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ment pour que l’on puisse lire les caractères les plus fins ; un témoin oculaire qui a donné une description du porte-lanterne de Surinam, au commencement du XVIIIe siècle, dit seulement qu’il ne croit pas impossible de déchiffrer avec ce flambeau une gazette hollandaise de celle époque ; enfin, des hommes instruits, qui ont fait un assez long séjour dans la Guiane, n’ajoutent point foi à ce que l’on a écrit sur les facultés lumineuses des fulgores de ce pays, parce qu’ils n’en ont jamais aperçu.

Ce témoignage négatif n’infirme point les assertions de personnes instruites, et qui racontent ce qu’elles ont vu. Telles furent, à la fin du XVIIIe siècle, et dans le suivant, Marie Sibylle Mérian, et sa fille aînée, vouées l’une et l’autre à l’étude des insectes, venues à Surinam pour y observer les espèces extraordinaires dont on n’avait pas encore alors de bonnes descriptions. Ou sait que ces deux naturalistes joignaient le talent de peindre à celui de décrire suivant les méthodes de la science, que plusieurs langues anciennes et modernes leur étaient familières, et que leurs connaissances littéraires étaient plus étendues qu’on ne l’aurait pensé d’après leurs études de prédilection. Des écrivains qui se présentent avec tous ces titres à la confiance, obtiennent facilement celle des lecteurs ; on ne sera donc pas disposé à révoquer en doute ce qu’on lit dans la Description des insectes de Surinam, concernant le fulgore porte-lanterne.

Des Indiens avaient apporté aux deux naturalistes un bon nombre de ces insectes. C’était une provision pour plusieurs jours d’étude ; on la mit dans une grande boîte déposée dans la chambre à coucher. Au milieu de la nuit, un son extraordinaire se fait entendre ; les savantes, éveillées en sursaut, se lèvent précipitamment, et non sans effroi ; elles demandent de la lumière ; dès qu’elles peuvent discerner les objets, elles reconnaissent que l’origine du son est dans la boîte aux insectes. Elles se hâtent de l’ouvrir… L’intérieur paraît embrasé ; la terreur est à son comble ; la boite fatale échappe des mains ; les prisonniers s’envolent, et répandent dans toute la chambre une vive clarté. Enfin, l’étonnement et la peur se calment, on fait la chasse aux lanternes volantes, et on les remet dans la boîte.

Ainsi, la fulgore de Surinam est une émule de notre cigale, et elle l’emporte beaucoup sur nos vers luisans. Cet insecte américain vit principalement aux dépens du grenadier, arbre dont l’Europe a fait présent au Nouveau Monde. Par réciprocité, l’Amérique pourrait donner son porte-lanterne aux contrées européennes qui possèdent le grenadier.




DES INSTRUMENS DE MUSIQUE À CLAVIER.


DU PIANO.


L’usage des instrumens à clavier existait au commencement du XVIe siècle. Il y en avait de plusieurs sortes :

1o Le clavicitherium, monté en cordes à boyaux.

2o La virginale, montée en cordes d’acier. (C’est de cet instrument que jouait la reine d’Angleterre Elisabeth.)

3o Le clavicorde, en cordes de laiton.

4o Le clavecin, dont on fit usage jusqu’à la fin du dernier siècle. On en trouve encore quelques uns chez les luthiers, et chez de vieux amateurs. Voici quelle était sa forme.

Un morceau de bois garni de buffle ou de plume, et poussé par la touche sans aucun agent intermédiaire, faisait résonner les cordes de ces instrumens. Leur étendue, dans les premiers temps où nous commençons à en avoir connaissance, était de trois octaves et demie. L’Allemagne avait adopté particulièrement le clavicorde. On se servit de la virginale, du clavecin et de l’épinette, sorte de virginale, en France, en Italie et en Angleterre, où, pendant longtemps, ils ne reçurent que peu d’améliorations.

En 1718, Cristofori, Florentin, inventa le clavecin à marteau, qui prit le nom de piano forte, et dont les Anglais et les Allemands revendiquent également, mais sans aucun titre, l’invention. Cette découverte eut le sort de tant d’autres, et les premiers essais du Florentin furent faiblement appréciés. Ou ne comprit que bien des années après tous les avantages qui pourraient en résulter. En 1760 seulement des fabriques régulières de pianos s’établirent en Allemagne et en Angleterre. Vers 1776, les frères