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une vieille botte de pêcheur, et un montant de cage à poules.

On le comprend, cet inventaire intéressa particulièrement le docteur Filhiol.

« C’est la boîte aux ordures de la mer !… » s’écria-t-il.

De fait, on n’aurait pu imaginer une expression plus juste. Et il ajouta :

« Il n’y a plus maintenant qu’à le jeter par-dessus le bord…

— Non point, mon cher Filhiol, déclara M. Bourcart.

— Et que voulez-vous faire de ce squale, capitaine ?…

— Le dépecer et conserver tout ce qui est utilisable !… Et, rien qu’en ce qui vous concerne, docteur, on tire de ces requins une huile qui ne se fige jamais et qui a toutes les qualités médicinales de l’huile de foie de morue. Quant à la peau, après avoir été séchée et polie, elle sert aux bijoutiers pour fabriquer des objets de fantaisie, aux relieurs pour faire du chagrin, aux menuisiers pour faire des râpes à bois…

— Eh ! capitaine, demanda le docteur Filhiol, allez-vous me dire aussi que le requin se mange ?…

— Sans doute, et ses ailerons sont tellement recherchés sur les marchés du Céleste-Empire qu’ils coûtent jusqu’à sept cents francs la tonne. Si nous ne sommes pas assez Chinois pour nous en régaler, nous faisons de la chair une colle de poisson qui est supérieure, pour la clarification des vins, des bières et des liqueurs, à celle que donne l’esturgeon. D’ailleurs, à qui ne répugne pas sa saveur huileuse, un filet de requin ne laisse pas d’être fort agréable… Vous voyez donc que celui-ci vaut son pesant d’or ! »

C’est à la date du 25 avril que M. Bourcart eut à noter sur le livre de bord le passage de la Ligne.

À neuf heures du matin, ce jour-là, par un temps clair, il avait fait au sextant une première opération, afin d’avoir la longitude, c’est-à-dire l’heure du lieu — et il la compléterait lorsque le soleil passerait au méridien en tenant compte, avec le loch, de la distance parcourue entre les deux observations.

À midi, cette seconde opération lui indiqua sa latitude par la hauteur du soleil au-dessus de l’horizon et il détermina définitivement l’heure par le chronomètre.

Le temps était favorable, l’atmosphère pure. Aussi ces résultats furent-ils tenus pour très exacts, et M. Bourcart dit, après ses calculs :