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mourait d’envie de voir les petits ; mais il craignait d’effrayer ces chers oiseaux, qui se confiaient à lui, et vaquaient aux soins de leur ménage, quand il était là, comme en présence d’un ami.

La curiosité pourtant devint si forte, et l’occasion d’une échelle double placée tout près de là, tenta si bien Édouard, qu’il plaça l’échelle en face du nid et monta. La petite mère était là, et le regarda, tout effrayée, même, à ce qu’il crut, d’un air de reproche.

« Petite ! petite ! lui dit Édouard de sa plus douce voix, n’aie pas peur, val ! Je ne veux pas te faire du mal, ni à tes petits ; je veux seulement les voir. »

Elle ne comprit pas ; car elle partit brusquement, effarouchée, fendant l’air. Mais les petits, eux, qui, tout ignorants de la vie, n’avaient pas peur, levèrent la tête, et tendirent à Édouard leur bec ouvert, I] ne put s’empêcher d’en rire :

« Sont-ils drôles, je ne suis pas votre papa, moi. Comment, vous avez déjà des plumes ; vous seriez presque en âge d’aller au collège, si vous étiez des garçons, et vous ne distinguez pas encore le bouvreuil de l’homme ! Il est vrai que dessous ce lierre, ils n’ont encore rien vu. »

À ce moment, les deux parents arrivèrent ; car la mère était allée chercher son mari dans un tel péril, et tous deux volaient autour d’Édouard en poussant des cris. Il descendit pour ne pas les effaroucher davantage, emporta l’échelle, et la paix revint au nid.

Toutes ces choses charmaient Édouard. Il traduisait avec amour les Géorgiques et disait souvent : « Quand je serai grand, je veux être agriculteur. »

— Et vous ferez bien, répondait M. Ledan ; mais il faut qu’un agriculteur soit un homme, c’est-à-dire qu’outre les influences de la nature, il reçoive l’héritage humain, les pensées, les progrès, les épreuves, l’expérience enfin de l’humanité. Ce travail de la terre est pour vous le plus attrayant, parce qu’il porte promptement ses fruits. L’espoir, et bientôt la joie de la récolte, ici vous font sentir et comprendre facilement les bienfaits du travail et ses récompenses. Mais l’étude aussi a ses récompenses et porte ses fruits. S’ils sont plus lents à venir, ils ne sont ni moins nourrissants ni moins savoureux. Tout travail est fécond ; tout travail produit la force et donne la joie. Croyez-en votre jardin ; mais étendez cette expérience à tout ordre de travail, et cultivez votre esprit avec autant de soin que vos laitues.

Lucie B.

La suite prochainement.


CAUSERIES ÉCONOMIQUES

LES DÉBOUCHÉS.

Pendant cette même année de mauvaise récolte, le commerce n’allait pas, et l’industrie se plaignait vivement. Ce n’était la faute à personne, tout le monde faisait ce qu’il pouvait, du moins autant que nous sachions, pour placer ses marchan-

dises ; mais les circonstances étaient défavorables.

C’était du moins l’opinion que soutenait le père Dupont devant quelques voisins qui cherchaient, comme on dit, midi à quatorze heures.