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UNE RIVALE

peu mécontent, car la perspective de ce voyage ne l’amusait guère. D’abord, son élève, lorsqu’elle était seule avec elle, était absolument insupportable, et elle n’osait pas trop compter sur la bonne influence de Paul, qui était le comble de l’insouciance.

Ce fut donc en soupirant que Mlle Marlvin alla dans la bibliothèque chercher des ouvrages de géographie et s’y plonger. L’idée du trésor à conquérir n’éveillait en elle que des idées de fatigues et d’ennuis de toutes sortes. Lubie d’enfant gâtée, voilà tout !

D’abord, elle avait songé à faire profiter Colette de ses recherches ; en l’amusant, elle allait lui apprendre la géographie de la France, l’histoire, les particularités de chaque province, et, après tout, ce voyage ne serait pas sans résultat profitable. Mais, bah ! Au premier mot que Mlle Marlvin prononça : « Ma petite chérie, voilà un voyage qui va vous instruire… » la fillette l’interrompit en se bouchant les oreilles.

« M’instruire ? Ah ! là ! là ! Pourquoi faire ? Je ferai ce voyage pour m’amuser ! Dites-nous où nous devons aller, c’est tout… »

Là-dessus, Colette était sortie en courant et avait rejoint son père et son frère qui partaient en voiture pour une de leurs fermes de la Camargue.

Durant les jours qui suivirent, chaque matin, Colette s’informait auprès de son père et de son frère : « Parlait-on dans les journaux du concours de M. Toupie ? » M. Dambert et Paul dépouillaient les gazettes avec la plus grande attention. Ainsi, la famille fut informée de l’accident arrivé au concurrent qui s’était cassé la jambe en montant à Notre-Dame de la Garde. Chaque jour aussi, Colette demandait à Paul s’il était prêt. Mais il devait expédier des bestiaux à destination de Marseille ; puis il attendait la visite d’acheteurs, et enfin, il voulait assister à une grande course de taureaux camarguais qui devait avoir lieu aux Saintes-Maries, dans le courant de juillet. Tous ces retards faisaient enrager la fillette, mais il n’y avait rien à objecter, car son frère était aussi entêté qu’elle.

Colette profitait de cette attente forcée pour préparer ses bagages. Comme ils voyageraient en auto, il s’agissait d’emporter peu de malles et d’y mettre le strict nécessaire. La fillette se moquait de Mlle Marlvin, qui avait déclaré qu’elle enverrait ses bagages par le chemin de fer.

« Où ça ? avait demandé Colette.

— Mais dans la ville qui sera le centre de nos pérégrinations.

— Nous n’irons pas dans les villes, nous resterons dans les campagnes.

— Certainement non, » avait décidé Paul, qui n’aurait pas trouvé drôle d’être obligé de passer ses soirées dans des auberges campagnardes dépourvues de tout confort.

Alors, comme Colette était une petite fille très taquine, elle ne songea plus qu’à empêcher Mlle Marlvin d’emporter une malle, espérant que l’on séjournerait dans les lieux les plus perdus de France.


l’automobile s’avança devant le perron.

« Ma petite, avait déclaré Paul, c’est moi qui conduirai l’auto ; donc, je ne m’arrêterai qu’aux endroits où