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charge jusqu’à 2,000 kilogr., et le transport ne coûte par kilogr. que la moitié de ce qu’il coûtait sur le mauvais chemin.

L’INSTITUTEUR. — Améliorons donc toujours nos voies de communication, ce sera de l’argent et de la peine bien placés.

Maurice BLocx. La suite prochainement.


LA JUSTICE DES CHOSES

ÉDOUARD DÉFENSEUR DU FAIBLE

Celui des pensionnaires qu’on appelait le grand Victor, était un garçon de treize ans, long, maigre, leste et vif, avec une petite figure allongée, qui faisait vaguement penser à celle de la fouine. Ce n’était pas un mauvais camarade. Il rendait service avec plaisir, surtout s’il s’agissait de fournir une course, ou de grimper au sommet d’un arbre. Il eût, je crois, entrepris plus volontiers de porter une lettre dans la lune que de faire des vers latins, ou de rester immobile une heure de temps. Ce remuant personnage était, bien entendu, le chef de toutes les entreprises et de tous les jeux ; mais chef surveillé de près par M. Ledan, qui le redoutait pour la sécurité des autres enfants, moins entreprenants et moins agiles. On craignait toujours qu’il ne se cassât le cou dans les ruines, ou dans les coteaux ; dans les bois, ce n’était qu’un écureuil de plus. Il y allait dénicher, à la cime des plus grands arbres, tantôt pour les œufs, et tantôt pour les petits, des nids de merles, de geais, de pies, de corneilles, Il avait une collection d’œufs de toute espèce, qu’il augmentait sans cesse, et il élevait dans le jardin trois merles, une corneille et un milan. Toujours à la piste des nids, il les découvrait avec une sagacité merveilleuse ; Édouard en était inquiet pour ses bouvreuils.

Craignant de ne pouvoir obtenir de Victor qu’il les respectât, il n’avait confié le secret de leur existence qu’à ses deux fidèles amis, Émile et Amine, qui l’avaient religieusement gardé. Mais, il arriva que, Victor étant dans le jardin d’Édouard, le père bouvreuil, confiant dans la protection de son hôte, rentra au logis sans mystère. Victor qui avait toujours l’œil en quête, l’aperçut.

« Un nid, s’écria-t-il aussitôt. Sûrement, il y a là un nid de bouvreuil ! »

Et il s’élançait vers le mur, quand Édouard se jeta au-devant de lui.

« Tu n’as pas le droit de le prendre, s’écria-t-il à son tour, il est à moi !

— À toi ? Le jardin, fort bien ; mais non pas le mur.

— Si, le mur est aussi à moi. Je ne veux pas que tu prennes mes oiseaux.

— Ah ! le mur est à toi ! Par exemple ! En voilà une prétention ! Pourquoi le jardin est-il à toi ? Parce que tu le cultives. Mais tu ne cultives pas le mur apparemment ?

— Enfin, je connaissais le nid ; c’est moi qui l’ai trouvé.

— Il fallait le prendre.

— Non, je veux le laisser là. Puisqu’il est à moi, j’en fais ce que je veux.

— Tu n’as pas de titres de propriété ; tant pis pour toi. Laisse-moi passer.