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assez profiter de ce que nous avions d’espace et de temps pour montrer et dire beaucoup de choses.

EXPOSITION DE SCULPTURES.
PÊCHEUR NAPOLITAIN DANSANT LA TARENTELLE,
PAR M. DURET.

(Pêcheur napolitain dansant.)

M. Duret élait déjà connu par sa statue de l’Invention de la lyre, exposée en 1850 au Musée des Petits-Augustins, et ensuite au Louvre.

Le pêcheur napolitain séduit le regard par une légèreté et une vivacité d’expression qui invitent à la musique et à la danse. La statue ne perd rien à être étudiée de près ; les détails sont gracieux sans aucune mollesse. L’artiste n’a pas ennobli et idéalisé la figure plus qu’il n’était convenable. Outre la composition et l’exécution, on doit louer l’excellent goût dont M. Duret a fait preuve dans le choix du sujet, qui lui a permis de conserver le nu, et de se réserver ainsi les priviléges de l’art antique sans être obligé de se réfugier dans des mœurs éloignées pour produire une statue de genre.

La tarentelle est une danse napolitaine qui, suivant toute apparence, doit son nom à cette tradition de la piqûre de la tarentule (sorte d’araignée), dont on ne pouvait guérir qu’en dansant au son de la musique avec une rapidité extrême jusqu’à ce qu’on tombât à terre baigné de sueur et épuisé de fatigue. Il est une autre danse, moins vive que la tarentelle, également en faveur chez les Napolitains, c’est la saltarelle. On a figuré cette danse au grand Opéra, au troisième acte de la Muette de Portici, dans la scène du marché qui précède la révolte du peuple conduit par Masaniello. On la voit de même exécutée habilement dans plusieurs mélodrames de l’Ambigu et de la Gaieté.




MAHOGONI — BOIS D’ACAJOU.

Le bois auquel on donne en France le nom d’acajou, est celui de l’arbre que les Américains et les Anglais nomment mahogoni. C’est une espèce du genre swietenia des botanistes qui lui ont aussi conservé le nom spécifique de mahogoni. Il serait convenable de se conformer à cette nomenclature, d’autant plus que le mol d’acajou désigne, en Amérique, un arbre tout-à-fait différent de celui-ci, tant par la fructification que par l’usage que l’on fait de son bois.

Le mahogoni est un très grand arbre de l’Amérique ; il paraît confiné entre les tropiques, sans affecter cependant aucune prédilection pour les contrées les plus voisines de l’équateur. On en trouve plusieurs dont le tronc n’a pas moins de dix-huit pieds de tour, parfaitement sains dans l’intérieur, et de la plus belle végétation ; on admire d’autant plus les dimensions de ce géant des forêts, qu’il semble affecter de croître dans des terrains d’une apparente stérilité. C’est dans les montagnes de roches feuilletées, fendues, en décomposition, que le mahogoni abonde : ses longues racines se plongent dans les crevasses, où elles s’étendent et grossissent au point qu’elles écartent les pierres qui les emprisonnent, et causent des éboulemens ; la roche même est forcée de céder à l’action continue et prolongée du végétal, exemple remarquable du pouvoir que les corps vivans exercent sur ceux qui sont privés du principe de la vie.

Heureusement pour nos arts, le mahogoni croît très rapidement. Si dans les exploitations de cet arbre on avait soin de réserver assez de sujets propres à la reproduction, et placés de manière à la répandre uniformément, on ne serait jamais exposé à la rareté et au renchérissement de ce bois si précieux pour nos arts. Mais la prévoyance ne dirige pas ces exploitations. Même avant 1789, les forêts de Saint-Domingue et de la Jamaïque ne fournissaient plus de bois d’acajou, et toute l’Europe allait se pourvoir dans l’Amérique espagnole. Les bûcherons ne sont pas plus économes que prévoyans ; ils ne déracinent point les arbres, et abandonnent tout ce qui est