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ARTHUR DEVIENT TIMBRÉ


élisabeth rangeait les armoires.
ver ce trésor !… Je sais qu’il y a des gens qui parcourent déjà la France et qui vont peut-être mettre la main dessus… Cela me désole… Depuis quelques jours Louis est tellement pris par ses malades qu’il ne peut terminer un mémoire qu’il devait remettre à la fin du mois à l’Académie de médecine, et je vois bien qu’il est malheureux. Le trésor ! Le trésor ! Où est-il ?…

« Au secours, monsieur Toupie !

« Arthur, lui, en devient toqué. Autrefois, il était distrait, mais aujourd’hui c’est plus grave : il n’écoute même plus ce qu’il dit. Si je l’arrête sur le trottoir pour l’empêcher d’être écrasé, il s’écrie : « Mon vieux, je ne sais plus à quelle heure on déjeune à la maison, parce que papa s’est absenté. Il est allé chez ma grand’mère qui est venue passer quelques jours chez nous. — Alors, elle est à Versailles ? — Mais oui. — Ton père n’est donc pas parti ? — Parti ! Bien sûr que non. — Tu viens de me le dire à l’instant. — Moi ? — Oui, toi. — Tu es fou… » Et il hausse les épaules ironiquement.

Autre distraction, plus drôle, de ce cher camarade. Sa mère un peu souffrante, l’appelle dans sa chambre et lui dit de porter une bouillotte remplie d’eau chaude à la cuisine et un flacon dans le cabinet de toilette. Arthur entre gravement dans le cabinet de toilette, ouvre un panier à linge, verse doucement et délicatement dessus tout le contenu de la bouillotte. Il s’aperçoit tout à coup de sa bévue et pousse des cris d’effroi à la vue du linge complètement inondé par le torrent chaud qui est tombé dessus.

« Mais les camarades profitent de ses distractions pour lui faire des farces. L’autre jour, pendant une récréation, l’un d’eux est rentré en cachette dans la salle de classe et a versé du sucre en poudre dans son encrier. Tu sais que l’encre additionnée de sucre, ne peut adhérer convenablement à la plume et qui est impossible d’écrire. De fait, pendant la classe d’histoire qui suivait, Arthur n’a pu prendre une seule ligne de notes. Le plus fort, c’est qu’il a été assez longtemps avant de s’apercevoir qu’il ne réussissait à tracer aucun mot sur son cahier ! Je crois que ce sont les rires étouffés qui lui ont donné l’éveil !

« Veux-tu encore une histoire ? Il y a trois jours, il faisait très beau. Je rencontre Arthur, dans l’avenue de Paris, son capuchon enfoncé sur sa tête. « Tu as froid ? — Non : pourquoi ?

— Mais tu as ton capuchon. — C’est qu’il pleut. » Je le regarde stupéfait : il rit en s’apercevant de son erreur, et me prend par le bras en s’écriant :

« C’est en Bretagne qu’il faut aller, tu entends, en Bretagne… C’est plein d’églises, de calvaires, de statues où l’on se rend en pèlerinage. Je vais aujourd’hui « potasser », comme nous disons au lycée, le guide de Bretagne ».