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Les disettes et les famines sont moins à craindre, quand un peuple possède des substances alimentaires très variées.


(Cannes à sucre.)


Ainsi les habitans de l’ancienne France, qui n’avaient pour nourriture que le pain, le laitage, très peu de viande, quelques mauvais légumes, et les châtaignes dans certaines localités, étaient bien plus souvent que nous affligés de la cherté des grains.


TRAITE DES NOIRS

Un grand nombre de voix se sont élevées en Europe contre l’esclavage des noirs dans les colonies. Cela est juste et humain ; mais il y a une difficulté qui n’est peut-être pas résolue.

Comment remplacer les noirs ?

La France et l’Angleterre, rivales depuis bien des siècles, ont uni leur puissance pour empêcher cette vente de chair humaine ; leurs navires parcourent les mers pour capturer les bâtimens négriers, dont le capitaine et l’équipage sont punis avec rigueur. Cela est encore bien ; cependant si l’on veut cultiver les colonies, comment conserver les colonies sans acheter des nègres ?

Or, si les planteurs peuvent acheter des nègres, ne faut-il pas que des particuliers en aillent chercher à la côte d’Afrique ?

Il y a une contradiction manifeste de la part des généreux antagonistes de la traite.

Aussi, qu’en résulte-t-il ? C’est que des êtres à face humaine, qui dans les flancs de leur navire recélaient cette marchandise prohibée, des êtres blancs comme nous, se trouvant chassés, poussés à bout, traqués par quelque navire croiseur, se débarrassent de leur cargaison en la jetant par-dessus bord.

Malheureusement, en un jour on ne change pas ce que les siècles ont fait. Aussi doit-on s’attendre à voir renouveler des horreurs pareilles à celles qu’exprime la gravure.

Peut-être pourrait-on concilier les intérêts des planteurs, et les devoirs que nous impose l’humanité, par quelque mesure analogue à celle-ci :

Une grande compagnie, anglaise ou française, libre, ou mieux encore, déléguée par les deux gouvernemens réunis, et fondée comme se sont autrefois fondées les compagnies commerciales des Indes, après avoir effectué les calculs convenables, se chargerait elle-même, légalement et avec privilége, de pourvoir les colonies d’une quantité suffisante de nègres pour équilibrer les besoins annuels.

Dans ce but, elle nouerait avec les populations de la côte, qui vendent leurs prisonniers ou leurs condamnés, des relations légales, à l’aide desquelles elle pourrait plus tard leur inculquer la civilisation européenne.

Les nègres achetés seraient considérés comme des soldats enrégimentés, appartenant à la compagnie, qui les louerait aux colons selon certaines règles.

Nos soldats qui tombent au sort ne sont-ils pas, sous un certain point de vue, tellement esclaves, qu’on les fusille s’ils désertent, on s ils rendent à leur lieutenant la poussée qu’ils en ont reçue ?

Les nègres pourraient suivre diverses voies dans la vie. Les uns demeurant toujours enrôlés, comme les vieux soldats, auraient l’avantage d’être sous une dépendance gouvernementale, et non sous le caprice des particuliers. D’autres suivraient les routes qui leur seraient ouvertes pour conquérir la liberté. D’autres pourraient faire retour dans leur patrie, et deviendraient des centres de civilisation chacun dans leur tribu.

Ceux qui travailleraient sur les habitations subiraient une surveillance protectrice ; et comme il serait défendu d’acheter des nègres, la traite cesserait.

Les colonies deviendraient ainsi des ateliers universels, des écoles d’enseignement général, où les noires populations africaines, qui se traitent entre elles avec-plus de barbarie que les colons ne traitent leurs esclaves (car on a peut-être exagéré ou du moins trop généralisé la cruauté des maîtres),


(Négriers jetant leur cargaison à la mer.).


passeraient toutes alors, et successivement, pour apprendre à conquérir leur place, et à mériter un grade dans l’échelle civilisée de la grande famille humaine.




La cupidité vit au milieu de la société comme un ver destructeur au sein de la fleur qu’il habite, qu’il ronge, et qu’il fait périr.

L’abbé Béraud.




La loi n’est pas faite pour l’homme de conscience et d’honneur.

Richardson.




Les maux du monde dureront jusqu à ce que les philosophes deviennent rois, ou jusqu’à ce que les rois deviennent philosophes.

Platon.