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elle, ses yeux qui ne mentaient jamais !…

La maman d’Édouard fut un moment sans parler, et ce fut ensuite d’une voix toute brisée qu’elle dit :

« Je ne suis pas venue plutôt parce que j’étais accablée… Si coupable que tu sois, je ne te rejetterai pas, car tu es mon enfant… Mais tu n’es pas celui que je croyais… Je cherche Édouard et ne le trouve plus… »

Un silence suivit ces paroles, plus cruelles pour Édouard que de vifs reproches ; puis, un sanglot déchira la poitrine du coupable, et se rapprochant, toujours à genoux, de sa mère, ce fut en pleurant, avec des cris de douleurs, qu’il lui exprima son repentir :

« Oh ! maman, maman ! qu’est-ce que je pourrais donc faire pour te prouver que jamais… jamais… je ne commettrai plus… rien de semblable. Vois-tu, les choses les plus difficiles… cherche… dis-moi… oui, je ferai tout… Ah ! si tu savais !… si tu savais ce que je me dis à moi-même… quels reproches… Oui, je me maudis… J’ai mérité… Seulement, je t’en prie, ne m’abandonne pas ! et tu verras… tu verras… que je deviendrai… meilleur, bon tout à fait. Ah ! si je pouvais faire que cela n’eût pas été !…

— Hélas ! dit la maman, rien ne peut effacer les choses qui ont eu lieu ; elles restent dans notre vie. Mais on peut effacer ses fautes en soi, en devenant juste et honnête. Nous pouvons être plus loin du mal, à force de le détester, qu’avant de l’avoir commis. Je crois ton repentir sincère en ce moment. Mais il faut qu’il soit profond et durable, et ta conduite seule nous le dira.

— Oh ! tu verras ! tu verras ! je me sens une force, une volonté… oui, je serai meilleur qu’avant. Je ne songerai plus qu’à bien me conduire. Oh ! maman, tu retrouveras ton Édouard.

— Ah ! j’ai besoin de l’espérer, » dit la mère.

Et sa voix aussi fut interrompue ; car elle aussi pleurait, et Édouard vit qu’elle était toute pâle. Puis, elle reprit :

« Mais sache d’avance que tu auras beaucoup de peine à reconquérir l’estime. On se défie toujours de celui qui a trompé, et la faute d’un jour, en ceci, entraîne des années d’expiation. Souvent, on doutera de ta parole. Tu seras fréquemment humilié pour tes fautes passées et des rechutes pourraient t’enlever la confiance des autres à tout jamais.

— Non, non ! ce ne sera pas. Je suis sûr de ne plus mentir, je ne mentirai plus jamais. Et puis, maman, tu m’aideras ; oh ! je t’en supplie, ne m’abandonne pas. Garde-moi à la maison. »

La maman poussa un grand soupir.

« Ce n’est pas possible.

— Oh ! pourquoi ? pourquoi ?

— Je ne l’obtiendrais pas de ton père, et je n’oserais moi-même le vouloir. Car tu nous as prouvé que tu étais trop faible pour résister à la tentation de mal faire. Nous serions coupables de t’y exposer de nouveau. Je n’ai pas le temps de te conduire au collége et de t’y aller chercher tous les jours ; le soin de la maison, l’éducation de ta sœur, toutes mes occupations rendent la chose impossible. Nous ne pouvons pas non plus te faire donner des leçons à la maison ; il faut donc, nécessairement, que tu sois interne… »

Cet arrêt mettait Édouard au désespoir.

« Eh bien, maman, tu crains pour moi les mauvais conseils, les mauvaises compagnies… Là encore, il y en aura, et je serai tout seul, sans appui, sans conseil, tandis qu’auprès de toi… Oh ! si tu savais comme je veux désormais tout te dire… être fort et bon !… Oh ! crois-moi ! »

Crois-moi ! — Hélas ! Édouard n’avait