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En ce que la lune, en décrivant un cercle entier autour de la terre, lui montre toujours la même face, on tire cette conclusion remarquable, que la lune tourne autour d’elle-même, dans un temps précisément égal à celui qu’elle met à tourner autour de notre globe. Ou ne se rend pas compte de cela, au premier abord ; mais pour bien s’en assurer, il suffit de placer un chapeau par terre, au milieu d’une chambre, et d’en faire le tour en ayant toujours les yeux fixés sur lui ; les personnes qui seront assises dans l’appartement vous verront tourner sur vous-mêmes, car vous leur montrerez tantôt le nez et tantôt les talons, et vous-même vous aurez vu successivement toutes les parties de l’appartement.

On comprend, d’après ce qui précède, que la lune n’a guère, dans l’espace d’un mois, qu’un jour et une nuit, qui valent chacun environ quinze de nos jours longs de vingt-quatre heures. Les lunariens ne sont pas très favorisés, car leurs longues nuits doivent être très froides, et leurs longs jours très chauds.

C’est le célèbre Cassini qui a fait graver en 1692, d’après ses propres observations, la carte dont nous reproduisons la réduction ; cependant, il y en avait déjà eu avant lui. Quelques astronomes ont donné aux taches de la lune les noms tirés de l’anciemie géographie, mais Riccioli les a désignées sous les noms que nous conservons, et cette nomenclature est adoptée maintenant comme un hommage rendu à la mémoire des hommes illustres.

Galilée, le premier, après la découverte des lunettes, observa les taches de la lune, et remarqua le phénomène suivant, que l’on appelle libration. En regardant attentivement la face de la lune, il reconnut que les taches des bords se rapprochaient et s’éloignaient alternativement de la circonférence ; que quelques unes même disparaissaient entièrement ; que pour certaines d’entre elles, la différence de position allait jusqu’à un huitième de la largeur du disque lunaire.

Il semble, d’après cela, que cet astre aurait autour de son centre un mouvement de va-et-vient ; c’est pourquoi on a donné à ce phénomène le nom de libration (balancement).

La libration n’est cependant due qu’à une illusion de nos sens, et tient à plusieurs causes du mouvement de l’astre. En voici une, facile à comprendre, qui peut laisser pressentir ce que sont les autres : la lune présente toujours sa face au centre de la terre, mais les hommes étant au-dessus de ce centre, à une hauteur de 1 500 lieues, découvrent, suivant la position de l’astre, certaines parties supérieures qu’ils ne verraient pas du centre de la terre.

Dans un prochain article, nous détaillerons quelques particularités de la lune ; sa constitution physique, ses volcans, ses aérolithes, la hauteur de ses montagnes, l’intensité de sa lumière, son poids, etc.




TABLEAU DE LA HIÉRARCHIE ADMINISTRATIVE


DANS LA RÉGENCE DE TUNIS ( Afrique).

La conquête et la possession d’Alger ont appelé l’attention sur les pays barbaresques ; peut-être ne trouvera-t-on pas sans intérêt cette notice sur les principaux fonctionnaires de la haute administration de Tunis, régence voisine dont les formes gouvernementales s’éloignent peu sensiblement de celles de l’étal d’Alger avant la conquête.

Le bey (à Alger le dey). — Ce titre appartient au souverain, qui ne tient guère son pouvoir que de lui-même, quoiqu’il reçoive par forme l’investiture du grand-seigneur. Il habite le Barde, palais fortifié et situé dans la plaine, à un mille de Tunis. C’est là que chaque matin se rendent seigneurs et raïas, les uns pour saluer la source de tout bonheur, les autres pour lui exposer leurs griefs, et lui demander justice ; car le bey est le seul grand-justicier de son empire. Il n’est vraiment roi que sur son tribunal. C’est à lui que des tribus entières viennent demander satisfaction d’un cheikh prévaricateur. Dès cinq heures du matin, en été, le bey est accessible pour tous ses sujets, sa justice leur est ouverte. Il monte sur son tribunal ; les ulémas, interprètes du Coran, l’entourent, et donnent leur avis lorsque les parties se sont retirées. Le jugement est prononcé à huis-clos : il est sans appel, et exécuté sur-le-champ, quel qu’il soit.

Le bachy-mamelouk, ou chef des Mamelouks. — L’administration tout entière de la régence repose sur les délégués du pouvoir du bey. Au premier rang, il faut placer le bachy-mamelouk. Il perçoit les contributions ou justes ou vexatoires qui fournissent aux dépenses de son maître ; il donne audience aux agens diplomatiques européens ; et, de cette manière, lorsque ces derniers sont dans le cas d’adresser des représentations énergiques, la fierté du bey n’a point lieu d’en être blessée. Au surplus, l’or ou les présens des chrétiens finissent toujours par aplanir les difficultés les plus graves.

Le kasnadar, ou le trésorier de l’empire. — C’est à lui qu’est confiée la garde des trésors du bey.

Le sahestabb, par corruption appelé sapatap ou satrape par les chrétiens. — C’est le chancelier, le garde des sceaux musulmans. Les fonctions de ce personnage font toute son importance. Dépositaire du cachet du prince, il l’appose au bas des dépêches et des billets que celui-ci délivre pour faciliter le service des affaires courantes.

Le ministre de la marine. — Son commandement ne se borne point à celui que semblerait lui réserver son titre ; sa valeur s’exerce également au milieu des troupes de terre.

Tous ces fonctionnaires résident au Barde avec le bey. Si l’on veut ensuite étudier la hiérarchie de l’ordre administratif dans la ville, on rencontre d’abord :

Le dewletle, ou grand préfet de police. — C’est à lui que sont portées les causes au premier degré de juridiction ; s’il se déclare incompétent, elles sont portées au Barde. Le dewletle a la haute main sur toutes les affaires de police de la ville ; il commande les rondes de nuit, fait observer les règlemens en matière de religion, punit les contrevenans, et condamne à la bastonnade. Quelquefois il lui prend fantaisie de faire en ville ses fonctions par lui-même. Il sort accompagné de plusieurs hommes d’armes, s’assied sous l’auvent d’une boutique, écoute les plaideurs, et prononce la sentence.

Les cadis. — Leur tribunal est plutôt un lieu de conciliation, comme chez nous la justice de paix, qu’un tribunal chargé de rendre des arrêts définitifs. On y distribue toutefois un assez grand nombre de coups de bâton.

Le grand-fermier de la douane. — C’est le dignitaire le plus indépendant de la Régence, le seul qui, avec le bachy mamelouk, fournisse de l’argent au bey. Sur un terrain compris entre la ville et le port, et qu’on nomme la Marina, les négocians francs ont obtenu la permission de faire construire des magasins où sont déchargées et entreposées les marchandises qui restent confiées à la garde et sous l’inspection des douaniers turcs, jusqu’à ce que le grand-fermier donne l’ordre de les faire apporter en ville au magasin public. Là elles sont étalées, reconnues, pesées, et les droits sont tarifés et perçus selon le pied sur lequel la nation du négociant se trouve traitée. On comprendra néanmoins que la lettre des conventions n’est pas toujours exactement suivie ; car le grand-douanier prenant l’engagement de fournir annuellement au bey une somme fixe (cette somme s’élevait à 300 000 piastres en 1826), s’arrange de manière à