donc à l’irruption violente et, connaissant les dispositions des lieux, il choisit, pour y faire sa brèche, le petit salon, dont la fenêtre lui permettrait d’entrer sans attirer l’attention des domestiques.

Rien, d’ailleurs, n’aurait arrêté sa marche. Il était décidé à réclamer son ennemi, même au milieu de cinquante personnes.

Qui oserait le lui disputer, quand il crierait :

— J’étais un homme. Voyez ce qu’il a fait de moi.

Le hasard le servit, en le mettant brusquement en face de Borsetti et de Violette.

Son apparition, son geste, son cri avaient