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il fit remarquer que, d’après la propre définition du collégien, il ne croyait pas voler, mais seulement marauder. La distinction fit rire ; mais M. Albin observa que plus d’une distinction de ce genre existe parmi les hommes, et qu’il fallait pardonner aux enfants de ne pas savoir les approfondir. Au moins ne pouvait-on excuser Alfred d’avoir laissé bassement accuser un autre à sa place ; car ceci est la plus vilaine des mauvaises actions ; sa tante, fort mécontente de lui, l’emmena aussitôt après le dîner ; et pour les deux autres enfants plus jeunes, leurs mamans les grondèrent beaucoup et les tinrent en pénitence toute la soirée.

Maintenant, Édouard n’avait plus que des sujets de satisfaction ; car tout le monde, pour le venger de l’injustice qu’un moment il avait subie, lui faisait fête, et lui marquait de l’estime et de l’amitié ; cependant, fatigué des émotions de cette soirée, il fut heureux que ses parents éprouvassent comme lui le besoin de l’abréger. Quand ils se trouvèrent tous les quatre, seuls dans la voiture qui les ramenait à Paris, ils s’embrassèrent avec effusion.

« Mon enfant, dit le père d’Édouard, tu m’as fait éprouver de cruelles douleurs et de grandes craintes. Mais à présent, je suis sûr que je puis être fier de toi. »

La maman, qui n’avait point douté de son fils, jouissait délicieusement de le voir réhabilité devant tous, et surtout du courage qu’il avait montré ; car elle voyait la preuve que son cher enfant avait acquis — ce que, malheureusement, n’ont pas tous les hommes — une conscience, c’est-à-dire l’agent de tous les efforts, de toutes les vertus.

« Elle est vraiment trop impressionnable, disait sa mère. Je ne sais ce qu’elle a depuis quelques jours. »

LUCIE B.

La suite prochainement.


PETITS ET GRANDS

I.

Notre France si riche, si belle aujourd’hui avec ses palais, ses grandes villes, ses villages, ses champs bien cultivés et ses jolies prairies, était, dans un temps bien éloigné de nous, couverte d’épaisses forêts et peuplée de monstres aux formes gigantesques qui se la disputaient entre eux.

L’homme n’existait pas encore ; et le roi d’alors, le Dinothérium, dont le nom veut dire « animal terrible » était si grand qu’une salle de six mètres de longueur aurait eu peine à le contenir, et si fort que des animaux de quinze pieds de haut et beaucoup plus gros que l’éléphant de nos jours étaient obligés de fuir devant lui.

Pour Adrienne, elle ne pouvait se lasser d’embrasser son frère et sa maman, et pleurait avec une telle abondance qu’on dut s’efforcer de la consoler.

Avec un tel roi on ne pouvait guère espérer que combats acharnés et luttes sanglantes dans toute l’étendue de son royaume. Quand le Dinothérium et ses amis se livraient au plaisir de la chasse, la terre tremblait sous leurs pas, et leurs rugissements formidables allaient porter la terreur jusqu’aux extrémités des forêts.