Page:Magin-Marrens - Histoire de France abrégée, 1860.djvu/117

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

instants après, un page ayant laissé tomber son épèe à terre, le bruit du fer réveille le roi comme d’un profond assoupissement ; il tire son épée, lance son cheval à travers toute sa suite, blesse ou tue ceux qu’il rencontre. C’est à peine si l’on put le saisir par derrière, le garrotter et le ramener sur une charrette à la ville du Mans, où il resta deux jours sans connaissance. Il était fou à l’âge de 24 ans, et il avait encore trente ans à régner.

214. les oncles du roi s’emparent de l’autorité. — bataille de nicopolis. — Le duc d’Anjou était allé mourir en Italie, en voulant s’assurer la possession du royaume de Naples. Les ducs de Berry et de Bourgogne s’attribuèrent la régence à l’exclusion de Louis, duc d’Orléans, frère de Charles VI. Ils disgracièrent les anciens ministres, qu’ils qualifiaient du nom de marmousets, et ôtèrent à Clisson l’épée de connétable. Ils n’usèrent de l’autorité que pour accroître leurs richesses. La France dut cependant à leur administration dix années non pas de bonheur, mais de repos, pendant lesquelles les chevaliers français allèrent avec Jean-sans-Peur, comte de Nevers, défendre la Hongrie contre les Turcs, et furent tués ou faits prisonniers à la bataille de Nicopolis (1396).

215. misère et abandon du roi. — Quant au malheureux roi, délaissé par ses oncles et par la reine elle-même, l’indigne Isabeau de Bavière, il manquait souvent des choses les plus nécessaires ; à peine lui donnait-on de quoi changer de linge et de vêtements. Dans les premiers temps de sa maladie, on avait essayé de le guérir en l’entourant de distractions, de fêtes et d’amusements. Mais cet essai même eut les plus funestes conséquences. Une mascarade, donnée par la reine à l’hôtel royal de Saint-Paul, faillit coûter la vie à Charles VI. Le roi et cinq jeunes seigneurs y parurent déguisés en satyres, à l’aide de toiles enduites de poix et couvertes d’étoupes. Le feu prit aux costumes de ces jeunes seigneurs et ils furent brûlés vifs ; le roi ne dut la vie qu’à la présence d’esprit de la jeune duchesse de Berry, qui le sauva en le couvrant de sa robe ; mais la frayeur qu’il